Pf7justiceautomatiseeetpermisapoints.html
La notion « d’exception française » est un des quatre piliers de la reconstruction artificielle de la problématique de la gestion judiciaire du risque d’accident en France décrite par Airy Routier. En réalité le dispositif mis en place en France a des différences minimes avec les autres législations de ce type et nous avons développé cette position dans une des quatre analyses globales de ces descriptions orientées. (Apolitique2002organisationjuridique.html)
Nous avons présenté des exemples de dispositifs identiques dans des pays
francophones, la traduction des législations nationales de pays non
francophones n’étant pas envisageable :
- Au Luxembourg :
Dconceptpermisapointsluxembourg.pdf et
Dloiluxembourgpermisapoints.pdf
- Au Québec :
DcodesecuriteroutiereQuebec.pdf -
Dsaaqpermisapoints.pdf et
Dsaaqpouvoirs.pdf
Dbilanpermisapointssaaq.pdf
L'objectif de cette page est de développer une critique du sens donné à
la notion d’automaticité dans les textes et les propos d’Airy Routier
Le mot clé de son argumentation destinée à rendre insupportable le
dispositif français est « automaticité » avec des dérivés allant de « aux
flics devenus des robots » (vidéo du Nouvel Observateur du 27 mars 2007) à
« système entièrement robotisé » (FSP p.9). La conclusion est l’affirmation
que les citoyens peuvent être « condamnés sans pouvoir faire appel » (FSP
p.83), avec une revendication dérivée que « quand on se sent lésé pour une
raison grave, on a le droit de prendre l’arbitrage d’un juge » (vidéo du
Nouvel Observateur du 27 mars 2007), «quand on risque de perdre son permis,
donc son emploi, on doit pouvoir être soumis à l’appréciation d’un juge. ».
Les bases de la défense du permis à points et la réponse à ces
allégations d’une spécificité française sont les suivantes :
1. Cette procédure protège l’usager contre les
conséquences d’une faute isolée, qui peut être le fait d’une négligence ou
d’une inattention mais n’implique pas automatiquement la volonté de
transgresser la règle. Un automobiliste peut passer en léger excès de
vitesse devant un radar sans l’avoir vu, par qu’il est distrait ou
préoccupé. Il n’est pas pour autant un délinquant « intentionnel ». Le
permis à points lui assure une sécurité, c’est la répétition des infractions
qui devient le marqueur du non respect intentionnel des règles. Les débats
parlementaires sur la création du permis à points ont insisté sur ce fait.
Ces considérations sont également développées dans le document officiel
luxembourgeois
Dconceptpermisapointsluxembourg.doc qui a été produit au moment de la
création de ce type de permis au Grand Duché de Luxembourg.
2. Nous avons des preuves de la différence profonde entre
ces deux comportements (délinquance occasionnelle et délinquance d’habitude)
et de la capacité du permis à points d’intégrer ces différences par son
principe même, à la fois qualitativement et quantitativement :
a. Les infractions des personnes qui voient leur permis
annulé faute de points ne sont pas les mêmes que celles de l’ensemble des
conducteurs qui ont perdu des points. Les infractions à la législation sur
l’alcool et sur les règles de priorité sont plus fréquentes en cas
d’annulation (DinfractionspermisapointsONISR.pdf),
alors que les excès de vitesse et les infractions à l’usage du téléphone
sont plus fréquentes pour l’ensemble des conducteurs que chez ceux dont le
permis a été annulé faute de points. Les radars automatiques ont sanctionné
un grand nombre de conducteurs pour de faibles excès de vitesse et ils ont
adapté leur comportement aux nouvelles règles sans perdre leur permis. La
transgression répétée des règles sur l’alcoolisation ou des règles de
priorité est d’une autre nature quand elle aboutit à l’annulation du permis.
La proportion élevée de points perdus pour absence de « protection » (port
de la ceinture) s’explique par le fait que cette infraction est souvent
associée à une autre chez les polyinfractionnistes, notamment en cas de
conduite sous l’influence de l’alcool.
b. La différence entre les pertes de permis par annulation
faute de points chez les femmes est les hommes est un autre argument très
solide pour caractériser des types et des niveaux de délinquance différents.
En 2005, 95% des titulaires de permis annulés étaient des hommes. Rappelons
que les kilométrages parcourus en fonction du sexe convergent. En 2002, les
femmes ont parcouru en moyenne 11.910km et les hommes13.550 Les femmes font
en ville 4.370km, les hommes 4.120 Les femmes font sur autoroutes 2.070 km,
les hommes 3.090 Les femmes font sur routes 5.470 km, les hommes 6.340. Les
différences de représentation des hommes et des femmes dans les différents
types de délinquance sont documentées depuis que les statistiques
judiciaires existent. Actuellement la proportion de femmes dans les prisons
est de 3,7% et cette proportion est stable. La proportion de femmes perdant
leur permis faute de points est cependant en croissance modérée mais
régulière. L’analyse des proportions d’hommes et de femmes ayant perdu des
points en fonction du nombre de points par infraction ou du total des points
retirés met en évidence une représentation plus croissance régulière du
rapport hommes/femmes en fonction de ces deux variables. (Dpointsdepermisparsexe.pdf).
