AvideoNO27mars2007.html
Ce document est également reproduit sous l’intitulé
AvideoNO27mars2007GerardPetitjean.pdf
La seule différence entre les deux versions est la présence de la signature
manuscrite de Gérard Petitjean à la page 10 de ce texte
Retranscription de la vidéo accessible sur le site internet du Nouvel Observateur à partir du 27 mars 2007. Ce document était encore accessible en mai 2009 à l’adresse internet suivante : http://videos.nouvelobs.com/video/iLyROoafYcVn.html
La présentation de la vidéo est assurée par l’intermédiaire d’une fenêtre
comportant le texte suivant : « Attaqué jusque dans nos colonnes, notre
journaliste Airy Routier, l`homme qui roule sans permis, contre-attaque.
Batailles de chiffres, appels de phares et queues de poisson, même au Nouvel
Observateur la bagnole rend fou... »
La vidéo a une durée totale de 14 minutes et 27 secondes. La retranscription
commence après l’annonce d’un numéro spécial du journal sur l’immobilier
parisien au temps 0 mn 36s, elle est interrompue à partir du moment où le
débat a porté sur l’évolution de la circulation et de la pollution à Paris
au temps 8 mn 41 s
Cette vidéo est particulièrement importante pour montrer qu’Airy Routier ne
respecte pas ses collègues du Nouvel Observateur. Elle illustre bien la
phrase de Montaigne citée dans le livre : « Si, comme la vérité, le mensonge
n’avait qu’un visage, nous serions en meilleurs termes : car nous prendrions
pour certain l’opposé de ce que dirait le menteur. Mais le revers de la
vérité a cent mille figures et un champ illimité ». Les propos les plus
importants et les plus pertinents de Claude Weill et de Gérard Petitjean
sont immédiatement contrés par un mensonge ou un démenti sans fondement.
Mes commentaires sont à la fin de ce document, ils sont repérés dans le
texte par un renvoi numéroté de 1 à 8. Certains étaient déjà sur la page du
site internet mise en ligne en avril 2007, d’autres ont été ajoutés après ma
retranscription récente de la vidéo (janvier 2009).
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Claude Weill (CW) … mais ce n’est pas de cela que nous allons parler,
mais d’une autre affaire, qui a agité la France, les plateaux de télévision,
et la rédaction de l’Observateur, l’affaire Routier, du nom de notre ami
Airy Routier, l’écraseur national numéro 1
Airy Routier (AR) ne commence pas comme çà toi … par ce que je vais
t’écraser…
CW c’est Gérard Petitjean … il conduit très bien, je précise qu’il conduit
très bien, sans permis mais très très bien
Gérard Petitjean (GP) ancien essayeur automobile
CW : ancien essayeur automobile, c’est Gérard Petitjean, dans le journal,
qui a couvert cette affaire, qui a écrit le premier papier sur le livre
d’Airy, La France sans permis, je rappelle ça s’appelle la France sans
permis, livre qui a plongé dans une rage … Monsieur Got par exemple, grand
défenseur de la sécurité routière, et un certain nombre d’associations, et
puis défendu ardemment par d’autres personnes, on va débattre de ça, Gérard
est-ce que tu penses toi, comme certains l’on dit, le courrier des lecteurs,
on a des lettres très violentes, sur internet ou sur papier, est-ce que tu
penses qu’Airy Routier est un écraseur ?
