Seule la partie du rapport de la commission des lois concernant le permis à points est reproduite ci-dessous
Article 28 bis
(art. L. 223-6 du code de la route)
Réduction des délais nécessaires pour reconstituer partiellement
ou totalement le capital initial de points du permis de conduire
Cet article résulte d’un amendement de M. Alain Fouché, adopté par le
Sénat malgré l’avis défavorable de la Commission et du Gouvernement. Il
modifie l’article L. 223-6 du code de la route, en réduisant très
sensiblement les délais nécessaires pour reconstituer partiellement ou
totalement le capital initial de points du permis de conduire.
Le 1° réduit de trois ans à un an le délai nécessaire pour récupérer, en
l’absence de nouvelle infraction dans ce délai, l’intégralité des points
du permis de conduire.
Le 2° modifie une disposition introduite par la loi du 5 mars 2007
relative à la prévention de la délinquance. Elle prévoit que lorsqu’un
conducteur commet une infraction entraînant la perte d’un point, ce
point est récupéré au bout d’un an, en l’absence de nouvelle infraction.
Ce délai passerait à six mois.
Votre rapporteur observe que, contrairement à ce qui avait été prévu
dans la loi du 5 mars 2007, aucune mesure transitoire n’est envisagée.
Les nouvelles règles s’appliqueraient donc à l’ensemble des pertes de
points déjà intervenues, inférieures à trois ans mais supérieures à un
an, qui seraient automatiquement effacées.
Votre Commission a adopté deux amendements. Le premier, présenté par
votre rapporteur, fait passer le délai prévu au 1° de un à deux ans : il
parait en effet préférable à votre Commission de ne réduire qu’à deux
ans et non à un an le délai nécessaire pour récupérer, en l’absence de
nouvelle infraction dans ce délai, l’intégralité des points du permis de
conduire.
Le second, présenté par notre collègue Philippe Goujon, étend les
possibilités d’effectuer des stages permettant la récupération de
points, en prévoyant un maximum d’un stage par an. En effet, le II de
l’article R. 223-8 du code la route prévoit actuellement un délai de
deux ans avant de pouvoir effectuer un nouveau stage de récupération de
points. Dans la mesure où le principe de la récupération de points en
suivant un stage de sensibilisation à la sécurité routière figure dans
la partie législative du code de la route, votre rapporteur considère
que les limitations à l’exercice de cette faculté doivent être décidées
par la loi.
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* *
La Commission examine quatre amendements, CL 51 de M. Jean-Pierre Grand,
CL 60 et CL 61 de M. Philippe Goujon et CL 185 du rapporteur.
M. Lionel Tardy. Une politique de sécurité routière a été engagée en
2002 sous la présidence de Jacques Chirac dans le but de réduire le
nombre des personnes tuées et blessées sur les routes françaises.
Or l’article 28 bis, adopté au Sénat contre l’avis du Gouvernement,
réduit les délais nécessaires pour reconstituer le capital de points sur
le permis de conduire : pour une infraction entraînant le retrait d’un
seul point, ce délai serait de six mois, tandis que la totalité des
douze points serait restituée après un an sans nouvelle infraction –
contre trois ans actuellement.
Une minorité de Français est concernée, puisque plus de 75 % des
conducteurs ont tous leurs points, et 90 % en ont entre dix et douze. Le
capital de points permet un droit à l’erreur, à la petite faute. Mais
lorsque l’accumulation de fautes est telle que l’on risque l’annulation
du permis, cela signifie que l’on a de mauvaises habitudes de conduite.
L’aspect psychologique est primordial. La simple annonce d’un
assouplissement des règles risque d’être perçue comme une incitation à
« se lâcher ». Il en résultera une nouvelle augmentation des accidents.
Même les petits excès de vitesse sont dangereux. La preuve en est qu’une
baisse de la vitesse moyenne d’un seul kilomètre-heure permet 4 % de
morts en moins.
Pour toutes ces raisons, je propose de supprimer l’article 28 bis.
