Plan gouvernemental de sécurité routière
propositions de Claude Got - 12 décembre 2002
Lors de la réunion du 17 septembre 2002, la possibilité de faire des propositions au gouvernement a été annoncée, et un formulaire a été publié sur le site internet du ministère de l'Equipement. Les propositions suivantes utilisent ce formulaire.
Remarques
Si l’action à long terme peut intégrer la formation, l’éducation, les modifications de l’infrastructure et des véhicules, le succès à court et moyen terme sera conditionné par le respect de la réglementation. Il dépendra de la volonté gouvernementale de faire appliquer le code de la route avec équité et détermination, en réformant le système de contrôle et de sanctions et en lui donnant les moyens de traiter une transgression massive des règles.
Le succès va donc dépendre d’une accumulation de mesures complémentaires, chacune traitant un aspect du problème. Si chaque mesure est considérée comme importante, avec une recherche exigeante de la qualité de sa mise en oeuvre, les résultats escomptés seront obtenus, car nous sommes confrontés à des comportements humains, et dans ce domaine les premiers succès assurent la crédibilité d’une action et renforcent ses effets.
Le succès comme l’échec se décidera dans la gestion des détails. L’automatisation du système de contrôle ne sera effectif que dans plusieurs années. La première difficulté pour le Gouvernement est de décider et de mettre en œuvre, dès le CISR de décembre, un ensemble de mesures immédiatement opérationnelles.
Mes 30 propositions sont les suivantes :
- Organisation et actions générales
- Constituer une véritable délégation interministérielle à la sécurité routière, replacée auprès du Premier ministre, et appuyée sur une Agence française de Sécurité Routière (proposition 1),
- Organiser et présenter avec méthode le plan d’action gouvernemental (p.2),
- Organiser le plan gouvernemental suivant quatre axes (p.3),
- Créer une Agence Française de Sécurité Routière (p.4),
- Disposer dans chaque département d’une unité spécialisée de police ou de gendarmerie ne s’occupant que de sécurité routière (p.5),
- Etablir le profil en personnel et en matériel de l’unité départementale de police ou de gendarmerie routière et faire le bilan de l’existant (p.6),
- Etablir un programme d’identification des connaissances et des méthodes nécessaires pour prendre des décisions et évaluer leur action (p.7),
- Abaisser le seuil à partir duquel une vitesse excessive est sanctionnée (p.8),
- Utiliser les tickets de péage sur les autoroutes pour contrôler les excès de vitesse (p.9),
- Déposer auprès de l’agence de Genève des Nations-Unies qui produit les normes des véhicules (WP 29) un projet de norme de limiteur de vitesse pour les voitures légères (p.10),
- Définir une position française au niveau des instances européennes visant à obtenir des décisions contraignantes concernant la limitation de la vitesse de tous les véhicules à la construction (p.11),
- Vérifier la qualité des limitations de vitesse indiquées sur les routes par une expertise de la totalité du réseau routier (p.12),
- Rétablir une taxation annuelle proportionnelle à la puissance, au poids, et à la vitesse maximale (p.13).
- Immatriculer les cyclomoteurs (p.14)
- Organisation et évaluation du dépistage préventif d’une alcoolisation excessive (p.15),
- Programmer l’abandon des éthylotests chimiques insuffisamment sensibles (p.16),
- Evaluation au niveau local de l’absence d’usage d’un système de retenue dans un véhicule pour fonder des actions spécifiques concernant ce risque majeur (p.17),
- Définir une aptitude à la conduite après 65 ans (p.18),
- Interdire à certains usagers l’usage de véhicules inutilement puissants (p.19),
- Créer une infraction spécifique pour sanctionner l’usage du téléphone au volant(p.20)
- Assurer l’identification des risques liés à l’infrastructure par une expertise de l’ensemble du réseau (p.21)
- Organiser le financement des modifications à apporter aux infrastructures pour accroître la sécurité (p.22)
- Réduction des risques liés aux obstacles verticaux (p.23)
- Réalisation d’un guide de bonnes pratiques des aménagements sécuritaires (p.24)
- Améliorations du système de contrôle et de
sanctions
- Organiser et évaluer la « fin des indulgences » (p.25),
- Etendre la notion de responsabilité du propriétaire (p.26),
- Considérer l’amélioration, du fichier des cartes grises et des permis de conduire comme une priorité absolue, commandant l’efficacité de la réforme du système de contrôle et de sanctions (p.27),
- Publier le décret sur l’immobilisation des véhicules dont la carte grise n’est pas en règle (p.28),
- Donner aux municipalités des facilités pour utiliser les contrôles automatisés de la vitesse (p.29),
- Evaluer le coût matériel et humain d’une chaîne automatisée de contrôle automatisé de la vitesse et d’autres infractions pour pouvoir optimiser sa mise en œuvre en envisageant toutes les solutions possibles (p.30).
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1
Constituer une véritable délégation interministérielle à la sécurité routière, replacée auprès du Premier ministre, et appuyée sur une
Agence Française de Sécurité Routière
Enoncé du problème
Quand l’Etat doit assurer la coordination d’un ensemble d’actions relevant de plusieurs ministères, il peut faire le choix de définir un organisme ad hoc qui a une position interministérielle. Le but de la structure créée n’est pas de se substituer aux fonctions des différents ministères, mais d’aider le gouvernement à instruire les problèmes posés en instaurant une concertation entre les ministères concernés et, une fois les décisions prises, de coordonner la mise en œuvre quand elle implique plusieurs ministères.
Les avantages d’une telle structure dédiée sont évidents, elle facilite les arbitrages au niveau du Premier ministre, quand ils sont nécessaires, et améliore la collaboration entre les différents ministères concernés. Les inconvénients sont également connus, un pôle de décision s’ajoute à ceux qui existent, ce qui ne simplifie pas la situation. Les ministères techniques qui défendent leurs territoires respectifs, leurs prérogatives et leurs politiques, ne seront pas toujours ouverts à une concertation interministérielle qui implique un minimum d’acceptation de la notion de collaboration entre services de ministères différents. Si le responsable de la structure concernée apparaît comme un simple arbitre de conflits « territoriaux » ou décisionnels, il aura des difficultés pour faire avancer rapidement des dossiers et rendre les décisions effectives. Si à l’opposé il apparaît comme le représentant du Premier ministre, soutenu par ce dernier, et décidé à placer chaque dossier à la hauteur de la priorité politique annoncée, il sera efficace.
A un niveau plus élevé il est possible de charger un ministre ou un secrétaire d’Etat de la sécurité routière. Cela ne semble pas excessif pour traiter la première cause de mortalité des jeunes adultes en France. La mesure a été proposée dans le rapport récent sur les « gisements de sécurité routière ». Avec logique, ce rapport envisage un ministre « plein » directement rattaché à Matignon et non un secrétariat d’Etat rattaché au ministère de l’équipement, ce qui semble rationnel puisque ce rattachement supprimerait en pratique la fonction interministérielle. Cependant cette solution ne me semble pas la meilleure car la sécurité routière dépend trop étroitement de l’équipement, de l’intérieur et de la justice pour prendre le risque d’ajouter un échelon supplémentaire au niveau ministériel qui aura inévitablement des difficultés à agir par l’intermédiaire des ministères techniques, les conflits me paraissent inévitables avec cette solution. Une délégation interministérielle très soutenue par le Premier ministre me semble plus opérationnelle.
Il y a une relation étroite entre le niveau de priorité accordé par le Gouvernement à un problème et l’organisation de la prise de décisions concernant le concernant. S’il est prioritaire, la solution la plus opérationnelle est de rattacher directement l’organisme interministériel aux services du Premier ministre, pour que cette position indique :
l’indépendance vis-à-vis des ministères techniques concernés,
l’importance accordée au problème au niveau gouvernemental.
Quand une structure correspond à une fonction qui perdu son caractère prioritaire, la solution a toujours consisté à faire le ménage dans les structures rattachées à Matignon en faisant glisser la structure interministérielle vers le ministère technique le plus concerné par le problème. De multiples exemples permettent d’illustrer cet aspect important de l’adaptation de la mécanique gouvernementale à la gestion d’un problème. Quand Pierre Mendès France a voulu créer une structure auprès de ses services pour l’aider à développer une politique de lutte contre l’alcoolisme, il a créé le Haut Comité d’Etudes et d’Information sur l’alcoolisme, lui a donné des pouvoirs de conseil mais également de gestion, et a nommé le Pr Robert Debré à sa tête. En agissant ainsi il se dotait d’un outil et d’un pouvoir, tout en indiquant une priorité. Le transfert de la structure au ministère de la santé en 1987, puis sa disparition, marquaient une forme de désintérêt pour la gestion politique de l’alcoolisme en France.
L’évolution de la délégation interministérielle à la sécurité routière a été de même nature. Elle a été créée dans un moment de préoccupation nationale faisant apparaître le problème comme une urgence au début des années 70. L’évolution catastrophique de la mortalité routière qui a culminé en 1972 avec environ 18000 morts avait provoqué une concertation interministérielle très large pilotée à partir de Matignon à l’initiative de Jacques Chaban Delmas. Sa conclusion fut la nécessité d’agir au niveau interministériel avec un outil adapté. La délégation ministérielle a été alors créée et elle était directement rattachée aux services du Premier ministre, dans des locaux qui lui étaient propres. Cette situation permettait d’agir avec des circuits très courts, et il est évident pour tous ceux qui ont vécu la première rupture dans la politique de sécurité routière à la fin du printemps 73 (port obligatoire de la ceinture et limitations de vitesse) que ces décisions prises par Pierre Messmer ne l’auraient pas été si la délégation interministérielle n’avait pas associé l’indépendance et la proximité du pouvoir d’arbitrage. Quand la gauche a placé la délégation interministérielle auprès du ministre de l’équipement avec une fusion du poste de délégué interministériel et de celui de directeur de la sécurité routière (1983), il était évident qu’une page était tournée et que la sécurité routière était rentrée dans le rang, ce n’était plus une priorité gouvernementale. La décision était une négation de la notion de structure interministérielle qui implique de ne pas être intégré à un ministère, quelle que soit son importance dans le traitement du problème.
Objectif de la proposition
Replacer la délégation interministérielle auprès des services du Premier ministre, maintenir la direction de la sécurité routière du ministère de l’équipement, créer une direction de la gendarmerie et de la police routière au ministère de l’intérieur, élever la capacité de gestion des multiples problèmes judiciaires au niveau de la chancellerie en créant une sous direction spécifique au sein de la direction des affaires criminelles et des grâces, enfin doter la délégation d’une Agence Française de Sécurité Routière, calquée sur le modèle de l’AFSSA et de l’AFSSSAPS, ce qui lui permettrait d’avoir un outil d’expertise, de connaissance et d’évaluation « transversal » indispensable pour organiser et piloter l’action (voir proposition : créer une Agence Française de Sécurité Routière).
Avantages et gains attendus
La lutte contre l’insécurité routière fait partie des priorités annoncées par le président de la République le 14 juillet 2002. Si ce chantier complexe, très interministériel, doit être dirigé avec constance, rapidité et fermeté, il doit l’être depuis Matignon. Cette situation est d’autant plus importante que les modifications dans la direction des forces de l’ordre ont accru les pouvoirs du ministre de l’intérieur, ce qui était indispensable pour conduire le développement d’une politique cohérente dans la mise en œuvre du système de contrôle et de sanction sur les routes comme ailleurs. Ce dernier aspect de la politique de sécurité routière est clairement étranger à la direction de la sécurité routière du ministère de l’équipement. La coordination justice-forces de l’ordre agissant sur le terrain doit être assurée au niveau de la structure interministérielle et le problème est si important qu’une direction du ministère de l’intérieur doit être consacrée à la première cause de mortalité par violence en France. Cette direction aurait en charge les unités départementales de police ou de gendarmerie spécialisée dans l’action de sécurité routière, et la participation à cette politique des formations non spécialis�es (commissariats, unités de CRS et unités de gendarmeries). La structure interministérielle replacée auprès du Premier ministre aurait ainsi comme partenaires principaux les deux directions ad-hoc des deux ministères techniques les plus concernés, l’un ayant en main le problème des routes et celui des véhicules, l’autre celui du contrôle, le troisième pôle étant la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Le risque de surcharger les services du Premier ministre d’une nouvelle structure n’est pas un argument sérieux. Il faut adapter les structures aux priorités politiques. Si la sécurité routière est une priorité du président de la République et du Premier ministre, il faut savoir faire le ménage à Matignon, déplacer quelques structures qui ont fait leur temps, trouver des locaux et installer une équipe solide et motivée, disposant de la confiance du Premier ministre. Cette solution est la seule capable de provoquer une évolution rapide du dossier, sans se laisser bloquer par des obstacles techniques artificiels souvent mis en avant pour défendre des territoires réservés.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Cet aspect de l’adaptation des structures gouvernementales à des priorités est peu étudié. Tous les experts et les décideurs qui ont une familiarité avec les mécanismes des choix politiques, et la mise en œuvre des décisions prises, connaissent la lourdeur des circuits politico-administratifs français. Il doit y avoir un lien étroit entre les structures et la volonté d’agir. Si un problème interministériel n’est pas prioritaire il est préférable de le traiter par les procédures habituelles de la concertation interministérielle, suivie éventuellement de l’arbitrage au niveau du Premier ministre, si c’est nécessaire. Si le problème est à la fois interministériel et prioritaire, il faut le faire traiter par une structure interministérielle et cette dernière ne peut être qu’auprès du Premier ministre et totalement indépendante des ministères techniques concernés, chacun de ces ministères agissant dans son champ de compétence, pour appliquer les décisions prises lors des comités interministériels. Pour améliorer la gestion spécifique à chaque ministère, il faut avoir des services suffisamment étoffés. Ce n’est pas le cas actuellement dans les trois ministères concernés, spécialement au niveau de l’intérieur et de la justice. La pénurie de moyens touche à l’indigence, et la création d’une direction à l’intérieur et d’une sous direction à la justice sont indispensables.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Une telle décision doit être prise rapidement. Elle est par nature purement politique, et se situe au niveau du Président de la République et du Premier ministre. Son coût est sans commune mesure avec les résultats attendus.