GP non, d’abord parce que je ne l’ai jamais vu écraser personne, simplement
je pense qu’il s’est trompé de cible dans son journal (livre !), il s’en
prend à la répression effectivement, plus exactement à la répression
automatique, c'est-à-dire les radars, le système…
AR : et aux flics devenus des robots
GP : et aux flics qui les servent ou qui les entourent
AR : non non les flics qui depuis Sarkozy sont devenus des robots
GP : absolument, donc il dit, c’est une honte ces radars, les PV faudrait
que ça passe devant un juge systématiquement, pour qu’il puisse apprécier
la…
AR : non j’ai pas dit ça erreur,
GP : ooh
AR : non, non, j’ai dit…
GP : tu dis que tu es contre la sanction automatique et que tu préfères que
ça passe devant un magistrat
AR : Non je préfère pas, je dis que dans tous les pays démocratiques sauf la
France, et je veux que cela se passe en France, quand on se sent lésé pour
une raison grave, on a le droit de prendre l’arbitrage d’un juge, je dis pas
que toutes les contraventions doivent aller devant un juge, j’ai pas écrit
ça, je dis simplement que quand on risque de perdre son permis, donc son
emploi, on doit pouvoir être soumis à l’appréciation d’un juge. Point
barre, donc première erreur, ton article d’ailleurs fourmille d’erreurs, tu
as écrit un article qui ne correspond en rien à ce que j’ai écrit dans le
livre.
CW Gérard continue,
GP bon, moi je veux bien qu’on dise que je n’ai pas lu le livre d’Airy, mais
ça m’étonnerait, quand même…
AR : tu l’as lu mais tu as été aveuglé par la bien-pensanse générale, par
cette espèce de flot d’informations biaisées, balancées depuis des années
par la sécurité routière, qui ne s’occupe que de la vitesse et de
l’alcoolémie, sans voir que c’est un chantier beaucoup plus large et qui
mérite d’être traité par des citoyens, pour des citoyens.(1)
CW : enfin, la vitesse et l’alcoolémie, c’est quand même les deux facteurs
principaux de mortalité
AR : non ce sont des facteurs aggravants, aujourd’hui par exemple, pour
faire simple, aujourd’hui la vitesse n’est plus un problème, c’est le manque
de vigilance qui est un problème.(2) Les italiens et les autrichiens
augmentent la vitesse sur leurs autoroutes, ce n’est pas pour avoir plus de
morts, c’est pour avoir moins de morts. C’est à dire que la vigilance, euh
…la vitesse sur autoroute, moyenne, baisse depuis cinq ans, le nombre de
morts augmente sur autoroute (3), ça c’est des statistiques qu’il faut
découvrir dans les documents de la sécurité routière parce que ça va à
l’encontre de cette espèce de propagande et donc qu’est ce qu’on fait quand
on a une preuve comme cela, on disqualifie les gens qui veulent discuter les
faits comme cela, donc moi on a cherché à me disqualifier, mais il reste que
il faut discuter ces choses là, parce que c’est un système beaucoup plus
compliqué, plus complexe, et moi, il y a eu des mails terribles, mais j’ai
eu aussi des mails de soutien, Alain Bauer qui m’a appelé hier matin pour me
dire, tu as raison, vous avez raison, en France on passe du laxisme absolu à
la répression folle, l’efficacité se trouve entre les deux.
GP : Eh bien, est-ce que tu contestes cette affirmation de la sécurité
routière selon laquelle quand la vitesse baisse de 1 kmh, on baisse de 4% la
mortalité sur la route.
AR : (4) je ne la conteste pas, je ne la soutiens pas, je voudrais voir les
éléments mathématiques qui sont prouvés derrière, puisque c’est des chiffres
balancés en l’air sans aucune base, je ne les ai vues nulle part les bases.
GP : ah bon donc moi je veux bien que tu contestes tout ce que je dis en
accidentologie, autre chose, tu dis à un moment, que le progrès technique
fait que le nombre d’accidents baisse, c’est vrai, simplement quand on a
annoncé la présence des radars en novembre 2002, le nombre des morts a
baissé de 30% d’un mois sur l’autre, donc c’est pas la diminution des points
noirs, c’est pas l’amélioration de la voiture qui a changé les choses, c’est
simplement l’annonce que l’on allait être ..
AR : c’est pas les radars puisque c’était l’annonce,
GP : oui c’était l’annonce
CW : donc la peur du gendarme
GP : donc la peur du gendarme
AR : je ne le conteste absolument pas, je le soutiens, je dis simplement,
que, je reconnais même partout, que la France a eu le record du monde, le
record d’Europe depuis les trois dernières années on a baissé de 35% le
nombre des morts. Ce que personne ne dit, c’est que les allemands ont fait
28, que les anglais ont fait 31, (5)
GP : oui mais en plusieurs années
AR : non, non,
GP : mais pas en un mois
AR : en un mois, attends, il n’y a pas eu
GP : en un mois le nombre de morts à baissé de 32%, non, non, attends arrête
de dire que je dis n’importe quoi, c’est des chiffres absolument vérifiés.