M. Philippe Goujon. La disposition adoptée au Sénat est en effet
excessive et constitue un mauvais signal au regard de la politique de
sécurité routière. Les amendements CL 60 et CL 61 visent donc également
à la supprimer. Toutefois, pour tenir compte de la nécessité pour les
automobilistes de recouvrer leurs points sans pour autant confondre
pédagogie et impunité, ils prévoient de permettre d’effectuer plus
facilement des stages de sensibilisation routière. L’amendement CL 60
autoriserait le suivi de deux stages par an, ce qui permettrait de
récupérer huit points. L’amendement CL 61 ne l’autoriserait qu’une fois
par an, pour en récupérer quatre.
M. le rapporteur. Le Sénat a en effet considérablement atténué la force
du dispositif de sécurité routière auquel nous devons pourtant
d’importants progrès. En particulier, la possibilité de récupérer tous
ses points en un an seulement risque de rendre inopérant un système qui
a fait ses preuves. La logique de la LOPPSI conduit au contraire à
alourdir les sanctions pour les délits les plus importants – grands
excès de vitesse, conduite sous l’emprise de l’alcool ou de stupéfiants.
Ainsi, la confiscation du véhicule est rendue possible en cas de
récidive ou de conduite sans permis.
Cependant, pour tenir compte du fait qu’un nombre grandissant de
personnes – plusieurs centaines de milliers – conduisent sans permis,
mon amendement CL 185 propose de permettre une récupération plus rapide
des points perdus : un délai de six mois sans nouvelle infraction
suffirait pour récupérer un point, tandis qu’il faudrait deux ans pour
récupérer la totalité. Cette solution médiane me paraît acceptable, car
elle ne va pas à l’encontre des objectifs que nous partageons tous en
matière de sécurité routière.
En conséquence, je suggère le retrait des autres amendements.
M. Dominique Raimbourg. Comme Lionel Tardy, je pense qu’il ne faut pas
réduire les délais de récupération des points. Outre la grande
délinquance routière, il existe une délinquance quotidienne, qu’il ne
faut pas paraître encourager. En revanche, il faut faire preuve de
pédagogie. Je suis donc favorable à l’idée de faciliter le suivi de
stages de sensibilisation.
M. Charles de La Verpillière. L’article L. 223-6 du code de la route
distingue deux situations. La perte de plusieurs points peut se
compenser en trois ans si l’on ne commet pas de nouvelle infraction dans
ce délai, tandis que la perte d’un point se récupère en un an dans les
mêmes conditions. Pour les infractions importantes, celles qui
entraînent la perte de plusieurs points, ce délai ne doit pas être
réduit. Même la solution moyenne proposée par le rapporteur
constituerait un mauvais signal. En revanche, il faut sûrement faire
quelque chose pour les infractions entraînant la perte d’un point. Il
est très énervant de perdre successivement des points à cause de faibles
dépassements de la limite autorisée. C’est ce genre de situation qui
rend furieux nos concitoyens. Sans même toucher au délai de
récupération, une forme d’assouplissement possible serait toutefois de
supprimer la condition selon laquelle aucune nouvelle infraction ne doit
être commise pour pouvoir retrouver ses points. Faute d’accord sur les
dispositions proposées, je proposerai un amendement en ce sens lors de
notre réunion dans le cadre de l’article 88 du Règlement.
M. Sébastien Huyghe. La décision de faire respecter strictement les
limitations de vitesse et l’implantation de radars automatiques auraient
dû s’accompagner d’un « repeignage » de l’ensemble des limitations de
vitesse sur le réseau routier car, sur de nombreux tronçons, la vitesse
autorisée est trop fortement limitée au regard des conditions de
sécurité. La situation est incompréhensible et tout contrôle est
assimilé à un piège par les automobilistes. De même, les limitations
varient trop souvent sans raison. Le Gouvernement devrait donc demander
aux préfets d’adapter les limitations aux réalités de la voirie.
Cela étant, le Sénat est allé trop loin en réduisant à un an le délai de
récupération de la totalité des points. L’amendement du rapporteur me
paraît donc constituer un moyen terme acceptable. De même, je suis
séduit par l’idée de permettre le suivi d’un stage de sensibilisation
plus souvent qu’aujourd’hui. Je suis donc favorable aux amendements CL
185 et CL 61.
M. Jacques Valax. Nous devons en effet conserver une ligne juridique
stable et ne pas donner de signe d’amollissement en matière de sécurité
routière. Mais il serait en effet utile de faire preuve d’une plus
grande souplesse en ce qui concerne les stages, et peut-être de trouver
le moyen de les rendre moins onéreux – par exemple en rendant le premier
gratuit.