2
Organiser et présenter avec méthode le plan d’action gouvernemental
Enoncé du problème
Cette proposition peut paraître aller de soi et faire sourire. Cependant l’analyse des projets du précédent gouvernement met en évidence un défaut de méthode qui explique en partie l’échec complet dans la réalisation de l’objectif fixé fin 97 (4000 tués en moins, fin 2002).
La diminution spectaculaire des accidents au cours des derniers mois n’est pas le fait de variations aléatoires. Les trois dernières élections présidentielles ont été suivies d’une amélioration de la situation que l’on peut attribuer à la fin de la période d’espoir d’une amnistie. Celle qui vient de se produire peut être le résultat de ce type d’effet, relayé par l’annonce des priorités présidentielles le 14 juillet dernier, et par la suite donnée à cette annonce par le gouvernement avec la réunion du 17 septembre. Le maintien de cette embellie ne sera assuré que si un plan très structuré maintient au premier plan de l’actualité cet activisme politique. Les modifications à court terme ne peuvent concerner que les comportements, elles seront provoquées à la fois par une prise de conscience de l’importance du risque et par la crédibilité d’une succession d’annonces gouvernementales. Leur rythme doit être déterminé rationnellement par les délais de définition et de mise en œuvre, mais aussi par la volonté de ne jamais laisser le sujet disparaître de l’actualité. La publicité événementielle faite au projet doit être à la hauteur des enjeux de sécurité sanitaire. Quand le porte parole du gouvernement annonce (16 octobre 2002) que « le gouvernement a décidé de mettre fin à toutes les formes d’indulgence en matière d’infraction routières », il serait utile d’avoir des précisions sur la mise en œuvre de cette mesure, souvent annoncée, jamais effective, notamment son calendrier et son évaluation (voir fiche : organiser et évaluer la fin des indulgences).
Il faut donc être capable de définir non seulement des mesures reconnues comme efficaces, applicables et finançables, mais également maîtriser les délais de mise en œuvre en organisant le passage à l’acte. Le non respect des délais envisagés est une des plaies du système administratif français. Il s’explique en grande partie par la dispersion des pouvoirs décisionnels, justifiant de multiples réunions de groupes interministériels qui finissent par produire le résultat escompté, mais avec des délais qui ne sont pas justifiés.
Deux exemples concrets. Le rapport sur « les drogues licites et illicites et la sécurité routière » a été commandé fin 1993. Il était disponible fin 1994. Il a fallu cinq années pour que la loi du 18 juin 1999 définisse l’obligation de la recherche de stupéfiants dans les accidents mortels de la circulation. L’application de cette mesure devait se faire à la fin de l’année 1999 (annonce ministérielle), des textes réglementaires étant nécessaires. Elle est intervenue le 1er octobre 2001. Tous ceux qui ont participé aux réunions destinées à mettre au point les textes réglementaires ont pu constater que les différents intervenants étaient motivés pour aboutir, que leurs remarques, objections et propositions pour rédiger les textes d’application étaient le plus souvent fondées et importantes. Cependant le délai de deux ans n’était pas acceptable, les difficultés rencontrées ne justifiaient pas un tel retard et ses causes ont été avant tout organisationnelles. Autre exemple, l’immatriculation des deux roues à moteur non encore soumis à cette obligation. La décision est annoncée au CISR de 1997 avec un très bon argumentaire. Cinq années plus tard elle n’est toujours pas effective. Il est indispensable que le projet du gouvernement soit programmé et que les délais de mise en œuvre soient réalistes.
Objectif de la proposition
Définir une méthode pour organiser et rendre visible la démarche gouvernementale. Le but est non seulement d’organiser une information permanente des médias et du public aidant à faire comprendre et à accepter les décisions, mais également d’exercer une contrainte sur l’appareil d’Etat pour qu’il réalise dans les délais prévus les décisions prises.
Avantages et gains attendus
Annoncer une décision n’a jamais provoqué sa réalisation, et une annonce qui n’aboutit pas supprime la crédibilité des décideurs. L’opinion du groupe interagit en permanence sur les comportements individuels et dans le domaine de la sécurité routière l’évolution des opinions est une des clés du succès. Les médias joueront d’autant mieux leur rôle de relais qu’une information concrète et actualisée sera mise à leur disposition et donnera, mois après mois, une crédibilité à la volonté d’agir du gouvernement. Une bonne organisation contraint à faire ce que l’on a annoncé, c’est la façon la plus simple d’éviter les velléités brouillonnes qui font passer l’intention d’agir rapidement et l’effet d’annonce avant la qualité de la gestion. Le gain attendu est immense, faire que la décision soit effective, efficace et efficiente dans les délais escomptés.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en oeuvre
L’Etat et son administration ne sont pas familiarisés avec la transparence et les obligations de résultats. L’opposition traditionnelle entre une culture d’entreprise et une culture administrative n’est pas simplement une idée reçue. L’obligation de résultats est vitale pour une entreprise confrontée à des réalités économiques qui peuvent la mettre en péril à court terme. Cette contrainte n’empêche pas de faire des erreurs (Crédit Lyonnais, France Télécom), mais elles sont tôt ou tard sanctionnées par le bilan, et cette rétroaction de la réalité sur les comportements fait partie des règles. Les techniques d’organisation, de planification de la mise en œuvre de décisions, et d’évaluation des résultats, diffusent lentement dans des activités de service public telles que le fonctionnement hospitalier, ou les activités de gestion territoriale (commune, département, région). C’est au niveau de l’administration centrale que ces méthodes pénètrent le plus difficilement, malgré l’affirmation répétée de la nécessité d’utiliser l’évaluation comme un stimulant permanent et un facteur de qualité dans la mise en œuvre d’une décision. La nécessité d’une méthode est encore plus indispensable quand on aborde un sujet aussi vaste et interministériel que l’insécurité routière.
Cette situation est en grande partie liée à notre incapacité de nommer un « coordonnateur de projet », qui s’appuie sur un comité de projet (qui intervient lors de choix décisifs ou en situation de blocage) et sur un comité de pilotage (qui suit le déroulement de la préparation et de la mise en œuvre). Ce coordonnateur gère une décision et une seule, depuis le stade de sa mise au point jusqu’à l’effectivité de sa mise en œuvre. Si la responsabilité est diluée et placée à des niveaux hiérarchiques trop élevés, les freins de calendrier et d’abus de position dominante vont inéluctablement faire passer les mois puis les années, démobiliser les acteurs et finalement décrédibiliser la mesure. Les entreprises savent utiliser et parfois abusent des logiciels de planification des tâches. L’administration ne semble pas capable de les utiliser, comme s’il était normal de travailler pendant deux ans sur la réhabilitation du tunnel du Mont-Blanc sans se préoccuper dès le début des travaux de l’homologation des systèmes de surveillance numérique automatisés de la vitesse, indispensables dans un tel environnement si l’on souhaite faire respecter les règles ! L’ensemble des pré-requis et des tâches à accomplir jusqu’à l’effectivité d’une mesure doit être planifié par un responsable. Son calendrier prévisionnel doit être à la disposition de tous les co-acteurs et chaque risque de blocage doit être envisagé et traité préventivement.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
La littérature sur l’organisation et l’évaluation est surabondante. Le problème n’est pas d’avoir de nouvelles idées, mais de mettre en œuvre de façon simple et efficace ce que ces travaux nous ont fait comprendre. Il existe des capacités dans ce domaine au niveau de l’Etat, notamment au niveau du commissariat au plan, ce dernier pourrait jouer un rôle dans l’élaboration et le suivi du plan gouvernemental de lutte contre l’insécurité routière, en se limitant à un apport méthodologique simple et opérationnel.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Une méthodologie commune doit être définie pour toutes les décisions relevant du programme gouvernemental de sécurité routière. Un responsable du projet concerné doit être désigné, il gère le calendrier de son élaboration, et de sa programmation. Il doit avoir le pouvoir d’évoquer les difficultés qui peuvent retarder ou bloquer la décision à un niveau suffisamment élevé pour assurer le respect des engagements pris. Ce point très important est mieux pris en compte au niveau de l’Etat depuis le décret 2000-449 du 23 mai 2000 relatif aux directeurs de projet destinés à « animer la conduite d’un ou de plusieurs projets et de coordonner à cette fin l’action des services intéressés ». Toutes les décisions relevant d’un plan de sécurité routière ne relèvent pas de la nomination d’un directeur de projet mais chacune d’entre elles doit avoir un pilote désigné qui soit capable à tout moment de dire où en est le projet et éventuellement ce qui le met en péril.
L’état d’avancement de tous les projets doit être accessible avec une méthode informatisée de gestion de projet qui aurait l’avantage de rendre visibles et donc insupportables les lenteurs et les insuffisances des acteurs concernés.
Le coût financier sera nul, il s’agit uniquement d’une contrainte méthodologique. Il est inutile de faire appel à des spécialistes extérieurs. Les partenaires sont ceux qui ont à gérer l’interministériel et « l’intraministériel » dans le domaine concerné. Aucun texte réglementaire n’est nécessaire depuis la parution du décret précité, mais un document écrit doit fixer la méthode utilisée.
Les points importants de l’organisation de cette mesure seraient :
un calendrier prévisionnel réaliste tenant compte des dysfonctionnements actuels, ces derniers ne pouvant tous se corriger en un jour,
une description approfondie des mesures, avec des dossiers de justification détaillant les objectifs et les moyens mis en œuvre, ainsi que la durée prévue pour leur mise en œuvre effective,
une évaluation de la situation de départ et de son évolution par des indicateurs pertinents, capable de développer le soutien et l’adhésion des usagers en leur prouvant que l’action gouvernementale est crédible, déterminée et organisée. Ces indicateurs seraient à la fois locaux et nationaux.
une visibilité permanente, accessible librement sur un site internet dédié au plan gouvernemental, avec une mise à jour semaine après semaine de l’état d’avancement de la mesure, s’insérant dans le calendrier prévisionnel. Le coordonnateur de cette mesure aurait la responsabilité de la partie du site concernant son champ d’action. La visibilité d’une procédure est un facteur de qualité d’une puissance reconnue.
3
Organiser le plan gouvernemental suivant quatre axes
Enoncé du problème
La présentation des décisions à la sortie du prochain comité interministériel de sécurité routière va avoir un rôle important dans la prolongation des effets de l’annonce présidentielle du 14 juillet, et de la réunion gouvernementale du 17 septembre. La forme et le fond de l’action gouvernementale doivent être coordonnées pour se compléter dans un domaine où la compréhension des décisions, leur crédibilité et leur pertinence renforcent l’efficacité attendue. La méthode de travail et de relation avec les médias, donc avec le public sera particulièrement importante, elle est l’objet d’une fiche de proposition « organiser et présenter avec méthode le plan d’action gouvernemental » qui propose d’assurer une personnalisation du pilotage de chaque action, et d’assurer une publicité permanente de l’état du traitement de chaque problème). Les mesures annoncées devront être présentées en tenant compte du calendrier des mesures adoptées et de leur nature (législative, réglementaire, administratives etc.) et en distinguant au maximum trois ou quatre axes principaux pour éviter un catalogue privilégiant la quantité aux dépens de la compréhension des choix importants.
Objectif de la propositionProposer une liste de projets classés en tenant compte de leur nature et de leur état d’avancement dans un processus décisionnel (décidé et programmé, décidé et en cours de programmation, à l’étude). Ce n’est pas en annonçant un objectif de réduction du risque de 50% en cinq ans que l’on assure sa crédibilité, c’est en annonçant par exemple le début de la période d’immatriculation des cyclomoteurs le 1er mai 2003 et en tenant la date annoncée. Le plan proposé consiste à distinguer trois axes indiquant une détermination programmée, par opposition à une velléité sans support réaliste :
- Le rétablissement de l’équité et du droit (fin des indulgences, fixation d’un barème publié des seuils de tolérance sur les vitesses). Ces mesures ne doivent pas seulement être annoncées mais organisées et évaluées.
- Une réforme des structures et de
leur fonctionnement pour mieux assurer l’effectivité des décisions et le
traitement d’une délinquance de masse :
- Par des mesures organisationnelles, (replacer la délégation interministérielle auprès du Premier ministre, généralisation des unités spécialisées départementales de police et de gendarmerie routières, mise en œuvre d’une méthode d’identification des besoins de connaissances, de gestion et d’évaluation),
- Par des mesures législatives, (créer une Agence française de sécurité routière, simplifier la procédure de sanction, utiliser les mesures de vitesses moyennes pour constater un excès de vitesse, réorganiser les fichiers des cartes grises et des permis de conduire, restreindre l’accès aux véhicules inutilement puissants de certains usagers etc.),
- Des initiatives au niveau de l’Union Européenne et de l’Agence des Nations-Unies qui gère la normalisation des véhicules.