AR : non mais pas en un mois évidemment, moi je compte sur trois ans, en un
mois c’est remonté derrière,(6) ça n’a pas de sens en un mois, si tu prends
sur trois ans, la sécurité routière, la France est record d’Europe, elle
était en retard, les autres ont baissé de la même manière, mais les autres
n’ont pas ce discours infantilisant qui est incroyable de bêtise par rapport
à la réalité des faits. Le simple fait de parler de cela ça rend les gens
fous, j’ai reçu un coup de fil à l’Obs vendredi, une menace de mort, on va
te faire la peau parce que tu es un criminel, au nom de la sécurité
routière, une menace de mort, on est dans un monde de fous, c’est tout.
CW : mais tout de même, le fait est là, c’était une des priorités de Chirac,
c’est peut-être même dans le bilan de Chirac un des aspects positifs qui
resteront, il a politisé un certain nombre de sujets, le cancer, les
handicapés et la vitesse, qui autrefois n’étaient pas présentés comme des
sujets politiques, il en a fait trois priorités et sur ce terrain là on est
bien obligé de reconnaître qu’il a des résultats. La sécurité routière s’est
considérablement améliorée.
AR : je crois que c’est dans la première ligne et la deuxième ligne de mon
bouquin
CW : dés l’instant qu’il y a répression, on peut dire que quand ça vous
tombe sur la tête on trouve toujours que la cible est mal choisi, mais le
fait est que si l’on permet aux gens de contester les excès de vitesse, on
va avoir un flot de contestations que les tribunaux seront incapables de
gérer
AR : non pas du tout, pas du tout, d’abord dans tous les pays du monde, il y
a un juge, quand il y a des erreurs manifestes
CW : on peut contester
AR : en France non,
CW : on peut contester
AR non ! non, justement c’est bien là le problème, on ne peut pas contester,
si l’on ne conteste pas au début, par exemple quand on perd son permis, sans
avoir été prévenu, ce qui arrive, on ne peut pas contester devant un juge,
c’est administratif. Il y a deux, la procédure administrative, la procédure
judicaire, elles sont indépendantes, non, non, alors là on peut en discuter
des heures, mais, non, je demande simplement du bon sens, aujourd’hui,
l’argent, qu’est ce qu’on peut faire pour améliore la sécurité
routière aujourd’hui, aujourd’hui l’essentiel c’est les deux roues ou les
piétons (7). En Angleterre, les passages protégés sont signalés avec des
feux oranges, ils sont très signalisés, en France, ils sont à moitié effacés
partout, c’est une zone de non droit les passages cloutés comme on les
appelait avant. C’est des choses simples, la signalisation c’est un chantier
essentiel, personne n’en parle, personne n’en parle, il y a comme cela des
tas de mesures, le simple fait de dire cela, on est considéré comme un fou,
GP : pas du tout, parce que d’ailleurs si je regarde sur les sites qu’a créé
Claude Got que tu n’aimes pas beaucoup et que tu appelles un ayatollah de la
sécurité routière, lui insiste énormément sur cette histoire de sécurité
routière. Donc il y a des points sur lesquels on peut se retrouver
d’accord et personne ne contestera la dessus. Simplement il y a encore 13
morts chaque jour sur les routes
CW : avec une recrudescence depuis le début de l’année, est-ce que vous
pensez que c’est lié à l’approche des élections et à la possibilité d’une
amnistie,
AR : non non il n’y aura pas d’amnistie.
CW : alors pourquoi est-ce que la mortalité depuis janvier, elle redémarre,
AR : non, non elle a redémarré sur un mois, sur trois mois elle a baissé.