M. Philippe Houillon. Je soutiens l’amendement du rapporteur, qui me
paraît équilibré. Pour de faibles excès de vitesse, un délai de six mois
pour récupérer le point perdu est raisonnable.
Je pense, pour ma part, que le nombre de personnes conduisant sans
permis dépasse le million. Il convient donc de se montrer plus mesuré,
même s’il n’est pas question de modifier une politique qui a permis de
réduire le nombre de tués et de blessés.
M. Lionel Tardy. Je maintiens qu’il n’y a pas de petites infractions. La
perte d’un point correspond le plus souvent à un excès de vitesse
inférieur à 20 kilomètres-heure. Or il faut savoir que 18 % des tués sur
la route le sont à cause de tels excès. C’est pourquoi il ne faut pas
modifier la réglementation actuelle.
M. Guénhaël Huet. Je soutiens également l’amendement du rapporteur.
Rouler délibérément bien au-delà de la vitesse autorisée, cela n’est pas
la même chose que de dépasser celle-ci de quelques kilomètres-heure.
L’intention, l’aspect psychologique de l’infraction ne sont pas les
mêmes.
M. Bernard Reynès. La disposition du Sénat risque d’être incomprise.
Nous devons faire preuve de souplesse, mais pas de permissivité. Le
compromis proposé par le rapporteur est donc sage, en ce qu’il tend à
réprimer les comportements accidentogènes sans stigmatiser l’ensemble
des chauffeurs. En revanche, je ne suis pas favorable aux autres
amendements qui risquent de brouiller le message.
M. Dominique Raimbourg. Sur le plan symbolique, il me paraît préférable
de ne pas modifier le délai de trois ans. En revanche, il convient de
donner la possibilité de suivre deux stages de sensibilisation par an.
M. Étienne Blanc. Le problème qui se pose aujourd’hui est celui du
nombre de citoyens qui conduisent sans permis à la suite d’une
annulation. En cas d’accident, ils ne peuvent bénéficier de l’assurance,
et c’est le Fonds de garantie – donc nous tous – qui procède aux
indemnisations. Face à cet excès, nous devons réagir.
Nous devons trouver un juste équilibre. Pour les petites infractions, un
délai de six mois paraît suffisant pour récupérer le point perdu. En
revanche, quelqu’un qui commet une infraction plus importante dans ce
délai ne devrait pas pouvoir bénéficier de cette récupération.
Pour récupérer la totalité des points, un délai de deux ans constitue
une solution équilibrée.
Il faut également permettre aux conducteurs de suivre plus fréquemment
des stages de sensibilisation, dont l’objectif est de leur faire prendre
conscience des infractions commises et de leurs conséquences
potentielles.
Ces trois dispositions sont donc cohérentes et ne constituent nullement
un signal négatif.
M. Claude Bodin. Nous sommes en effet dans l’excès : nos concitoyens ont
le sentiment d’une chasse aux automobilistes, voire d’un racket organisé
à leur encontre. Le Sénat a donc eu raison de faire bouger les lignes.
Mais il serait sans doute nécessaire d’effectuer une synthèse et
d’adopter à la fois l’amendement du rapporteur et l’un des amendements
de Philippe Goujon.
M. le président Jean-Luc Warsmann. Comme la plupart d’entre vous,
j’estime que la version du Sénat n’est pas acceptable. Nous devons donc
trouver une solution plus réaliste et, sans baisser la garde ni faire
preuve de laxisme, veiller à ce que le système ne génère pas
d’absurdité.
La Commission rejette l’amendement CL 51.
M. Philippe Goujon. Je retire l’amendement CL 60.
L’amendement CL 60 est retiré.
M. le président Jean-Luc Warsmann. Afin que les amendements CL 61 et
CL 185 ne soient pas incompatibles, il convient, avec l’accord de son
auteur, de rectifier le premier pour qu’il complète l’article plutôt que
de le rédiger globalement.
M. Philippe Goujon. Je suis d’accord.
La Commission adopte successivement l’amendement CL 185 et l’amendement
CL 61 ainsi rectifié.
Puis elle adopte l’article 28 bis modifié.