Avantages et gains attendus
La réussite du plan gouvernemental sera conditionné par la capacité des décideurs politiques à présenter des mesures crédibles, puis à les rendre effectives dans les délais annoncés. La qualité de la mise en œuvre des premières mesures facilitera l’acceptation des suivantes. Tenir des délais est une capacité qui fait la réputation d’une entreprise, elle peut également faire celle d’une politique de sécurité routière. C’est un problème de méthode. Pour qu’elle soit un succès il faut l’appliquer à des décisions perçues comme importantes et comprises par les usagers, transformées en priorités assumées et programmées par des décideurs qui ne se contentent pas d’annoncer leurs décisions. Le gain est simple, il s’agit d’initier le développement, mois après mois, d’un processus continu, dans un domaine où la réussite contribue à accentuer le succès du fait de l’implication majeure du comportement des usagers dans l’insécurité routière.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Savoir associer les annonces programmées de décisions adoptées, et la poursuite d’une recherche de nouvelles décisions qui ne sont pas encore au stade de l’annonce, n’est pas une habitude des décideurs. Elle impose de savoir remettre à plus tard une annonce si l’on n’est pas assuré de pouvoir la mettre en œuvre, et c’est beaucoup plus difficile que d’annoncer une mesure que l’on renoncera finalement à appliquer.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Le comité interministériel de 1997 a programmé l’échec du gouvernement précédent. L’objectif « ambitieux » d’une réduction de 4000 du nombre des tués pour la fin de 2002, a occulté le contenu des décisions annoncées, qui par ailleurs n’étaient pas définies avec une précision suffisante, notamment quand aux délais et aux moyens nécessaires à leur mise en œuvre. Il faut relire le compte rendu de ce CISR du 27 novembre 1997 pour éviter de répéter ce genre d’erreur.
Une fois annoncé l’objectif et l’avoir fondé sur quelques phrases de motivations importantes mais symboliques il n’y avait que quatre décisions concrètes dans les conclusions de ce CISR :
l’une, mineure, ne sera jamais appliquée : l’immatriculation des cyclomoteurs,
la lutte contre la vitesse, bien décrite comme un objectif majeur, se traduit par une erreur décisionnelle, la création d’une contravention de 5ème classe pour les excès de plus de 50 km/h et d’un délit en cas de récidive. Cette décision législative n’interviendra qu’en juin 1999 et compte tenu du faible niveau de la surveillance de la vitesse en France, la mesure se révèlera peu dissuasive, elle aura même des effets pervers en attirant l’attention sur les grands excès de vitesse, alors que le véritable problème est de faire respecter toutes les limites de vitesse avec une faible tolérance,
- repérer les toxiques dans les accidents mortels était la mise en œuvre d’une recommandation faite en 1995 par une commission qui avait rédigé le livre blanc sur les drogues et la sécurité routière. La mesure sera inscrite dans la loi de juin 1999 et opérationnelle en octobre 2001. Ce délai, et l’objectif même, qui était dans un premier temps de mieux connaître le rôle des stupéfiants dans les accidents, ne pouvait avoir d’effet sensible entre 1997 et 2002,
- la seule mesure susceptible d’influer sur l’insécurité routière était l’affirmation de la nécessité de simplifier le système de contrôle et de sanctions, mais les mesures concrètes annoncées (suppression des commissions administratives de retrait de permis de conduire et extension des pouvoirs de suspension du permis par le préfet dans des circonstances très particulières et limitées) ne pouvaient en aucun cas faire évoluer l’insécurité routière dans les proportions envisagées.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Le schéma de l’annonce d’une telle programmation (intégrant la procédure initiée ces six derniers mois) pourrait être la suivante :
Dans le cadre général de la sécurité, et plus spécifiquement dans celui de la sécurité sanitaire prise dans son sens le plus large de protection de la santé, améliorer la sécurité routière est une priorité. Il s’agit de la première cause de mort des jeunes adultes en France. Il s’agit d’un choix présidentiel annoncé le 14 juillet 2002, prolongeant l’annonce faite avant les élections d’une suppression de l’amnistie des fautes de conduite, confirmée par le vote d’une loi d’amnistie correspondant à cet engagement de Jacques Chirac.
Le 17 septembre 2002, les ministres concernés par cette priorité dans l’action gouvernementale ont écouté des associations, des partenaires d’origines très diverses, des experts. Le site du ministère de l’équipement a ouvert une consultation très large permettant de réunir des propositions. Il sera l’amorce d’un site dédié spécifiquement au programme gouvernemental, qui permettra à tous les citoyens de suivre son élaboration et sa mise en œuvre, semaine après semaine.
Dès la tenue du premier comité interministériel de sécurité routière, les décisions seront décrites, justifiées, programmées et évaluées. Le plan de cette démarche initiale pourrait être le suivant :
Annonces effectives dans un délai de trois mois :
interdiction générale de la poursuite des pratiques qualifiées d’indulgence, c’est à dire des passe-droits qui réduisent la crédibilité de la réglementation. Cette annonce a été faite par le porte parole du gouvernement le 16 octobre. Une procédure d’évaluation au niveau départemental du respect de cette instruction sera définie. Cette décision sera l’objet d’une instruction du Premier ministre définissant ses modalités (voir fiche de proposition : assurer l’équité en supprimant les décisions d’interrompre une procédure de sanction en dehors des filières normales),
fixation, comme dans d’autres pays où l’insécurité routière est plus réduite que celle observée en France, d’un seuil à partir duquel les vitesses réelles mesurées par les cinémomètres seront sanctionnées (voir fiche : abaisser le seuil à partir duquel une vitesse excessive est sanctionnée). Cette mesure est destinée à redonner un sens aux limites de vitesse dans les contrôles avec interception et à assurer la cohérence avec la mise en œuvre des systèmes de contrôle automatisés,
décision de créer dans chaque département une unité spécialisée de police ou de gendarmerie, agissant en complément des unités locales, et permettant le développement tant de l’équipement que des pratiques spécialisées. Cette spécialisation a déjà été entreprise dans certains départements, mais elle est insuffisante et surtout la coexistence de zones « police » et de zone « gendarmerie » ne facilite pas l’unité de commandement et la définition de plans de contrôles départementaux. Ces unités seront dirigées par le responsable d’une nouvelle direction du ministère de l’intérieur (voir fiche : disposer dans chaque département d’une unité spécialisée de police ou de gendarmerie ne s’occupant que de sécurité routière,
définition des besoins de connaissances pour évaluer les actions de sécurité routière au niveau local et développer les outils de l’évaluation de la politique gouvernementale au niveau national (voir fiche : établir un programme d’identification des connaissances et des méthodes nécessaires pour prendre des décisions et évaluer leur action).
Annonces effectives après le vote par le Parlement d’une loi de sécurité routière et mise à niveau des textes réglementaires :
création d’une Agence Française de Sécurité Routière (voir fiche) destinée à coordonner l’acquisition des connaissances et des savoir faire nécessaires à la politique de sécurité routière, notamment à la formation des acteurs (policiers, gendarmes, magistrats, moniteurs d’auto-école et personnels de l’éduction nationale). Il intégrera l’observatoire interministériel de sécurité routière, favorisera le développement des matériels et des méthodes destinées à la sécurité routière, assurera l’évaluation de la politique publique dans ce domaine,
adoption d’un texte législatif permettant de mesurer une vitesse moyenne sur un segment de voie et de fonder une contravention ou un délit d’excès de vitesse sur cette mesure (voir fiche : utiliser les tickets de péage sur les autoroutes pour contrôler les excès de vitesse), annoncer ensuite l’usage de ce moyen pour contrôler les vitesses sur les autoroutes à péage ou sur d’autres voies,
simplification des procédures pour rendre plus rapide, plus constant dans ses résultats et donc plus équitable le système de contrôle et de sanctions,
élaboration de textes réglementaires permettant d’assurer la fiabilité des fichiers des permis de conduire et des fichiers des cartes grises. Permettre aux assureurs d’accéder à ces fichiers en contribuant à vérifier leur exactitude et exploiter les données du permis à points pour établir le montant des primes (voir fiche : améliorer le fichier des cartes grises et des permis de conduire),
interdire à certains usagers l’usage de véhicules inutilement puissants. La documentation du risque accidentologique prouve qu’un pays comme le nôtre avec un réseau secondaire très développé, gros consommateur d’alcool et avec un système de contrôle et de sanctions peu efficace, est particulièrement exposé au risque lié à la mise en circulation de véhicules inutilement rapides et puissants. La neutralisation de ces véhicules dangereux au niveau européen demandera plusieurs années. Il convient sans attendre de limiter leur nocivité en interdisant leur conduite aux deux groupes particulièrement exposés, d’une part les conducteurs qui n’ont pas encore acquis d’expérience, d’autre part aux conducteurs qui associent des antécédents d’accidents (malus) et des antécédents d’infractions aux règles, se traduisant par des retraits de points de leur permis (confère fiche : interdire à certains usagers l’usage de véhicules inutilement puissants).
Annonce d’une initiative française au niveau européen et au niveau des organismes de normalisation des véhicules (agence des nations unies de Genève) :
- expression lors du prochain conseil des ministres des transports d’une position française sur la nécessité d’organiser le respect des règles concernant la vitesse des véhicules, leur puissance, leur compatibilité, par une position commune de l’Europe assurant l’interruption de la course au poids et à la puissance qui est en contradiction complète avec les exigences de sécurité et de respect de l’environnement. En cas de refus ou de traitement dilatoire de cette demande, la France se proposerait de prendre des dispositions unilatérales dans le cadre des possibilités des traités concernant les exigences de la sécurité sanitaire.
- dépôt dans un délai de trois mois par la France auprès du WP 29 à Genève du cahier des charges d’un limiteur intelligent de la vitesse s’inspirant des expériences déjà conduites dans plusieurs pays (asservissement de la vitesse maximale possible à un endroit donné à la vitesse maximale autorisée)et évolution de la norme sur les régulateurs de vitesse qui vient d’être mise au point par le WP29 en la complétant par un dispositif limitant la vitesse maximale à 135 km/h.
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Créer une Agence Française de Sécurité Routière
Enoncé du problème
Une activité aussi interministérielle que la sécurité routière exige :
- la coordination de l’action gouvernementale au niveau interministériel,
- une collaboration étroite entre les ministres et les services techniques des ministères concernés qui doivent développer et exercer leur pleine compétence dans leurs domaines d’action spécifiques,
- une Agence capable d’instruire, de piloter et d’évaluer des actions décidées au niveau interministériel et qui ne concernent pas une mais plusieurs structures administratives. Elle doit également contribuer à la formation des acteurs de terrain (juges, policier, gendarmes, moniteurs d’auto-école) dans le cadre de leurs établissements formateurs spécifiques. Cette agence fait actuellement défaut.
Objectif de la proposition
Créer une Agence Française de Sécurité Routière, sur le modèle des grandes agences de sécurité sanitaire (AFSA, AFSSPS), permettant de développer et de coordonner toutes les actions de sécurité routière se situant à un niveau interministériel. Il comporterait plusieurs services.
Un service des techniques de la sécurité routière. Cette fonction est particulièrement importantes dans le cadre d’une action interministérielle, notamment pour présenter la position de la France et en débattre dans les organismes internationaux assurant la normalisation. Situer ce rôle au niveau des services techniques d’un ministère ne peut que retarder le développement et la mise en œuvre de solutions efficaces, voire les faire rejeter en privilégiant par exemple des objectifs industriels à court terme aux dépens des objectifs de sécurité routière. Ce service contribuerait à définir et éventuellement à faciliter le développement de technologies nouvelles, notamment :
Les nouveaux systèmes de contrôle de la vitesse, (enregistreurs d’événements, systèmes de contrôle intelligents de la vitesse), pour éviter de prolonger notre retard dans ce domaine,
Les dispositifs de contrôle de l’alcoolémie (éthylotests électroniques, dispositifs antidémarrage),
Les méthodes de dépistage de la conduite sous l’influence de stupéfiants ou de médicaments (rôle d’intermédiaire allant de la définition des besoins interministériels à la relation avec les industriels et les organismes de recherche).
La mise au point des techniques de transmission embarquées permettant le contrôle des plaques d’immatriculation par des caméras numériques, les usages de cartes grises ou de permis de conduire avec des codes barres puis des cartes à puce.
Un service préparant et pilotant la communication, jouant le rôle d’une véritable Agence nationale d’information sur la sécurité routière (terme utilisé dans le rapport sur les gisements de sécurité routière), capable de développer une action beaucoup plus ambitieuse que les rares campagnes nationales actuelles. Elle utiliserait par exemple les indicateurs locaux de sécurité, notamment l’effectivité locale du respect des règles et les résultats des contrôles suivis de sanctions. Elle développerait un discours sur la vitesse, précis et argumenté, (aucune campagne n’a été faite au cours des trente dernières années sur le lien entre la puissance des véhicules et l’accidentalité).