(8)
GP : depuis qu’on a annoncé qu’il n’y aurait pas d’amnistie,
CW : alors un témoin, objectif, Eve ?
Eve Roger (ER) En tous cas moins sanguine que ces messieurs,
CW : et moins passionnée, quelle est ta position, toi
ER : Ce que j’ai remarqué c’est qu’effectivement les chiffres de
l’accidentologie augmentaient depuis le mois de janvier en particulier à
Paris …
8 minutes 41
La suite du débat ne concernant plus le livre d’Airy Routier et le débat
qu’il avait suscité au sein de la rédaction du Nouvel Observateur, il n’a
pas été retranscrit par écrit.
******************
Analyse et commentaires de cette vidéo par Claude Got
1. Cette partie du débat est une bonne illustration de
l’impossibilité de conduire une discussion sincère entre des personnes de
bonne foi et un manipulateur Gérard Petitjean et Claude Weill tentaient
d'introduire de la rationalité dans la discussion en parlant du livre, alors
qu’Airy Routier s’opposait à leurs propos par des affirmations relevant de
trois procédures distinctes :
a. Invalidation des données utilisées par les pouvoirs
publics : Les faits établis sont "un flot d'informations biaisées balancées
depuis des années par la sécurité routière" qui ont permis de construire une
forme de politiquement correct (« la bien pensanse »)
b. Mise en cause directe, agressive et sans nuance de
l’article de Gérard Petitjean qui « fourmille d’erreurs, tu as écrit un
article qui ne correspond en rien à ce que j’ai écrit dans le livre. »
c. Volonté de faire sortir l’accidentologie du domaine de
la recherche et des faits vérifiés pour la remplacer par un débat public: Il
s’agit « d’un chantier beaucoup plus large et qui mérite d’être traité par
des citoyens, pour des citoyens ». Le débat sur la sécurité routière mérite
en effet d’être placé au niveau de l’ensemble de la société. Cela ne
signifie pas que l’on puisse considérer chaque conducteur comme un
spécialiste des accidents. Airy Routier veut confisquer le débat sur les
connaissances et en fixer lui-même les bases et les conclusions.
2. Parlant de la vitesse et de l’alcoolémie, Airy Routier
ose utiliser l'expression appréciée des revues automobiles parce qu’elle
semble nier l’influence causale "Non ce sont des facteurs aggravants", comme
si les épidémiologistes n’avaient pas d’arguments permettant d’identifier
les facteurs intervenant de façon causale et calculer la fraction des
accidents attribuable à un risque donné. La courbe du risque relatif d'être
impliqué dans un accident lié à l'alcool en fonction de l'alcoolémie a été
publiée par Borkenstein aux USA il y a près de cinquante ans. A partir de
ces données nous savons calculer le nombre d'accidents attribuables à
l'alcool, c'est à dire qui n'auraient pas eu lieu en l'absence d'alcoolémie
dépassant un seuil donné. Nier cette évidence de nature scientifique en 2007
n'est même pas de la provocation, c'est un déni. La situation est identique
pour la vitesse. Dans un environnement donné, le risque est une fonction
exponentielle de la vitesse, là encore ces courbes sont établies depuis des
décennies et les accidentologistes du monde entier les connaissent et les
utilisent. Quand un usager arrive trop vite dans un carrefour sans
visibilité, ne peut s'arrêter à temps malgré son freinage et heurte un autre
véhicule, sa vitesse excessive n'est pas un facteur aggravant, c'est un
facteur causal. La relation est identique quand un automobiliste perd le
contrôle de son véhicule dans un virage abordé à une vitesse excessive.
a. Ces notions ne sont pas françaises, elles sont
reconnues universellement. Au moment de la publication du livre d’Airy
Routier, le bureau de prévention suisse des accidents a rendu publique début
février 2007 la mortalité de 2006. Le journal "Le Temps" du 21 février
rapportait : "Les deux principales causes d'accidents mortels restent
l'alcool et la vitesse". c'est vrai en Suisse comme en France et même le BPA
participe à la diffusion d'un "flot d'informations biaisées balancées depuis
des années par la sécurité routière".