3. Il est faux d’affirmer que le dispositif du permis à
points français est totalement automatisé. L’automatisation n’est utilisée
que pour des actes qui n’impliquent pas un arbitrage humain et Airy Routier
produit lui-même des preuves de ce caractère non intégralement automatique
des procédures d’identification des infractions quand il indique « Au point
que prés du tiers d’entre elles (31,5%) devaient être jetées au panier par
le fonctionnaire charge de regarder les clichés, quand la machine ne pouvait
pas les lire. C’est la seule intervention humaine dans la chaîne entièrement
automatisée car la lecture optique de plaques sans la moindre intervention
humaine, rêve de technocrate informaticien, n’est toujours pas pleinement
opérationnelle. » (FSP p.103). Plusieurs problèmes peuvent se présenter
lorsque les photographies des véhicules en infraction sont traitées au
centre de Rennes, il peut y avoir plusieurs véhicules dans le champ, des
plaques d’immatriculation peuvent être identifiées par le dispositif
d’analyse comme présentant des indices d’incertitude sur une lettre ou un
chiffre. Les photographies sont alors examinées par un opérateur entrainé à
ce travail et le rejet d’une proportion élevée de procédures qui ne sont pas
techniquement irréprochables est un indicateur de qualité de la procédure et
non de défaillance. A un stade ultérieur, d’autres causes d’invalidation de
la procédure (usurpation de l’immatriculation, vol de véhicule) ne seront
identifiables qu’à l’initiative du propriétaire recevant le courrier émis
par le centre de Rennes. Les anomalies éventuelles au stade ultime de
l’annulation du permis faute de points peuvent être l’objet d’un recours
devant la juridiction administrative.
4. Affirmer qu’il est impossible de se défendre devant un
juge administratif en dehors des erreurs formelles de la procédure est
inexact. Il existe une jurisprudence dans ce domaine établissant la
possibilité d’une restitution du permis par le juge administratif fondée sur
la nature des infractions commises. Ces décisions sont rares car elles sont
en réalité contraires aux fondements du permis à point qui est de fonder la
gravité de la sanction finale (l’annulation du permis) sur la répétition des
fautes et non sur une faute unique, même grave (grand excès de vitesse,
conduite sous l’influence de l’alcool au niveau délictuel).
5. Le document d’information sur le permis à points
Luxembourgeois résume parfaitement les caractéristiques d’une telle
procédure et le caractère contradictoire de la volonté d’associer un système
fondé sur la notion de répétition des fautes pour produire l’annulation et
de l’intervention du juge à ce stade de la procédure. C’est au niveau de
chaque faute commise que le recours doit pouvoir intervenir, non au stade de
l’addition des points perdus «Les modèles étrangers sont par ailleurs axés
sur le principe que lorsque le seuil légal (exprimé en nombre de points
retranchés / accumulés) prévu pour déclencher une suspension du droit de
conduire est une fois atteint, la mesure intervient de plein droit (sauf au
Royaume-Uni où le juge garde un certain pouvoir d'appréciation) sans faculté
pour le juge ou le pouvoir administratif de moduler, le cas échéant, cette
mesure en fonction de la situation professionnelle ou privée de
l'intéressé. » (Dconceptpermisapointsluxembourg.doc)
6. Les caractéristiques du permis à points instauré au
Québec illustrent également cette distinction entre une procédure judiciaire
qui sanctionne par des amendes et éventuellement des peines d’emprisonnement
et un procédure de permis à points totalement disjointe de la précédente et
qui est gérée par la société d’assurances automobile du Québec (qui utilise
les points de pénalité du permis de conduire pour fixer les cotisations
d’assurance, comme le malus des assureurs français déterminé lui par
l’accidentalité de l’assuré et non par les infractions au code de la route).
Nous avons obtenu de la SAAQ une étude comparant les résultats français et
Québecois montrant la proximité des deux pays en termes de répression des
infractions de la route et de gestion des permis à points.(DbilanpermisapointsSAAQ.pdf)
Commentaires
Le dispositif français du permis à points n’a rien d’original, il automatise
ce qui peut l’être car c’est la condition de l’efficacité. L’usager sait que
s’il passe devant un radar et qu’il est en situation d’infraction, la
procédure sera engagée et que la sanction sera rapide et inévitable, le
dispositif étant plus résistant au trafic d’influence qu’une procédure
manuelle. Cette automaticité assure donc l’équité.
Les recours sont possibles quand ils sont utiles ou nécessaires. Ils sont
actuellement l’objet d’un usage abusif au niveau des tribunaux
administratifs, des arguments de formes étant exploités pour récupérer un
permis supprimé.
Le dispositif utilisé dans les différents pays qui ont un permis à points
est pratiquement identique dans sa forme, seuls les barèmes sont différents.
La seule particularité de forme du dispositif français est de partir d’un
capital de points maximal, les infractions provoquant une soustraction de
points à ce capital, alors que les autres pays ont choisi un point de départ
avec zéro point de pénalité et un ajout progressif jusqu’au niveau
provoquant l’annulation du permis.