L’observatoire national interministériel de sécurité routière (ONISR), structure qui existe mais dispose de moyens dérisoires pour effectuer ses missions. Il est impossible de fonder une politique de sécurité routière sans suivre au niveau local et national l’évolution de la situation à l’aide d’indicateurs pertinents et fiables. L’évaluation des politiques publiques est une activité spécifique dont le caractère interministériel est évident puisqu’il faut aussi bien évaluer le système de contrôle et de sanctions, que reconnaître les risques liés à l’infrastructure ou aux véhicules, ou analyser l’influence des produits psycho-actifs sur l’insécurité routière. Les organismes de recherche contribuent à établir les connaissances, l’ONISR doit être l’exploitant de ces connaissances et éventuellement le commanditaire de recherches qui lui sont utiles. Avec quatre personnes dans la structure actuelle, nous avons institué l’incapacité d’agir au niveau où il conviendrait de le faire. L’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments qui intervient dans un domaine responsable de moins de 100 morts chaque année a des moyens d’observation et d’analyse des risques sans commune mesure avec ceux mis en œuvre pour lutter contre l’insécurité routière. Il ne s’agit pas de réduire les capacités de l’AFSSA, mais d’assurer une cohérence dans les moyens accordés à la sécurité sous toutes ses formes. Le rôle de l’ONISR doit être étendu à la veille technologique, juridique, statistique à l’échelon international. Notre retard dans certains domaines est directement lié à l’insuffisance de cette veille. L’observatoire doit avoir en charge l’évaluation de la politique de sécurité routière, notamment l’effectivité des mesures décidées et leur efficacité.
Une structure de formation, capable de coordonner les formations spécifiques (des conducteurs, des policiers et des gendarmes, des magistrats) et de participer aux enseignements assurés par les structures qui ont en charge ces formations particulières. Le développement de l’accidentologie ne s’est pas accompagné de celui de la transmission du savoir acquis auprès des professionnels qui auront à agir en fonction de ces connaissances. Les convictions des magistrats, des policiers ou des gendarmes doivent se fonder sur un savoir scientifique et non sur leur auto-expertise de conducteur comme c’est le cas en grande partie actuellement. La formation aux nouvelles solutions techniques développées ou inventoriées par le service des techniques de l’Etablissement ferait partie de cette mission importante de mise à niveau permanente des acteurs de terrain dans un domaine en évolution rapide.
Eventuellement un service financier capable d’acheter du matériels et de financer des actions, hors infrastructures routières. 17 ans après l’homologation des éthylotests électroniques, nous utilisons encore largement les « ballons ». Les véhicules des policiers et des gendarmes travaillant dans des unités spécialisées de sécurité routière sont en nombre insuffisants et inadaptés aux nouvelles techniques qui faciliteraient leurs missions (transmissions, électronique embarquée). Le contrôle automatisé de la vitesse et la gestion des infractions constatées avec cette méthode impose des investissements importants. Ils ne seront pas assurés sans avoir recours à des financement spécifiques. Imaginer que l’on va avoir une efficacité dans le domaine de la sécurité routière uniquement avec des mesures organisationnelles et des textes réglementaires ou législatifs nouveaux, sans consacrer un financement spécifique important à un domaine en pleine évolution technique est une illusion.
Avantages et gains attendus
Assurer le développement des fonctions interministérielles avec des structures appropriées et un financement spécifique, s’ajoutant aux structures ministérielles qui conservent leurs activités particulières.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Les difficultés seront celles provoquées par une mesure qui semble retirer du pouvoir à certaines structures ministérielles en renforçant le poids de l’interministériel. Il faut savoir choisir.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Une fonction doit être assurée par un organisme qui a les moyens de ses missions. Le découpage ministériel traditionnel de l’administration française est un handicap majeur pour la mise en œuvre d’actions interministérielles. La création d’une structure de pure coordination est insuffisante. Il faut des outils adaptés à l’action ou à l’acquisition de connaissances, avec un financement adapté. Quand l’AFSSA a été créée, le pouvoir du ministère de la santé et de celui de l’agriculture n’a pas été amputé, leur capacité d’expertise a été au contraire accrue, un organisme responsable et doté de moyens leur donnant la crédibilité technique et scientifique. La comparaison entre les moyens mis en œuvre pour développer la sécurité alimentaire dans la filière bovine confrontée au problème de l’ESB et ceux consacrés à la sécurité routière sont instructifs. Les rapports entre les enjeux humains sont dans des ordres de grandeur de 1 à 10 000 pour le nombre de vies perdues, les investissements financiers ont été beaucoup plus importants pour traiter le problème le moins grave en termes de sécurité sanitaire.
Un exemple simple pour mettre en évidence la nécessité d’une « technicité interministérielle » : la mesure automatique des vitesses, et de façon plus générale l’utilisation de caméras numériques transmettant des données à des ordinateurs capables de les gérer directement, est une des solutions aux difficultés rencontrées par les forces de l’ordre confrontées à une délinquance de masse. Quand une nouvelle technologie de ce type apparaît, le premier investissement consiste à suivre son développement et à participer à toutes les réunions et congrès qui présentent les résultats et les matériels. Au congrès nord-américain sur la vitesse qui s’est tenu à Québec en juin 2001, il n’y avait pas de représentants des administrations françaises qui ont en charge l’adaptation des matériels et des législations face à des évolutions techniques. Entre les services du ministère de l’industrie, les industriels, les exigences du terrain, les garanties de sécurité, la gestion de l’information, la coordination avec le système de sanction, toute une chaîne incluant du matériel et du logiciel adaptés l’un et l’autre à un cahier des charges établi par les utilisateurs doit être mise en place. Les retards que nous subissons dans cette mise en œuvre de nouvelles techniques sont inhérentes à notre incapacité de gérer rapidement le passage par des réunions interministérielles. Là où un organisme responsable et doté de moyens agirait en un mois ou un an, l’interministériel peut en mettre cinq, parfois dix fois plus, voire même se révéler incapable d’agir.
Un autre exemple important est celui de la formation des magistrats dans le domaine de la sécurité routière. Il est gravement insuffisant alors que les délits routiers représentent fréquemment le quart de l’activité des tribunaux. Une formation accidentologique de base doit être associée à la formation au droit de la route, elle n’est pas assurée actuellement. Un établissement public de sécurité routière permettrait de développer un corps de connaissances reconnues, en collaboration avec les organismes de recherche, l’ENSERR, les structures de formation des policiers, des gendarmes et des juges. Des enseignants spécialisés doivent être capables d’intervenir dans les différents établissements de formation sans interférer avec leur autonomie, mais en assurant une coordination indispensable entre ces formations.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Un tel établissement public doit être créé par voie législative, comme l’AFSSA, l’AFSSAPS et l’INVS. Plusieurs méthodes peuvent être envisagées pour le financer et elles ne s’excluent pas mutuellement. Il peut s’agir de l’affectation d’une partie des amendes sanctionnant des infractions aux règles du code de la route, comme cela à été fait pour les infractions aux règles du stationnement. Même si les affectations de recette ne plaisent pas aux services financiers de l’Etat, il est des moments où l’urgence et la gravité d’une situation imposent une garantie de moyens à la hauteur de enjeux. Si l’on ne souhaite pas affecter des ressources par des mécanismes peu conformes à l’orthodoxie budgétaire,le financement peut être assuré directement par le budget de l’Etat. Il est également possible d’envisager une contribution des assureurs. Il faut avoir à l’esprit le coût pour le Trésor public de la loi d’amnistie de 1995 : 13 milliards de francs. Du fait des décisions du Président de la république, du Gouvernement et du Parlement, l’amnistie de 2002 n’a pas concerné les fautes de conduite. Les sommes ainsi épargnées vont être considérables, d’un montant de plusieurs centaines de millions d’€. Elles pourraient facilement être évaluées, un montant équivalent étant affecté au financement initial de cet établissement public. Dans une démarche programmée et compte tenu du calendrier budgétaire, il serait alors possible, après les décisions prises à la fin de l’année dans le cadre d’un comité interministériel, d’envisager le financement de l’établissement à hauteur du montant des amendes recouvrées du fait de l’absence d’amnistie des fautes de conduite. Le collectif budgétaire de 2002 fixerait ce montant après une évaluation conduite par les services des finances assurant leur recouvrement. Le statut et les fonctions de l’établissement seraient définies dans un texte législatif adopté au cours du premier semestre de 2003.
Si l’on tente d’évaluer les moyens nécessaires pour faire fonctionner un tel établissement, hors achat de matériel destiné à équiper des unités spécialisées, il faut envisager pour chacune des quatre fonctions principales (service chargé des nouvelles techniques, communication, observation et formation) des effectifs de 20 à 30 personnes.
Le statut juridique de l’Agence peut être celui d’un établissement public à caractère administratif, comme l’AFSA ou l’AFFSAPS, son conseil d’administration devrait être composé par des représentants des différents ministères techniques concernés et présidé par le Délégué interministériel à la sécurité routière.
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Disposer dans chaque département d’une unité spécialisée de police ou de gendarmerie ne s’occupant que de sécurité routière
Enoncé du problème
Les unités de police et de gendarmerie implantées au niveau d’une agglomération ou d’un canton, ont un rôle important dans le domaine de la sécurité routière et il ne saurait être question de réserver cette activité à une unité spécialisée. Il est cependant difficile de conduire simultanément :
des actions locales qui exigent des liens étroits avec la population, et notamment ses éléments les plus utiles à la recherche de renseignements, ou les plus représentatifs,
des actions répressives qui font partie de la prévention des risques routiers.
Des unités spécialisées permettent d’associer une indépendance dans l’action à un professionnalisme rendu indispensable par le développement de matériels spécifiques de plus en plus performants qui exigent une formation appropriée. L’avantage d’une force unique au niveau départemental est d’assurer une unité de commandement. Elle est indispensable pour planifier les actions et éviter les contraintes absurdes provoquées par la juxtaposition, et souvent l’intrication, de territoires dépendant d’unités différentes de police ou de gendarmerie. Elle permet d’équiper cette unité avec des matériels performants adaptés aux tâches à assurer.
Objectif de la proposition
Ne pas avoir une attitude de refus a priori d’une telle solution, parce que l’on imagine immédiatement la difficulté de créer des unités mixtes associant des policiers et des gendarmes, ou de créer un corps nouveau avec ses statuts, ses rigidités, et la perspective de longs délais avant que la mise en œuvre ne soit effective. Il est possible d’envisager des unités spécialisées départementales avec des statuts police ou gendarmerie suivant le département, ayant la capacité d’opérer sur l’ensemble des routes du département. Cette dimension dans la zone d’action permettrait de s’appuyer sur une logistique optimisée et de supprimer l’émiettement des moyens entre des unités qui n’atteignent pas la taille critique pour disposer et mettre en œuvre toutes les techniques disponibles actuellement.
Avantages et gains attendus
La spécialisation permet d’assurer une formation de qualité, des investissements en matériel mieux utilisés, une réduction de la pratique des « indulgences » du fait de la moindre « proximité », et surtout une pratique plus homogène au niveau d’un département pour la mise en œuvre de plans de contrôle et de sanctions définis avec les autorités judiciaires et préfectorales. Des liens étroits avec un établissement public de sécurité routière (dont la création est proposée par ailleurs) permettraient de développer une formation continue indispensable pour s’adapter à l’évolution rapide des matériels et des méthodes de contrôle. Ces unités devraient dépendre d’une direction unique de la sécurité routière se situant au niveau du ministère de l’intérieur qui garantirait un usage exclusivement sécurité routière de ces unités spécialisées.
Les avantages de la spécialisation associent un meilleur savoir faire à la disponibilité des moyens adaptés aux missions.
Exemples :
recherche d’alcool et de stupéfiants lors de contrôles aléatoires. Cette mesure implique que des unités spécialisées, avec des personnels formés, des véhicules équipés de toilettes pour permettre un test urinaire, réalisent ces dépistages. Imaginer qu’ils pourraient être pratiqués par des unités spécialisés qui conduiraient à l’hôpital le plus proche les personnes suspectées de conduire sous l’influence de drogues est un non sens organisationnel, produisant une perte de temps considérable pour une efficacité réduite. La pratique des éthylotests dans le cadre de la loi de 1978 et de celle de 1990 a montré que le facteur limitant pour ces contrôles était la nécessité de conduire les personnes positives à un commissariat ou une brigade où l’éthylomètre permettait d’avoir la mesure légalement utilisable pour établir une procédure. L’homologation d’éthylomètres pouvant être embarqués dans des véhicules vient de supprimer cette limitation. Il faut éviter de la reproduire en l’amplifiant pour la recherche de drogues et accepter la spécialisation,
contrôle de vitesse des motocyclistes par des photos prises par l’arrière. Ces contrôles sont actuellement effectués par un nombre réduit d’unités qui ont acquis ce savoir faire. Des départements entiers peuvent ne jamais mettre en œuvre une telle technique faute de compétence. L’excès de vitesse favorisé par l’impunité est un des drames de l’insécurité routière, provoquant la mort de centaines de motocyclistes acteurs et victimes de pertes de contrôles,
usage de véhicules banalisés travaillant dans le flot de circulation et capables de faire des mesures de vitesse dans ces conditions. Il est hors de question d’équiper des unités locales avec de tels véhicules, cela ne serait raisonnable que dans des grandes agglomérations. Avoir un véhicule de ce type au niveau d’un département, confié à une unité spécialisée qui va aussi bien intervenir sur une voie rapide, que sur le réseau secondaire ou en ville, est un investissement raisonnable,
développement des contrôles automatisés avec lecture et traitement en temps réel des informations. Ce type de contrôle aura un développement important dans les prochaines années pour réduire la proportion de contraventions impayées, cet objectif étant une des clés de l’efficience du système de contrôle et de sanctions. Il ne faut pas limiter les contrôles automatiques à ceux de la vitesse par des caméras numériques à poste fixe. La caméra numérique a bien d’autres usages, notamment la vérification en série d’un grand nombre de véhicules qui passent devant une caméra embarquée lisant le numéro de la plaque d’immatriculation avec un ordinateur de bord traitant en temps réel l’information. Une base « d’impayés » constituée au niveau départemental permet d’identifier immédiatement et d’intercepter un véhicule dont le propriétaire a su soit organiser son « invisibilité » pour les services du trésor public par une fausse adresse sur la carte grise, soit laisser traîner une masse de contraventions impayés à des niveaux indiquant la volonté de ne pas régulariser sa situation. L’interception permet alors d’une part de relever les éventuelles infractions concernant les documents du véhicule (absence de mutation de carte grise, fausse adresse) et d’autre part d’obtenir le paiement immédiat des infractions impayées, sous peine d’immobilisation du véhicule.