b. Quand Claude Weill a tenté de rappeler ces deux faits
reconnus par tous les chercheurs travaillant sur la sécurité routière, il a
été immédiatement bloqué par un déni d'Airy Routier. Aujourd'hui la vitesse
n'est plus un problème, c'est la vigilance qui est un problème ". Il est
certain que la réduction de la vigilance est un problème important, mais
énumérer un facteur de risque ne permet pas de réduire à néant l’influence
des autres facteurs. Les conséquences du manque de vigilance ne sont pas
indépendantes de la vitesse. La réduction de la vitesse de circulation évite
l’accident ou réduit la violence des chocs, donc le risque de blesser. Il
est abusif de vouloir utiliser une de ces « causes » d’accidents en les
opposant aux autres, pour minimiser l’importance de ces dernières, notamment
quand des interrelations les unissent. Le dénombrement des accidents par
hypovigilance par les sociétés d’autoroute prouve leur stabilité en
proportion en France pendant la période d’abaissement de la vitesse moyenne
de circulation : 36% en 2001, 35% en 2004. (DaccidentsAROhypovigilance.pdf).
Cela signifie que leur nombre en valeur absolue à fortement diminué pendant
cette période.
3. Ces propos sortent du cadre des affirmations sans
preuve et entrent dans celui des mensonges caractérisés. Il y en a deux dans
le paragraphe.
"Les italiens et les autrichiens augmentent la vitesse sur les autoroutes
pour avoir moins de morts". Les Italiens et les Autrichiens ont une
mortalité au kilomètre parcouru sur autoroute supérieure à la nôtre, ce
n'est pas parce que le lobby de la vitesse de ces pays a obtenu
transitoirement cet accroissement de la vitesse maximale autorisée sur
certaines parties de leur réseau autoroutier en Autriche et la possibilité
de le mettre en œuvre pour les sociétés d’autoroutes italiennes qu'il faut
imiter cette erreur. En France, l’évolution de la mortalité sur les
autoroutes en fonction de la variation des limites de vitesse a été
documentée avec précision pendant la période 1973/1974 qui a connu trois
modifications successives des vitesses maximales autorisées. L’’Autriche a
fait une expérimentation de courte durée de vitesse plus élevée sur des
tronçons d’autoroute, elle a été abandonnée le 22 avril 2007. En Italie, le
ministre Pietro Lunardi avait annoncé son intention d’accroître à 160 km/h
la vitesse maximale sur certaines autoroutes le 26 juillet 2001, il a
ensuite réduit à 150 km/h cette limite qui pouvait être mise en œuvre à
partir de novembre 2003 par les sociétés d’autoroute. Aucune d’entre elles
n’a utilisé cette possibilité.
« La vitesse moyenne baisse sur les autoroutes depuis 5 ans et le nombre de
morts augmente". Cette affirmation est fausse. Ne sachant pas si Airy
Routier fait référence aux résultats 2001/2005 ou 2002/2006 (le livre est
paru début 2007, et les résultats détaillés de 2006 étaient partiellement
accessibles fin mars 2007) il est utile de documenter les différentes
hypothèses à partir des données de l’observatoire interministériel de
sécurité routière. 492 tués sur les autoroutes en 2001 et 324 en 2005 soit
une réduction de 34.1 %. 493 tués sur les autoroutes en 2002 et 296 en 2006,
soit une réduction de 40 %. Si l’on prend en compte la période concernée par
la nouvelle politique de sécurité routière, mise en œuvre fin 2002, nous
constatons que par rapport à 2002 la réduction de la mortalité constatée fin
2005 a été de 38,5% sur l’ensemble des réseaux autoroutiers (de 36,2% sur
les autoroutes de liaison et de 43,2% pour les autoroutes de dégagement.
Oser dire que le nombre de morts augmente alors qu'il s'est réduit de 38,%
montre à quel point de déni de la réalité se situe le discours d'Airy
Routier (rappelons qu’il convient de multiplier par un facteur estimé à
1,069 les valeurs de mortalité antérieures à 2005, le décompte des décès
prenait alors pour critère la mort dans un délai de 6 jours après
l’accident, ce délai a été porté à trente jours à partir de 2005 pour nous
aligner sur les normes recommandées au niveau de l’Union)..
