les vies épargnées par les réformes de 2002

Comparée à l'évolution de la période mai 1997/avril 2002 le nombre de vies épargnées par l'effondrement de la mortalité sur les routes pour la période mai 2002/avril 2010 a été proche de 25 000.

25 000 tués représentent l'équivalent de 25 années de mortalité par homicide volontaire en France

Les analyses de séries chronologiques par les épidémiologistes permettent d'évaluer un excès de mortalité ou une réduction (excès de décès pendant une période de canicule, réduction de la mortalité par poliomyélite au cours des cinquante dernières années) . Elle fait appel à des méthodes très diverses. Les plus sophistiquées sont utilisées quand de nombreux co-facteurs sont associés et qu'il convient d'éviter d'attribuer à des facteurs de risque plausibles des conséquences qu'ils n'ont pas produites. La plus simple consiste à calculer un taux moyen de décès pendant les deux périodes et à faire la différence entre ce qui aurait été observé si la mortalité était demeurée stable et les valeurs réelles observées après une évolution.

Il est plus facile de produire des résultats crédibles avec des méthodes à la fois robustes et simples quand les variations sont importantes, puis se stabilisent pendant une période nettement délimitée. Une fois observée une différence importante, il faut l'expliquer. Cette seconde partie de la démarche est facilitée quand des hypothèses de causalité solides existent et quand des indicateurs intermédiaires quantifiés sont disponibles. L'exemple de la canicule est évident, il était possible de compter l'excédent de décès par rapport aux périodes identiques des années précédentes, les courbes de températures étaient connues et des statistiques épidémiologiques établies en période de canicule, à Chicago ou à Marseile avaient établi les relations entre températures et mortalité. Nous sommes dans un situation du même type pour évaluer les décisions concernant le dispositif de contrôle et de sanctions des excès de vitesse. Nous disposons des données de l'observatoire des vitesses et de modèles statistiques empiriques reliant la variation de mortalité sur les routes à la variation de la vitesse moyenne.

En France, le débat sur les conséquences défavorables des amnisties présidentielles dans le domaine de la sécurité routière a produit un conflit très médiatisé. Quand jai fait l'hypothèse de cette relation à propos de l'élection de 1988 puis de 1995, cette hypothèse a été contestée. Les élections de 2002 puis de 2002 l'ont confirmée, avec évidemment des effets plus réduits en 2007, la pratique de ce type d'aministie ayant été abandonné lors de l'élection de 2005 (malheureusement l'annonce trop tardive n'a pas permis d'éviter l'accroissement des tués sur les routes fin 2004 et début 2005). Ce conflit a été décrit sur ce site (éditorial de janvier 2002 et d''avril 2002).

Quelle évaluation peut-on produire de l'économie en vies humaines produite par la réforme de 2002 ? L'annonce de la priorité de Jacques Chirac le 14 juillet 2002 a entamé le processus, il s'est poursuvi par une réunion d'associations et d'experts avec les ministres concernés en septembre puis par un travail interministériel aboutissant aux décisions annoncées lors du premier comité interministériel de cette législature le 18 décembre 2002. Certaines mesures intervenaient le jour même, par exemple la circulaire du minstre de l'intérieur interdisant toutes les suppressions abusives des infractions au code de la route. Dès la fin décembre, une rupture dans l'évolution de la mortalité routière était constatée, elle allait se poursuivre les années suivantes au fur et à mesure de la mise en place des dispositions réglementaires, législatives et techniques qui avaient été décidées.

Pendant les 60 mois de la législature "Jospin" (mai 1997/avril 2002) : 42 704 tués (à 30 jours) soit 712 tués par mois en moyenne.

Pendant les 96 mois de la législature "Raffarin/de Villepin puis Fillon : 41 270 tués soit 430 par mois.

La réduction de mortalité pendant les 5 ans de 1997/2002 a été de 2,2%,  soit 3,5% pour une période de 8 ans si elle s'était poursuivie avec la même tendance. La poursuite à un niveau constant de  712 tués par mois pendant 96 mois aurait produit 68 352 tués. Si l'on intègre une une réduction de 3,5% qui serait la simple prolongation de la faible réduction de mai 1997/avril 2002, le nombre aurait été de 68 352 - 2392 = 65 960.

Entre 65 960 et 41 270 la différence entre l'évolution inchangée et l'évolution réelle est de 24 690, soit l'équivalent de 25 ans d'homicides volontaires (961 en 1997). En outre, il ne faut pas oublier que 20 usagers sont blessés sur les routes pour un tué, que 6,5 d'entre eux seront hospitalisés plus de 24h et que l'un d'entre eux conservera des séquelles graves de son accident.

graphique de la mortalité