La crédibilité du système de contrôle et de sanctions conditionne une grande part du succès ou de l’échec à court terme d’une politique de sécurité routière. Un gouvernement qui veut agir avec des moyens adaptés à l’urgence et obtenir des résultats rapides, ne peut se dispenser d’étendre la création actuellement ébauchée d’unités de forces de l’ordre spécialisées, se consacrant uniquement à la sécurité routière, sans être en permanence détournées de leur tâche par d’autres activités qui n’ont aucun rapport avec la sécurité routière.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il y a trois obstacles à la création de telles unités. Le moindre est l’existence de querelles de territoires, elles sont plus importantes vues de Paris que sur le terrain. La seconde est le risque de réduire l’action des unités locales de gendarmerie ou de police. A partir du moment où l’on admet que ces unités spécialisées ajoutent leur action à celle des unités locales de police et de gendarmerie, l’hypothèse d’une démobilisation de ces dernières n’est plus fondée, cela est évident dans les départements où ces unités ont déjà été créées. Le troisième obstacle est la volonté des responsables de la police et de la gendarmerie de conserver une polyvalence des effectifs. Le choix à faire est alors de nature à la fois technique et politique. Techniquement maintenir la situation actuelle est comparable à un système de santé qui n’aurait que des généralistes sans développer la spécialisation. Politiquement, il faut affirmer qu’une tâche aussi importante que la sécurité routière impose d’avoir des personnels qui ne soient pas distraits de leur fonction dès qu’un problème d’actualité mobilise policiers et gendarmes d’unités non spécialisées. La création d’un corps spécifique est une garantie de meilleure prise en compte de la première cause de mortalité violente évitable en France. Rappelons qu’il y a environ 1000 homicides volontaires chaque année et 8000 tués sur les routes.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Les très nombreuses applications sur le terrain de cette notion d’unités spécialisées permet de comprendre que les différentes modalités de réalisation administratives sont accessoires par rapport aux objectifs fixés et aux moyens mis en œuvre. Les formes les plus élaborées de cette notion de spécialisation ont été développées aux Etats-Unis (dans certains Etats, le niveau de spécialisation étant très variable dans cette fédération), et les exemples de la police de Los Angeles ou de la Highway Patrol de Californie mettent en évidence l’intérêt d’un niveau élevé de qualification produit par une formation prolongée et la spécialisation. Les fonctions étant valorisées, elles sont recherchées et se situent à un niveau élevé dans l’attraction qu’elles exercent auprès de ceux qui envisagent une carrière professionnelle dans ce domaine. La situation est très différente en France, les conditions de travail actuelles de ces unités de police ou de gendarmerie spécialisées ne sont pas satisfaisantes. Nous avons besoin d’une véritable politique d’équipement, de formation et de mise en action des unités spécialisées qui provoquerait, chez les personnels concernés et chez les usagers, une modification profonde de la situation. Dans un hôpital comme dans le système de contrôle routier, la présence de spécialistes confirmés, capables de répondre à toutes les situations avec professionnalisme, est une condition de la qualité. Ceux qui ne veulent pas reconnaître cette nécessité ont une vision très courte des enjeux de sécurité routière et de l’évolution des techniques.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
La meilleure solution est celle qui peut être rapidement opérationnelle, car elle n’impose pas la création d’un nouveau statut. Elle consisterait à avoir des unités spécialisées de gendarmes dans les départements à prédominance rurale et de policiers dans les départements à dominance urbaine (notamment les 8 départements de l’Ile de France, le Rhône, les trois départements littoraux de la région PACA, le Nord et éventuellement la Haute Garonne et la Gironde). Pour effectuer ces choix, il faut tenir compte des effectifs de personnels déjà spécialisés dans ces fonctions de police routière et de la fraction des accidents corporels et mortels (cette distinction est importante) observée dans les zones territoriales dépendant actuellement de la police ou de la gendarmerie.
Une fois le choix effectué, la définition des objectifs de moyens en personnel, en matériel, en locaux serait faite. Des formations communes seraient assurées en collaboration avec l’établissement public de sécurité routière qui aurait en charge le développement des matériels, des logiciels et des méthodes d’intervention pour garantir une homogénéité des pratiques indispensable pour qu’elles soient considérées par les usagers comme une référence constante et crédible.
Il est nécessaire de produire des textes donnant à ces unités spécialisées une compétence territoriale sur l’ensemble des voies d’un département. La durée de cette période de réorganisation pourrait être planifiée sur cinq ans, au terme desquels nous disposerions d’une force spécifique de sécurité routière, apte à traiter le problème au niveau d’importance qu’il mérite.
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Etablir le profil en personnel et en matériel de l’unité départementale de police ou de gendarmerie routière et faire le bilan de l’existant
Enoncé du problème
La spécialisation d’une unité de policiers ou de gendarmes se consacrant uniquement à la sécurité routière est déjà entreprise dans de nombreux départements. Leurs moyens sont très variables, allant d’une simple ébauche d’unités spécialisées à de véritables groupements d’une centaine de professionnels relativement bien équipés. Il est indispensable de faire le point sur l’état de ces unités, puis de mettre en œuvre une évaluation de leurs besoins pour programmer leurs évolutions en personnel et en équipement en fonction des besoins ainsi définis.
Objectif de la proposition
Fixer les critères utiles à la définition des effectifs et des matériels destinés aux unités spécialisées de gendarmerie ou de police routière. Ils doivent intégrer les caractéristiques des réseaux (kilométrage, nature des voies, densité de circulation), l’accidentalité observée, la population du département, son étendue, mais aussi des critères liés à l’évolution nécessaire des pratiques. La part des motocyclistes par rapport aux véhicules équipés d’une électronique adaptés aux nouvelles possibilités de contrôle et de transmission doit être précisée, ainsi que la proportion de véhicules banalisés par rapport aux véhicules identifiés. Les matériels utilisés par ces unités doivent être précisés (caméras et radars embarquées, ordinateur de bord avec imprimante, connexion immédiate avec les fichiers des cartes grises et des permis de conduire etc.), éthylotests et éthylomètres, nouvelle génération de radars etc.).
Avantages et gains attendus
Démultiplier l’efficacité des personnels en les dotant de matériels adaptés, en quantité et en qualité. Il faut également tenir compte de l’évolution des recrutements, de nombreuses unités spécialisées ont des postes vacants et ce n’est pas lié uniquement au nombre insuffisant de places dans les centres de formation de policiers et de gendarmes. Il y a indiscutablement une crise des vocations des motocyclistes. Elle peut s’expliquer par les contraintes du métier, ses risques, notamment dans les zones climatiquement les plus « défavorisées » de notre pays, mais aussi par la considération insuffisante accordée à la sécurité routière de façon plus générale. Il faut tenir compte de ces faits et développer une pratique plus importante de l’action à partir de véhicules à quatre roues bien équipés. C’est une évolution qui est évidente dans les pays les plus industrialisés et il convient de l’intégrer à notre politique d’équipement et de recrutement.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Un bilan a toujours pour effet de rendre évidentes les insuffisances, voire les carences, mais cette visibilité de nos défaillances est la condition indispensable de l’amélioration de la qualité de l’action. Si la sécurité routière est une priorité, cette affirmation ne doit pas être uniquement dans les annonces. C’est notre aptitude à développer une gendarmerie et une police routière qui conditionnera la construction d’un système crédible et moderne de contrôle et de sanctions.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Ce sont les dépenses de personnel qui sont les plus importantes dans le domaine de la surveillance du réseau routier. Un gestionnaire qui n’assure pas le meilleur équipement de ses personnels ne les utilise pas au mieux. Le sous équipement de certaines unités est patent, vieux véhicules, vieux radars, transmissions insuffisantes, tout se conjugue pour limiter leur efficacité.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Il serait utile d’organiser une réunion commune de responsables d’unités spécialisées actuelles de gendarmerie et de police pour leur faire déterminer une fourchette minimale et optimale de leurs moyens et de leurs équipements en fonction des caractéristiques du réseau qu’ils surveillent. Deux ou trois jours de réunion seraient nécessaires, avec dans un premier temps l’exposé de l’existant dans ces unités, puis dans un second temps un débat sur les nouveaux matériels et sur les équilibres souhaitables entre les différentes méthodes du système de surveillance et de sanction (part souhaitée et envisageable pour les contrôles entièrement automatisés, part des contrôles classiques avec radar couplé à un appareil photographique ou avec interception, part des contrôles avec des véhicules banalisés dans le flot de circulation). Les techniques et les besoins dans le domaine des transmissions seraient précisés, avec la participation de spécialistes des fichiers de données (cartes grises, permis de conduire) et de l’acquisition de données (lecture automatique de plaques d’immatriculation avec un lien en temps réel avec le fichier des véhicules recherchés, notamment ceux dont le propriétaire s’est rendu injoignable par une fausse adresse sur le fichier des cartes grises). A la suite de ce travail les équipements souhaitables seraient définis et un plan d’équipement établi.
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Etablir un programme d’identification des connaissances et des méthodes nécessaires pour prendre des décisions et évaluer leur action
Enoncé du problème
Prendre des décisions appropriées implique que l’on dispose de connaissances pertinentes pour identifier le problème posé, définir les moyens de le traiter, évaluer le coût de l’action, son efficacité et son acceptabilité. La difficulté est maximale quand on aborde un système, ce qui est le cas de l’insécurité routière. De multiples facteurs de risque influent les uns sur les autres, et il peut être plus facile d’atteindre un objectif en agissant sur un de ces facteurs que sur un autre. Une efficacité plus faible peut être compensée par une acceptabilité plus grande ou un coût plus réduit. De multiples exemples permettent de mettre en évidence des lacunes qui handicapent l’optimisation, voire la définition de certains programmes et affaiblissent les possibilités d’évaluer leur efficacité.
Paradoxalement l’insécurité routière est à la fois un problème dont on connaît beaucoup de déterminants et qui conserve des zones d’ombre. On devine leur importance, on est capable de définir ce qu’il faudrait faire pour améliorer leur connaissance, mais sans se donner les moyens d’atteindre cet objectif. Il est également paradoxal de constater que c’est dans le domaine de la sécurité routière que les méthodes d’évaluation du rapport entre le coût et l’efficacité se sont développées (il y a plus de trente années), mais que l’acquis de ces pratiques n’a pas été maintenu et développé comme il aurait fallu le faire. Les succès de la politique de sécurité routière pendant la période 1973-1990 ont pu être un facteur de démobilisation des acteurs. Il me semble également évident que les actions de sécurité en milieu urbain (opérations « ville plus sûre – quartiers sans accident ») n’ont pas été suffisamment prolongées, développées et valorisées. Il est indispensable de remobiliser tous les acteurs (INRETS, laboratoires de recherche des constructeurs ou associatifs, le CERTU, le SETRA, les CETE) pour utiliser au mieux les compétences de structures, insuffisamment coordonnées et utilisées.
Objectif de la proposition
Mettre en place un dispositif capable de définir dans un délai de trois mois après l’acceptation de cette proposition :
- nos insuffisances de connaissances des déterminants de l’insécurité routière, intervenant au niveau national ou au niveau local,
- nos insuffisances dans le domaine de la définition des méthodes et des moyens à utiliser pour agir sur les déterminants de l’insécurité routière,
- nos insuffisances dans l’évaluation de la mise en œuvre de la politique de sécurité routière.
En aval de ces travaux, une programmation définirait les méthodes retenues pour réduire ces insuffisances, elle comporterait :
une hiérarchisation des objectifs retenus,
- une identification des partenaires susceptibles de contribuer à réunir les données manquantes,
- une évaluation du coût de ce programme de connaissances et un calendrier de son financement,
- et finalement une intégration de ces processus dans le fonctionnement institutionnel, assurant le suivi, la publication, la mise à jour de ce système de connaissances et d’évaluation.