Quand Gérard Petitjean lui cite le lien statistique entre l'évolution d'une
vitesse moyenne et l'évolution de la mortalité, Airy Routier tient les
propos suivants : "je ne la conteste pas, je ne la soutiens pas, je voudrais
voir les éléments mathématiques qui sont prouvés derrière, puisque c'est des
chiffres balancés en l'air sans aucune base. Je ne les ai vues nulle part
les bases". Une première lecture de cette réponse donne l’impression
qu’Airy Routier est simplement ignorant. Son livre évite les références des
chercheurs dans le domaine de l’accidentologie. L'auteur cite
préférentiellement les journaux généralistes et la presse automobile (Pi4bibliographieselective.html).
Faire le lien entre la connaissance scientifique et le grand public est de
la responsabilité du rédacteur en chef de la rubrique enquêtes d’un journal.
Airy Routier pouvait demander à des spécialistes de la modélisation du
risque lié à la vitesse tels que Simon Cohen, Hubert Duval, Sylvain Lassarre,
Jean-Pierre Orfeuil de l’éclairer sur ce type de risque (voir Limitations de
vitesse – les décisions publiques et leurs effets Hermès éditeurs 1998
-
dlienvitessemoyennemortaliteCohen.pdf). Ne pas vouloir se tenir au
courant de l’état des connaissances est une méthode de protection, mais ce
n’est pas une démarche de journaliste. L’explication par l’ignorance ne
tient pas. En poursuivant l’analyse des écrits d’Airy Routier, il est apparu
que ce dernier consacre deux pages de son livre (DFSP80_81.pdf)
à la critique du rapport d’évaluation des radars automatiques (CSA) par
l’Observatoire national interministériel de sécurité routière. Deux
chapitres de ce rapport sont consacrés à l’effet du CSA sur l’ensemble des
vitesses pratiquées sur les différents réseaux. La relation entre 1% de
diminution de la vitesse moyenne et 4% de réduction de la mortalité est
longuement débattue, avec les formules et leurs variantes. La référence
d’une étude récente faisant le bilan de l’ensemble de ces analyses est
produite dans ce document. (Pf8ignorancedesliensvitessemortalite.html).
Cette partie de la discussion est importante, Airy Routier reprenant là un
thème qu’il décrit longuement dans son livre. La France n’aurait pas obtenu
avec sa nouvelle politique de sécurité routière des résultats en rupture
avec ceux d’autres pays européens. Il reconnaît qu’elle a été la meilleure
au cours de la période récente, mais situe d’autres pays à des niveaux
équivalents.
a. Pour nous prouver que les autres pays européens ont
fait les mêmes progrès que nous, sans "infantiliser" leurs usagers, Airy
Routier affirme que lors des trois dernières années, "Les Allemands ont fait
28% et les Anglais ont fait 31%". Ces deux chiffres sont faux, entre 2002 et
2005 l'Allemagne est passée de 6842 à 5361 tués soit une baisse de 21,6% et
L'Angleterre de 3431 à 3201 soit une baisse de 6,7%. La France passant de
7654 à 5318 soit une baisse de 30,5%. Nous savons que cette période
2002/2005 n'est pas la plus appropriée pour apprécier les effets de la
politique de sécurité routière entreprise en 2002, puisque l'effet d'annonce
de la priorité présidentielle et le renoncement à l'amnistie, associés
à d’autres mesures intervenant dès décembre 2002, comme l’interdiction de
toute indulgence en matière d’infractions aux règles de sécurité routière,
ont déjà eu des effets en 2002.
b. L'évaluation la plus objective doit intégrer ces
annonces du printemps et du début de l'été 2002. Pendant les 12 mois qui ont
précédé mai 2002 et le changement de gouvernement il y a eu 8368 tués sur
les routes françaises (tués dans les trente jours qui suivent l'accident en
utilisant le coefficient correcteur de 1,069 par rapport aux tués dans les
six jours qui suivent l'accident), en décembre 2006 nous étions à 4721 tués
à 30 jours, la réduction est de 43,6 %. Si l'on compare la période 2001/2005
pour laquelle nous connaissons la mortalité de tous les pays européens sauf
l'Italie et l'Irlande qui sont toujours en retard dans leurs publications
statistiques, et en évitant de détériorer les résultats en leur ajoutant
ceux des nouveaux adhérents, nous obtenons pour la France une réduction de
34,8% (8160 à 5318) et pour les autres pays de l'Europe de l'Ouest (Suisse
et Norvège inclus) une réduction de 18,1 % (27317 à 22371).
c. L'affirmation que les autres pays ont amélioré leurs
résultats sans infantiliser les usagers veut faire croire que la prévention
par la crainte d'une répression efficace n'aurait pas été utilisée dans ces
pays. Ce sont les Hollandais et les Anglais qui nous ont prouvé l'intérêt de
la mise en place de nombreux radars fixes sur les routes et la sévérité des
sanctions est toujours beaucoup plus importante dans les pays du nord de
l'Europe que dans les pays du sud. La France occupe maintenant une position
intermédiaire. Il ne faut pas utiliser le fait que tous les pays
industrialisés améliorent régulièrement leur sécurité routière sur le long
terme, sous l’effet de l’amélioration des véhicules et de l’infrastructure,
pour nier l’importance considérable des variations à court terme provoquées
par des modifications de comportements.
Ce nouveau désaccord entre Gérard Petitjean et Airy Routier sur la
chronologie des événements de la fin 2002 et de début 2003 est très
important. Airy Routier conteste que la baisse de la mortalité en France se
soit faite brutalement en décembre 2002 avec 30% de réduction de la
mortalité d'un mois sur l'autre, ce qui est très différent de ce qui s'est
passé dans les autres pays européens où la baisse de la mortalité se fait
sur une période longue et avec une intensité moindre. L’affirmation que cela
ne s'est pas fait d'un mois sur l'autre et que cela à "remonté derrière" est
inexacte. Il suffit de regarder le graphique ci-dessous pour le constater.
Il exprime la diminution ou l’accroissement de la mortalité de chaque mois
par comparaison avec le mois équivalent de l'année précédente. La situation
était stable ou en légère dégradation au cours du premier semestre 2002 (les
barres de l'histogramme sont au dessus de l'axe zéro qui marque l'absence de
gain ou de perte de vies humaines par rapport au mois équivalent de l’année
précédente). Une fois annoncée l'absence d'amnistie, puis la "priorité
présidentielle" accordée à ce chantier, la situation s'inverse tous
les mois. L’amélioration demeure cependant faible ou modérée pendant l'été
et l'automne. Brutalement la régression devient très forte à partir des
décisions du comité interministériel de sécurité routière de décembre 2002
et il n'y a pas de remontée dans les mois suivants. Cinq mois de suite, une
régression de la mortalité de plus de 25% sera observée. Ensuite la
régression persiste mais elle est plus faible car elle s'effectue par
rapport à des mois du second semestre 2002 qui étaient djé en nette
amélioration par rapport à 2001. Le bilan est indiscutable, la mortalité
passe de 7242 tués en 2002 à 5731 en 2003. Aucun pays n'a eu un tel succès
dans une période aussi courte, nier qu'il s'agit d'une prévention par la
seule crainte de sanctions rendues crédibles par la circulaire de décembre
2002 (suppression des indulgences) et l'ensemble des décisions annoncées ce
mois là et mises en oeuvre au cours de l'année 2003 est une affirmation qui
ne correspond pas à la chronologie des faits.
Quand Airy Routier nous explique que le problème actuel est posé "par les
piétons et les deux roues", il associe des problèmes importants mais très
différents.