Avantages et gains attendus
Sortir d’une période où l’insuffisance de la coordination et de la coopération entre les chercheurs, la délégation interministérielle, les différents services administratifs et les cabinets ministériels nuit à la pertinence des choix décisionnels. Les logiques à court terme ne permettent pas :
- de mettre à niveau les outils nous assurant que les problèmes sont identifiés, puis suffisamment analysés et quantifiés,
- d’identifier tous les moyens d’agir, notamment les expériences étrangères publiées,
- de développer le système d’évaluation qui permettra de s’assurer que les décisions sont effectives et adaptées à leur objectif
Le gain attendu est simple, il correspond aux concepts de base garantissant l’effectivité, l’efficacité et l’efficience dans l’action, publique ou privée. Ils sont plus familiers aux acteurs de l’action en santé publique que dans d’autres domaines, car l’exigence de résultats y est plus forte, notamment du fait du risque judiciaire. La sécurité routière est un problème de santé publique : il exige rationalité, hiérarchisation des objectifs, pertinence des méthodes et qualité de leur mise en œuvre pour obtenir les meilleurs résultats possibles.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il n’y a pas d’inconvénients, il n’y a que des difficultés. La France est un pays dont les habitants aiment se prétendre rationnels, mais répugnent à accepter les exigences de la rationalité quand il s’agit d’évaluer leur action. Cette maladie atteint également les administrations et les décideurs.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Pour planifier une réduction des risques de mort sur la route, il faut disposer de connaissances descriptives approfondies pour avoir un minimum d’aptitude à modéliser l’insécurité routière. Cette dernière est indispensable pour évaluer l’influence potentielle d’une décision particulière. Il est possible, à partir des données sur l’efficacité d’une ceinture de sécurité et des taux de port de la ceinture dans différentes conditions de circulation, de se fixer des objectifs et de définir une évolution du système de contrôle. Si l’on ne connaît pas le taux de port des ceintures à l’arrière, si la connaissance n’est pas suffisamment affinée au niveau géographique pertinent, si l’on n’a pas expérimenté l’effet d’un accroissement défini du contrôle exprimé en heures de fonctionnaires de police ou de gendarmerie dans un périmètre connu, il est impossible d’évaluer le rapport coût-efficacité d’une action dans ce domaine. J’ai pris volontairement un exemple simple pour lequel nous disposons d’une partie des connaissances nécessaires. Pour d’autres problèmes majeurs, nous sommes confrontés à un déficit de connaissances qui ne peut qu’induire l’irrationalité à tous les échelons de la décision. Un de mes plus mauvais souvenirs d’évaluation en sécurité routière a été le refus par le ministère de l’équipement de l’évaluation de l’efficacité du contrôle technique des véhicules. Il était facile à mettre en place, en satisfaisant un minimum d’exigences méthodologiques pour planifier la mise en place du dispositif. L’inconvénient était évidemment de courir le risque de constater que le contrôle ne modifiait pas l’accidentalité.
Autre exemple de l’interférence entre les connaissances et la prise de décision politique dans le domaine de l’insécurité routière, le débat sur les conséquences possibles de l’amnistie des fautes de conduite. Il a été initié en 1994 par un groupe de médecins affirmant qu’il pouvait être dangereux de savoir que les fautes de conduite seraient amnistiées, notamment quand des médias irresponsables annoncent l’amnistie et expliquent aux automobilistes qui ne respectent pas le code (sans danger bien sûr, puisqu’ils conduisent mieux que la moyenne !) qu’ils peuvent arrêter de payer leurs contraventions. La campagne contre l’amnistie a été reprise fin 2001, plusieurs associations se sont mobilisées et ont contribué à obtenir la décision du candidat Jacques Chirac de renoncer à l’amnistie des fautes de conduite. L’argumentaire pouvait être qualitatif, il est absurde d’annoncer le pardon des fautes avant qu’elles ne soient commises, l’impunité annoncée est une promesse dangereuse. Il était plus pertinent de fonder l’évaluation du risque en demandant aux spécialistes de l’évaluation des séries chronologiques de s’emparer du sujet. Le problème devenait une urgence de santé publique quand un ingénieur des ponts et chaussées a affirmé que la surmortalité précédant l’élection de 1988 et celle de 1995 était liée à une variation aléatoire de la mortalité routière s’associant aux variations du trafic. J’avais produit une évaluation probabiliste « rustique » du risque lié à l’amnistie, mais on pouvait la considérer comme insuffisante, compte tenu du niveau de développement actuel des techniques d’analyse des séries chronologiques. Deux économistes de Paris-Dauphine ont réalisé une évaluation quantitative, évaluant la mortalité attribuable à 300 morts pour chacune des deux dernières amnisties. Dans le même temps, des spécialistes de la modélisation du risque routier et de l’analyse des données chronologiques, saisis par le comité d’experts auprès du conseil national de la sécurité routière, se heurtaient à l’insuffisance des bases de données utilisables pour affiner l’évaluation du risque attribuable. Heureusement l’acte politique de supprimer l’amnistie des fautes de conduite a été pris, mais les décideurs auraient eu une tâche plus facile avec un argumentaire scientifique complet à leur disposition au moment de la décision.
Nous sommes donc dans une situation d’insuffisance de la contribution de la recherche et de l’usage des méthodes les plus fondamentales de la gestion dans la définition de nos actions de sécurité routière. Il faut rompre avec l’improvisation insuffisamment argumentée et évaluée, en adoptant des méthodes plus rationnelles. L’identification des besoins est la première étape.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Ma proposition est de réaliser deux séminaires de deux jours pour chacun des trois grands besoins cités dans l’énoncé du problème. Le premier de ces séminaires définirait l’existant et envisagerait les besoins et les méthodes à mettre en œuvre pour les satisfaire. Le second, qui suivrait le premier dans un délai inférieur à deux mois, serait destiné à finaliser les propositions, à l’aide de textes rédigés par les rapporteurs du premier séminaire. L’expérience récente du groupe de travail ayant produit le rapport sur les gisements de sécurité routière peut être particulièrement utile pour ce travail, car en tentant d’évaluer ces gisements, ils ont buté sur un certain nombre d’insuffisances de connaissances. Ils peuvent contribuer à les définir et proposer les méthodes à adopter pour les réduire. La commission d’évaluation du système de contrôle et de sanctions peut avoir le même rôle dans son domaine.
Sur le thème particulièrement important des besoins de recherche en sécurité routière, une réunion va avoir lieu les 12 et 13 décembre. Il serait utile de programmer le premier séminaire sur le thème des connaissances immédiatement après cette réunion, pour bénéficier de son apport.
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Abaisser le seuil à partir duquel une vitesse excessive est sanctionnée
Enoncé du problème
Les seuils d’intervention des gendarmes et des policiers lors des contrôles de vitesse ont progressivement dérivé, la tolérance pouvant dépasser 30 km/h, alors qu’il y a déjà un « abattement » entre la vitesse réelle mesurée et la vitesse inscrite sur la procédure, une circulaire ayant établi une différence entre ces deux notions, avec un barème des valeurs mesurées et des valeurs retenues. On ne peut parler constamment de « tolérance zéro » alors que des niveaux de tolérance aussi élevés sont la règle.
Objectif de la proposition
Supprimer dans des conditions appropriées, soigneusement définies, programmées et annoncées, la dérive dans les contrôles de vitesse et redonner son sens à la règle en appliquant un barème identique dans toute la France.
Cette décision permettra d’appliquer les règles sur les limites de vitesse avec une homogénéité et une constance indispensables pour restaurer leur crédibilité, alors que la situation actuelle rend la règle incertaine et donc la répression peu compréhensible. Atteindre ce but implique de se préoccuper d’un objectif intermédiaire important, redonner sa place à un encadrement strict de l’application des textes sur le terrain. Ce problème majeur dans la gestion de l’insécurité routière n’a pas été débattu au niveau des structures interministérielles, ni à celui des directions des polices urbaines et de la gendarmerie. C’est sur le terrain, dans les unités, que le souhaitable et le possible sont déterminés, avec un flou complet et sans argumentaire cohérent. Entendre affirmer qu’en l’absence de ces seuils d’intervention il faudrait arrêter presque tous les usagers témoigne d’une absence de réflexion sur l’adaptation des comportements aux pratiques qui caractrise les systèmes « vivants ». La dérive progressive des vitesses de circulation est le produit d’une adaptation permanente d’une population de conducteurs. Ces derniers ne sont pas persuadés de la pertinence des vitesses légales autorisées, ils surestiment leurs capacités et sont plus sensibles à la réalité des contrôles qu’à la limite fixée par la réglementation. Les moins aventureux accompagnent l’évolution des seuils à partir desquels interviennent les gendarmes et les policiers, les plus transgresseurs précèdent l’évolution suivante, et contribuent par leur nombre à élever le seuil d’intervention. Un système de sanction, qui prend pour référence la délinquance des usagers pour tenter de s’y adapter, est condamné à poursuivre sa dérive et à vider la loi de son sens et de sa crédibilité.
Avantages et gains attendus
Réduire les vitesses moyennes et donc l’accidentalité en redonnant une réalité aux règles. Il ne peut y avoir une différence aussi importante entre la théorie et la pratique de terrain. De nombreuses études ont précisé la relation entre les vitesses moyennes et l’accidentalité. Des exemples sont notamment présentés dans le rapport du ministère britannique des transports publié en 2000. Une élévation de 10% de la vitesse accroît l’accidentalité de plus de 20%. Le niveau de gain possible si l’on appliquait strictement les règles (objectif d’effectivité) exprimé en morts évitées est un des plus importants envisageable à court terme. Couplé à des décisions fermes pour supprimer la pratique des « indulgences », il peut redonner une crédibilité nouvelle à nos pratiques de contrôle de la vitesse avec des gains se situant entre 1000 et 2000 tués suivant l’effectivité de l’application de la mesure. Il faut insister sur l’importance d’une telle décision dans le cadre d’un développement des contrôles automatisés. Si un réglage laxiste peut être pratiqué au niveau d’une unité et pour un contrôle de quelques heures, il est impensable que des appareils à poste fixe et destinés à assurer un contrôle exhaustif intègrent les marges de tolérance actuelles. Une discordance entre les deux types de contrôle achèverait de faire perdre sa crédibilité à l’application des textes, donnant l’impression d’une réglementation dont l’application est incohérente.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il est toujours plus difficile de reprendre ce qui a été progressivement abandonné que de maintenir avec constance l’application d’une mesure. Le retour brutal au droit donnerait l’impression d’une injustice, puisque ce qui était toléré cesserait de l’être, faisant tomber dans le piège tous les usagers qui avaient intégré une norme de fait assez floue (+20, +30 voire +40 km/h), à la place de la norme réglementaire. Il sera donc indispensable d’organiser ce changement d’attitude, de l’expliquer dans des campagnes d’information à la mesure de son ampleur, et surtout de le programmer ouvertement pour éviter de surprendre les usagers par de nouvelles pratiques en rupture avec le laxisme actuel.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Deux phénomènes sont associés pour produire cette différence entre la théorie et la pratique :
la volonté d’intégrer les erreurs possibles de la mesure. Elle a provoqué l’établissement d’une circulaire qui indique aux personnes assurant la rédaction des procédures la valeur à porter sur leurs documents en fonction des valeurs mesurées. Un tableau a été joint à cette circulaire, il fixe par tranche de 10 km/h les vitesses mesurées et retenues, par exemple une vitesse mesurée de 106 km/h sera reportée à 100 km/h dans la procédure. Il faut savoir que les vérifications périodiques des radars indiquent des différences entre vitesse réelle et vitesse mesurée très inférieures aux différences indiquées sur ce tableau,
une « tolérance » qui s’ajoute aux effets du barème, signifiant que la limite de vitesse autorisée n’est plus une référence absolue qu’il est interdit de dépasser, mais une indication dont l’usager sait qu’elle n’a plus la valeur que lui donne le code de la route.
Il est difficile d’obtenir une documentation précise de ce comportement dans des textes écrits. Nous avons disposé de deux types de renseignement pour préciser ces faits :
des études faites par des chercheurs de l’INRETS qui ont analysé les distributions des vitesses relevées lors d’infractions dans différents contextes de limites de vitesse. Ces distributions font apparaître nettement l’existence d’un seuil au dessous duquel aucune infraction n’est relevée ni suivie d’une procédure (études de M.B. Biecheler et collaborateurs),
des communications officieuses ou des observations personnelles lors de pratiques de contrôle de vitesse avec interception ou par photographies (exemple de seuil à 106 km/h mesurés à une intersection où la vitesse est limitée à 70 km/h),
Les pays qui ont une faible accidentalité et un meilleur respect des règles sur les limitations de vitesse ont des pratiques très différentes des nôtres dans ce domaine. Les Pays-Bas ont officialisé un seuil de 3km/h qui intègre les imprécisions éventuelles des instruments de mesure et la tolérance sur le respect de la règle. La Grande Bretagne a établi un barème qui intègre également les deux facteurs précités (erreur possible et tolérance). Les différences n’ont rien de commun avec nos pratiques.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
La mesure aurait un coût nul en dehors des coûts des campagnes de communication à mettre en œuvre pour la justifier et indiquer les conditions précises d’application des nouvelles pratiques. La chronologie devrait être la suivante :
coordonner la formation des responsables des unités de police ou de gendarmerie assurant les contrôles pour expliquer l’objectif à atteindre et la justification de ce changement d’attitude (analyse de la dérive des pratiques sur des documents précis, description des relations entre les vitesses moyennes et les vitesses excessives, relation entre le risque et les vitesses moyennes etc.),
supprimer la circulaire instituant cette différence artificielle et injustifiée entre la vitesse indiquée par l’appareil de mesure et la vitesse retenue qui est reportée sur la procédure et sert à fonder la sanction. Il n’y aurait plus qu’une seule vitesse prise en compte, celle qui est mesurée, et le barème actuel serait officialisé comme intégrant d’une part l’erreur minime qui existe sur la mesure et une tolérance maximale définissant le seuil d’intervention lors d’un contrôle. Cela signifierait en pratique que le seuil de la sanction en ville serait de 56 km/h (valeur mesurée par un radar fixe), sur une route limitée à 90 km/h il serait de 96 km/h et sur autoroute de 138 km/h.
fixer une date de mise en application des nouvelles instructions et accompagner la mesure d’une communication vers les usagers d’une ampleur sans commune mesure avec les campagnes actuelles. La communication devrait reprendre tous les éléments objectifs de la connaissance du lien entre les vitesses de circulation et les vitesses à l’impact et leurs conséquences. Elle indiquerait le niveau des seuils d’intervention,
lors de la mise en œuvre, un effort très important de surveillance serait réalisé, avec une intervention systématique pour tous les dépassements, si faibles soient-ils des limites fixées par le tableau des vitesses « tolérées » en fonction de la limite autorisée. Il conviendrait d’éviter toute forme de dérive sous la forme d’une phase « d’avertissement » qui irait à l’encontre de l’objectif fixé. Il faut que les usagers modifient immédiatement leur comportement et que la crédibilité de la mesure soit suffisante pour qu’il y ait un effet d’entraînement réalisé par une majorité d’usagers respectant les nouvelles applications de la règle,
publier au niveau régional un indicateur représentatif des distributions de vitesses mesurées, des vitesses moyennes sur les différents types d’infrastructure, des infractions constatées (par classe de 10 km/h d’excès de vitesse) et de l’accidentalité. Cette documentation réaliserait non seulement une information de l’usager destinée à le convaincre que la règle a un sens, mais aussi une évaluation des pratiques sur le terrain.