Le fait que le trafic des deux roues augmente dans toutes les villes où les
temps de circulation s’accroissent du fait de la saturation de la voirie a
un rôle important dans l’évolution du risque accidentel du fait de la très
faible sécurité secondaire de ce moyen de transport et du peu de respect des
règles par les utilisateurs, notamment des limites de vitesse. Ce fait a été
rappelé par Gérard Petitjean, mais comme il met en cause la vitesse, il ne
fait pas l'affaire d'Airy Routier.
Sur le problème des pitons, Airy Routier produit une tirade élogieuse sur
les solutions anglaises de bonne signalisation des passages pour piétons.
Cet éloge de la situation britannique n’est pas fondé. Ce sont les Pays-Bas
qu’il fallait prendre comme référence de pays de faible mortalité. La
mortalité des piétons en Grande Bretagne est identique à celle observée en
France. C'est un des grands sujets d'étonnement des accidentologistes et une
étude comparative des deux pays, faite par des spécialistes de la
modélisation de l'insécurité routière avait expliqué la quasi-totalité de la
différence de mortalité sur les routes par les accidents de quatre roues
hors agglomération, du fait d'un meilleur respect des limites de vitesse et
des seuils légaux d'alcoolémie en Grande Bretagne (Robert Delorme, Sylvain
Lassare - rapport INRETS n°261).
DtuespietonsGBpaysbas.pdf
Quand le problème de la remontée récente (minime) de la mortalité routière
au début de l’année 2007est abordé, Airy Routier dit que la remontée n'est
intervenue qu'en janvier et que "sur trois mois elle a baissé", c'est faux.
Comparée aux mois équivalents de l'année précédente, la mortalité avait
baissé pendant les 11 premiers mois de 2006, elle s'est accrue de 21 tués en
décembre 2006, de 48 en janvier et de 12 en février, donc sur les trois
derniers mois connus au moment de cette vidéo, il y a une augmentation.
Conclusions
L’analyse d’une telle vidéo est encore plus immédiatement démonstrative que
celle d’un livre de 245 pages qu’il faut lire attentivement pour établir
toutes les contradictions, les erreurs de raisonnement et le déni de la
réalité. En 8 minutes, nous avons la preuve de l’aptitude d’Airy Routier à
utiliser des affirmations fausses pour déstabiliser ses contradicteurs.
Evoquer la "bêtise par rapport à la réalité des faits" pour dénigrer ceux
qui ne pensent pas comme lui fait partie de ces affirmations destinées à
dévaloriser ceux qui n’adhèrent pas à sa réinterprétation de la réalité. Le
plus surprenant de cette vidéo est que ce n’est pas avec des défenseurs
institutionnels ou associatifs de la sécurité routière qu’il utilise ce
genre de procédé contraire à l’éthique du journaliste, c’est avec ses
propres collègues du Nouvel Observateur. Tous les aspects manipulateurs de
cette vidéo n’ont pas été décrits, notamment ses commentaires sur les radars
automatiques. Affirmer qu’ils transforment les flics en robots est un bon
exemple de phrase inexacte et péjorative utilisée à la place de « faciliter
le travail des policiers et des gendarmes en automatisant des tâches qui ne
nécessitent pas une intervention humaine ». Quand les poinçonneurs du métro
ont été remplacés par des automates, personne n’a dit qu’ils avaient été
« transformés » en robots. Quand l’industrie automobile a remplacé certains
travaux répétitifs et pénibles sur les chaînes de montage, elle a mis en
place des robots, les ouvriers se consacrant à des tâches d’assemblage et de
mise en œuvre de ces robots. Dans le domaine des actions humaines, remplacer
est un progrès quand une tâche de mesure ou de contrôle peut être faite par
un automate, l’exploitation des résultats relevant ensuite d’une procédure
comportant des recours « humains ».
Témoignage de Gérard Petitjean concernant cette vidéo et son analyse
Je soussigné Gérard Petitjean, atteste mon plein accord avec l’analyse faite
par le Professeur Claude Got de la vidéo du débat auquel j’ai participé le
27 mars 2007, mise sur le site du journal le Nouvel Observateur et
retranscrite dans le document ci-dessus.
Gérard Petitjean