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Utiliser les tickets de péage sur les autoroutes pour contrôler les excès de vitesse
Enoncé du problème
Comme sur l’ensemble du réseau routier français, la limite de vitesse sur les autoroutes est mal respectée, 10,6% des usagers dépassant de plus de 20 km/h la vitesse maximale autorisée et 3,7% la dépassant de plus de 30 km/h. Le risque évoluant suivant une puissance de la vitesse, la fraction des conducteurs en excès de vitesse impliqués dans des accidents est très supérieur à ces proportions. Il faut améliorer le respect strict des limitations de vitesse, sur les autoroutes comme sur les autres voies.
Objectif de la proposition
Assurer le respect de la vitesse maximale autorisée sur les autoroutes en utilisant le contrôle des vitesses moyennes. Bien que la mortalité au kilomètre parcouru y soit plus faible que sur les autres types de voies du fait de la sécurité structurelle assurée par la séparation des circulations et l’absence d’intersection, l’habitude d’aller vite se prend sur les autoroutes, et il est difficile d’obtenir le respect des vitesses maximales autorisées sur les autres voies quand des tolérances anormalement élevées sont pratiquées sur les autoroutes. Rappelons qu’un pays comme les Etats Unis, où les distances entre agglomérations sont beaucoup plus élevées qu’en France, avec des kilométrages annuels des usagers également plus élevés, les vitesses maximales sur autoroute sont à la fois plus faibles et mieux respectées.
Avantages et gains attendus
Les avantages de la méthode sont nombreux :
elle est exhaustive, tous les usagers sont contrôlés à l’identique,
elle est peu coûteuse, les tickets de péage comportent l’heure du passage du véhicule, il est facile de donner une valeur légale à ces indications en assurant le contrôle périodique des appareils qui délivrent les tickets, l’heure est un paramètre particulièrement facile à maîtriser,
elle réduit l’intérêt pour les véhicules inutilement rapides et puissants,
elle permet un contrôle facile et sans risque sur des voies où les contrôles avec interception sont particulièrement difficiles et potentiellement dangereux,
elle marquerait un changement d’attitude radical des décideurs politiques dans le domaine de l’insécurité routière. Une mesure automatique permettant de pacifier les autoroutes serait prise en refusant les prétextes qui traduisent l’abandon de l’efficacité et de l’équité, donc un manque de sincérité de ceux qui affirment leur détermination d’agir, mais n’osent pas passer à l’acte en prenant une décision qui n’a pas d’inconvénient et rend la loi crédible.
Le nombre de tués sur les autoroutes de liaison est actuellement de 283 (2001). Il est difficile de préciser la fraction attribuable à une conduite au-delà de 130 km/h faute d’avoir organisé une étude accidentologique comparant l’heure de passage à un poste de péage et l’heure de l’accident, ou des études tentant de reconstituer les trajectoires et donc les vitesses à partir des données observées après l’accident (ces étude sont particulièrement difficiles dans les accidents sur autoroute). Les pertes de contrôle sont fréquemment la conséquence d’excès de vitesse non documentés, comme les accidents en dépassement ou ceux liés à l’éclatement d’un pneumatique (surcharge et vitesse excessive). Une étude de l’Association des sociétés françaises d’autoroutes (déc. 99) indiquait qu’une vitesse excessive et inadaptée était présente dans 1 accident sur 2, associée dans 76% des cas à un autre facteur. Si l’on fait une estimation très basse des accidents provoqués par des excès de vitesse sur autoroutes de liaison, un minimum de 20% des accidents est concerné, soit 60 tués, c’est-à-dire dix fois plus que le nombre de victimes de l’encéphalite spongiforme bovine en France au cours des cinq dernières années.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il n’y a pas d’argument de fond opposable à une telle mesure puisque personne ne peut prétendre qu’il y a un inconvénient à appliquer une mesure simple, peu coûteuse, qui permet de faire respecter la loi. Cette méthode n’exerce aucune contrainte supplémentaire sur l’usager puisque la limitation de vitesse sur autoroute existe déjà. Refuser la méthode équivaut simplement à refuser d’être efficace. L’argument des contraintes sur la vie privée des usagers ne résiste pas à l’analyse. Un télépéage, un paiement par carte bancaire, un appel sur un portable sont des facteurs de « traçabilité » d’un usager, alors que le ticket de péage est un instrument de contrôle indispensable au paiement qui n’est nullement personnalisé en l’absence d’infraction. Le contrôle par la vitesse moyenne ne « localise » pas plus cet usager qu’une photo déclenchée par un radar ou un contrôle avec interception.
L’argument émis quand cette proposition a été faite dans le livre blanc de sécurité routière de 1989 est le risque de « compensation » de vitesses moyennes élevées par des arrêts sur les aires de repos. Cette objection n’a pas de valeur, des contrôles aléatoires peuvent être effectués à l’arrivée sur une aire de repos, sans danger pour les usagers et les intervenants, et sans matériel de mesure autre qu’un téléphone portable donnant accès à une l’heure légale ou à la base de données gérant les heures de passage en cas de télépéage.
Prétendre que l’autoroute tue moins au kilomètre parcouru n’est pas un argument recevable, chaque mort évitée par une méthode facile à mettre en œuvre est un gain pour la sécurité routière et il est facile de citer l’exemple des mesures mises en œuvre pour assurer la sécurité alimentaire de la viande bovine. Elles ont coûté des milliards d’€ pour sauver quelques vies.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Les usagers savent que l’on peut rouler à près de160 km/h sans risque de sanction (160 km/h réels font actuellement retenir 152 km/h comme vitesse inscrite dans la procédure et peu de pelotons de gendarmerie sanctionnent au dessous de 150 km/h « retenus ». Cette situation incite à l’achat et donc à la production de véhicules inutilement rapides. La conséquence est un accroissement rapide des vitesses sur les autoroutes, une mesure des vitesses moyennes entre péages faite en 1996 et 1999 sur le même tronçon d’autoroute a révélé un accroissement de 2,9 km/ de la vitesse moyenne avec plus de 20% de ces vitesses moyennes supérieures à 130 km/h. Si l’on veut faire respecter les règles, il faut disposer de méthodes de contrôle simples et automatisées. Une mesure répond à ces critères pour surveiller les vitesses pratiquées sur les autoroutes : l’usage des tickets de péage pour contrôler les vitesses moyennes et sanctionner les usagers qui dépassent sur un tronçon la vitesse maximale autorisée. Cette mesure est un véritable test de la volonté d’agir du gouvernement. Ne pas la prendre signifie que l’on accepte la transgression de la règle sur les limites de vitesse là où la vitesse autorisée est la plus élevée. L’adopter constituerait un signe extrêmement fort en faveur de la fin du règne de la vitesse excessive et illégale, sur les autoroutes comme sur les autres voies.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Faire que la législation autorise la mesure d’une vitesse moyenne sur une section de voie pour fonder le constat d’une infraction à la réglementation sur les limites de vitesse. Le coût de la mesure sera faible, les tickets de péage contenant l’information nécessaire. Il faudra établir avec les sociétés concessionnaires le calendrier de l’application de la mesure, et les conditions de son application dans les cas de paiement par télépéage (traitement des données par le système informatique qui assure le paiement du péage et transmission des données à un organisme gestionnaire) et de paiement direct forfaitaire encore en service sur certains tronçons. Les données et les documents à transmettre à l’administration pour traiter les infractions devront être définis par voie réglementaire.
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Déposer auprès de l’agence de Genève des Nations-Unies qui produit les normes des véhicules (WP 29) un projet de norme de limiteur de vitesse pour les voitures légères
Enoncé du problème
En juin 1999, le représentant de la France au WP 29 a déposé un projet de norme définissant une dispositif ayant deux propriétés :
donner au conducteur la possibilité de fixer une vitesse maximale entre 50 et 140 km/h (mais sans pouvoir la fixer au delà de cette valeur),
enregistrer la vitesse réelle du véhicule toutes les 5 secondes durant les deux dernières heures pendant lesquelles le véhicule a circulé. L’enregistrement pouvait être lu par un policier ou un gendarme à l’aide d’une prise normalisée.
En septembre 1999, le compte rendu de la réunion du WP 29 indique que la France a modifié son projet, le rendant totalement inefficace par la suppression de l’enregistrement et de la limitation de la vitesse maximale. Cette position est rapportée dans le compte rendu avec les termes suivants : «The expert from France explained that he did not expect to discuss it in detail but intended to ask for contributions, in order to improve the proposal. He also explained that prescriptions for the recording device (paragraph 5.2.1.13.2.) should be eliminated from the proposal. The expert from Germany reminded GRRF that, in his country, the speed limits did not apply for M1 vehicles on the motorway and announced that such a proposal would be difficult to support in his country. The expert from France explained that the proposed device should maintain the speed selected by the driver and did not have the aim of introducing a general speed limitation ».
Objectif de la proposition
Rétablir le projet initial de 1999 en attirant l’attention du WP29 sur l’urgence de l’adoption d’une telle norme, compte tenu des enjeux de sécurité sanitaire. L’agence ayant travaillé depuis 1999 sur le projet édulcoré qui a servi de position de repli pour éviter une norme contraignante, il est facile d’adapter le dispositif retenu pour lui rendre son efficacité.
Avantages et gains attendus
Assurer une limitation de la vitesse à la construction et dissuader l’excès de vitesse par la mémorisation des vitesses réelles pratiquées. En cas d’accident, une telle mémorisation permet de sauvegarder les intérêts des victimes en précisant la vitesse de circulation des véhicules impliqués. Les enjeux sont ceux des décès liés à des excès de vitesse, soit plusieurs milliers de décès annuels en France.
Un avantage non négligeable de cette mesure pour les décideurs publics français est de déplacer une partie de leur responsabilité pénale vers l’agence des Nations Unies puis vers l’Union Européenne dès que la norme sera disponible. Il est évident que le risque judiciaire va peser sur le dossier des véhicules inutilement rapides et de ce fait dangereux. Le code de la route (article L.311-1) prescrit de construire des véhicules « de façon à assurer la sécurité de tous les usagers de la route». La fabrication de véhicules qui peuvent dépasser largement les vitesses maximales autorisées sans la moindre justification autre que le fait qu’ils se vendent, engage la responsabilité des constructeurs, mais également des pouvoirs publics qui autorisent leur mise en circulation. Il s’agit d’une faute caractérisée car le risque est important, il est connu, et de nombreux experts se sont prononcés pour une limitation de la vitesse à la construction, notamment dans le Livre blanc de 1989. Le point le plus important est que ce risque est institué sans la moindre contrepartie bénéfique, ce qui le rend totalement inutile et insupportable. Le risque juridique a été rappelé récemment dans le rapport sur les « gisements de sécurité routière » produit en 2002 par un groupe de travail réuni à l’initiative de la DRAST (Direction de la recherche et des affaires scientifiques et techniques). Ce rapport indiquait : « Bien entendu la vitesse excessive traverse l 'ensemble des gisements comme facteur déclenchant ou aggravant de l'accident et de ses conséquences. A l'issue de ses travaux, le groupe se sent le devoir de mettre l'accent sur quelques unes des contradictions les plus flagrantes que la situation actuelle en matière de vitesse fait ressortir. On ne peut pas en effet mettre dans les mains des conducteurs, y compris les plus jeunes et les plus inexpérimentés, des véhicules dont les caractéristiques (puissance et vitesse en particulier) sont sans rapport avec la réglementation et s'étonner tant de leur utilisation effective que des résultats de celui-ci. Les pouvoirs publics, au plan français comme européen, ne pourront pas longtemps reculer devant des mesures que la connaissance scientifique des facteurs de sur-risque (puissance, vitesse, poids) et des conséquences de leur non prise en compte rend de plus en plus inévitables, mais qui sont retardées pour des raisons étroitement économiques. Peut-on croire qu'elles seront plus faciles à prendre sous le sceau de l'urgence, après des procès retentissants, plutôt qu'en évaluant à l'avance leurs effets économiques et sociaux afin d'opérer un traitement à froid, concerté et planifié ? ».
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il n’y a pas d’inconvénient, seulement des difficultés relationnelles avec les pays qui fabriquent des véhicules particulièrement rapides et puissants, notamment l’Allemagne. Les objections concernant l’utilité d’une « réserve de puissance » pour achever un dépassement son sans objet dans ce contexte car il est possible de disposer d’une accélération suffisante tout en ayant une limitation de la vitesse maximale (il s’agit alors de couple et non de vitesse maximale), d’autre part l’objection est sans fondement car les dispositifs envisageables permettent de dépasser une vitesse affichée en cas d’urgence pendant une période limitée. A l’approche de la vitesse maximale qui ne doit pas pouvoir être dépassée la nécessité de conserver une possibilité d’accélération est nulle puisque l’usager est alors sur autoroute où il n’y a jamais d’urgence à achever un dépassement. Cette nécessité n’est concevable que sur le réseau limité à 90 km/h ou moins.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Le risque lié à la vitesse est un des mieux documenté par les études accidentologiques. Les véhicules actuels sont conçus pour ne pas respecter les règles sur les limitations de vitesse et il est indispensable d’assurer une cohérence entre les règles et l’outil. Toutes les données des assureurs, notamment pendant la période où coexistaient des véhicules inutilement rapides et des véhicules nettement plus lents que les plus lents des véhicules actuels, ont mis en évidence la forte augmentation de l’implication dans les accidents et du dommage corporel provoqué chez des tiers quand la vitesse maximale du véhicule augmente (livre blanc de sécurité routière – documentation française 1989 – graphique 24 page 105).
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Le coût est nul, le délai peut être très court le texte de 1999 étant disponible et pouvant être adapté au travail qui a été fait depuis cette date par le WP 29.
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Définir une position française au niveau des instances européennes visant à obtenir des décisions contraignantes concernant la limitation de la vitesse de tous les véhicules à la construction
Enoncé du problème
L’homologation d’un véhicule permettant sa commercialisation se fait suivant des normes établies par une agence des Nations-Unies de Genève. Ces normes sont incorporées dans une réglementation unique au niveau européen depuis 1996. Cela signifie qu’un pays ne peut plus s’opposer unilatéralement à l’importation d’un véhicule répondant à ces normes. Quand la France a décidé de limiter la vitesse des poids lourds à la construction, elle avait encore la possibilité de faire ce choix. La Communauté à mis près de dix ans à la suivre et à adopter la même réglementation. Actuellement la procédure de réduction du tonnage des véhicules soumis à une limitation de vitesse à la construction est en cours, elle va abaisser à 3,5 Tonnes, le poids maximal au dessus duquel la vitesse sera limitée. Le problème est de savoir quand l’Union interviendra pour limiter la vitesse des véhicules qui provoquent le plus grand nombre de décès par accident.
Objectif de la proposition
L’adoption au niveau européen de dispositifs limitant la vitesse maximale des véhicules. Cette mesure est inéluctable, elle est d’ailleurs prévue. Dans l'un des considérants de la directive 92/6/CEE qui a institué la première limitation de vitesse des poids lourds à la construction, il était indiqué que ces exigences ne devraient, dans un premier temps, être imposées que pour les véhicules lourds qui sont le plus souvent utilisés en transport international. Par la suite, elles pourraient, compte tenu des possibilités techniques et de l'expérience des États membres, être étendues à des catégories de véhicules à moteur plus légers. Le moment est venu de faire des propositions dans ce sens, elles sont rendues indispensables à la fois pour des raisons de sécurité routière et pour contribuer à la défense de notre environnement (respect des accords de Kyoto).
Avantages et gains attendus
La réduction de la vitesse des véhicules est une des méthodes les plus efficaces pour améliorer la sécurité routière. Il convient dès maintenant de développer les outils techniques et réglementaires au niveau européen en mettant les différentes instances (commission, conseil des ministres, parlement) face à leurs responsabilités. Une directive doit limiter la vitesse des véhicules légers à la construction, et développer les méthodes de contrôle intelligent de la vitesse en utilisant les ressources actuelles de l’électronique de bord (combinaison d’un positionnement du véhicule sur le réseau routier par satellite, permettant de connaître la vitesse limite autorisée localement, et d’un asservissement automatique de la vitesse maximale que peut atteindre le véhicule à la vitesse autorisée.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Le conflit sera de nature économique comme lors de chaque confrontation de l’Union à un problème de sécurité sanitaire. L’Europe communautaire a d’abord été construite avec un objectif économique, pour faciliter les échanges. Les autres objectifs ajoutés au fur et à mesure de la modification des traités ont toujours été en retard par rapport à l’objectif initial. Ces retards sont apparus clairement lorsque l’Europe a été confrontée à des risques tels que celui provoqué par l’amiante ou par le développement de l’encéphalite spongiforme bovine. Quand un pays a un intérêt particulier à maintenir ou à développer un facteur de risque pour des motifs économiques, il est difficile d’obtenir de l’exécutif communautaire une décision privilégiant la sécurité sanitaire. Il est évident que le conflit avec le seul pays qui n’a pas limité la vitesse maximale des véhicules sur son réseau autoroutier, l’Allemagne, sera inévitable si la France prend une initiative au niveau de l’Union. Il faut accepter ce débat et le présenter clairement comme une nécessité de sécurité publique.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Il est fondé :
sur la relation prouvée par toutes les statistiques des assureurs entre la puissance inutile et le risque d’être impliqué dans un accident de la circulation,
sur l’inutilité totale de la production de véhicules dont la vitesse maximale dépasse la vitesse maximale autorisée.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
La France peut entamer des démarches au niveau de l’exécutif communautaire en se fondant sur les éléments objectifs du risque lié à une vitesse inutilement rapide des véhicules légers. Elle peut faire des propositions concrètes avec un calendrier raisonnable pour l’application de mesures de limitation de la vitesse à la construction, puis d’équipement des véhicules avec des systèmes intelligents de contrôle de la vitesse. En cas d’obstacles insurmontables, elle dooit indiquer qu’elle utilisera les possibilités d’action unilatérale prévue par le traité, en acceptant le risque d’une action devant la cour de Luxembourg. Compte tenu de la solidité du dossier et de l’évolution de la jurisprudence de cette Cour, elle a toutes les chances de voir reconnaître son droit d’agir dans un objectif de sécurité routière par cette juridiction. Il convient de bien comprendre que l’action ne se situe pas dans le domaine de la précaution, comme lors de l’action unilatérale de la France à propos de l’interdiction de l’importation de viande bovine britannique, contre l’avis de la commission. Il s’agit de prévention, c’est à dire de protection contre un risque important et bien documenté, où l’efficacité de l’action de limitation de vitesse à la construction pourrait à la fois être indiscutable et ne créer aucune discrimination entre les produits, la décision concernant aussi bien la production française que les autres véhicules produits au sein de l’Union ou dans des pays qui lui sont extérieurs. La France a des raisons particulières d’agir, notamment l’existence dans notre pays d’un réseau secondaire très développé, le plus important de l’Union en kilomètres par millier d’habitants, ce qui rend particulièrement dangereux la mise en circulation de véhicules inutilement puissants (la moitié des décès accidentel surviennent sur le réseau secondaire).
L’article du traité qui permet d’avoir une telle attitude est le suivant : (Article 30 - ex article 36)
« Les dispositions des articles 28 et 29 ne font pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation ou de transit, justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes ».
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Vérifier la qualité des limitations de vitesse indiquées sur les routes par une expertise de la totalité du réseau routier
Enoncé du problème
L’expertise technique du réseau routier est une demande ancienne exprimée par de nombreux experts et de multiples commissions. Elle a été constamment refusée pour des raisons diverses, la plus redoutée étant la responsabilité de ceux qui ont en charge les infrastructures (administrations, département, communes) quand des recommandations ne seraient pas mises en œuvre. Des querelles de territoire, et la peur d’une évaluation externe sont également intervenues pour faire rejeter cette expertise. Il est possible d’entamer ce processus d’évaluation en commençant par une démarche qui ne met pas en jeu de problèmes de pouvoir, elle concernerait la qualité des limitations de vitesse retenues et la qualité de la signalisation qui les indique à l’usager. Entre les limites abusives voire absurdes, les indications de début de zone de vitesse limitée qui ne sont jamais suivies de l’indication de la fin, et les panneaux mal placés qui peuvent avoir des conséquences importantes pour l’usager (possibilité d’être totalement masqués par un poids lourd en stationnement ou en déplacement), la responsabilité d’un excès de vitesse n’est pas toujours du côté de l’usager.
Objectif de la proposition
Vérifier la totalité du réseau routier dans un délai court (juillet 2003 pourrait être une date limite acceptable) et obtenir la mise en conformité de la signalisation avec les recommandations faites. Le second objectif est de profiter de cette opportunité pour supprimer toutes les limitations de vitesse ne correspondant pas aux 6 seuils retenus comme les plus adaptés à une situation donnée (30, 50, 70, 90, 110, 130 km/h).
Avantages et gains attendus
Obtenir une bonne lisibilité et une cohérence des indications par panneau prescrivant une vitesse maximale autorisée. Rendre plus juste l’application du système de contrôle et de sanctions en évitant les pièges et les imprécisions.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Aucun inconvénient autre que le coût de remplacement ou de placement de nouveaux panneaux.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Le respect de la réglementation sur les limitations de vitesse ne peut être assuré que si la réglementation applicable localement est clairement signalée. Le passage à la limite de 50 km/h en ville ne s’est pas accompagné de la disparition des nombreuses limitations à 45 km/h qui pouvaient être justifiées sur certaines voies quand la limite était à 60 km/h dans les agglomérations. Cette limite n’a plus de sens et il faut simplifier la tâche des usagers en adoptant une mesure contraignante, interdisant de fixer les limites de vitesse à d’autres valeurs que les six niveaux retenus comme aptes à répondre à toutes les situations (30, 50, 70, 90, 110, 130 km/h).
Un autre argument vient d’apparaître pour justifier cette mise à niveau. La préparation et l’expérimentation des systèmes de contrôle automatisé de la conduite imposent que les zones de limitations de la vitesse soient clairement définies. Un système comme le LAVIA ne peut fonctionner que si l’on dispose d’une cartographie exacte des limites de vitesse. Il ne peut fonctionner correctement si par exemple une zone à 70 km/h hors agglomération n’est jamais suivie du panneau de retour à la vitesse de 90 km/h/.
Cette évaluation et la remise à un niveau pertinent des limites retenues doivent être coordonnées avec les décisions concernant les seuils d’intervention des forces de l’ordre. L’habitude d’indiquer des vitesses plus basses que le niveau raisonnable souhaité a été justifiée à la fois par la dérive des comportements et des seuils de contrôle. Si des instructions précises sont données aux responsables des contrôles de vitesse, par exemple une limitation de la tolérance à 5 km/h au niveau d’une zone limitée à 70 provoquant une sanction à partir de 76 km/h. il faut que les limites indiquées soient conformes aux vitesses réelles souhaitées, sans intégrer une dérive des seuils d’intervention.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Réglementation prescrivant l’expertise de la signalisation de la vitesse autorisée localement chaque fois qu’elle est différente des limites par défaut (50, 90, 110 et 130). Interdiction de l’usage d’une autre limite de vitesse que les 6 niveaux utiles (30, 50, 70, 90, 110, 130 km/h). réalisation de cette mise à niveau avec une date limite qui pourrait être le 30/06/2003. Le règlement sera appliqué par les structures qui ont en charge les différents réseaux.
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Rétablir une taxation annuelle proportionnelle à la puissance, au poids, et à la vitesse maximale.
Enoncé du problème
Deux objectifs justifient la dissuasion de la production et de l’achat de véhicules inutilement puissants et lourds : la lutte contre l’insécurité routière et la réduction des nuisances pour l’environnement. La suppression de la « vignette » qui était une procédure s’opposant au développement de la puissance inutile est intervenue au moment où le risque climatique et le risque accidentel provoqué par des véhicules inadaptés aux règles de circulation devenaient des sujets de débat important. Il s’agissait d’une décision peu réfléchie qu’il est possible de corriger.
Objectif de la proposition
Rétablir une taxation dissuasive de la puissance inutile sous une forme différente de l’ancienne vignette, avec une franchise au dessous d’une certaine limite.
Avantages et gains attendus
Ils sont doubles :
réduire l’insécurité routière en réduisant progressivement les motivations d’achat de véhicules inutilement lourds et puissants dont la taxation serait aggravée progressivement chaque année,
réduire la production de gaz à effet de serre dont l’effet planétaire passe actuellement de l’hypothèse plausible justifiant des mesures de précaution, à une probabilité élevée justifiant d’effectuer une prévention rapide et adaptée.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Ce sont les inconvénients bien identifiés de la lutte contre un groupe de pression actif qui a deux composantes. La première est la défense d’intérêts économiques, notamment ceux des marques qui produisent principalement des véhicules ayant des caractéristiques inadaptées aux règles sur les limites de vitesse. La seconde est l’attrait pour les véhicules ayant ces caractéristiques.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Les données des assureurs ont documenté depuis longtemps le risque lié à la puissance et à la vitesse inutile. L’argumentaire justifiant la limitation de vitesse à la construction a été développé dans le livre blanc de sécurité routière de 1988. Au lieu d’inciter à agir, notamment en accroissant la dissuasion de l’achat de ces véhicules dangereux par la taxation, le Gouvernement a supprimé la taxe annuelle qui était proportionnelle à la puissance fiscale. L’évolution de la construction automobile s’est faite vers la disparition des véhicules adaptés aux règles sur les limites de vitesse, et la quasi-totalité des véhicules neufs peuvent dépasser largement la vitesse maximale autorisée. Nous avons donc laissé s’instaurer une évolution en complète opposition avec la défense de notre environnement et la sécurité routière.
L’absence de dissuasion du poids inutile a contribué à développer des véhicules inutilement lourds et de ce fait plus agressifs pour les tiers extérieurs, notamment les utilisateurs de voitures relativement anciennes (le parc a une ancienneté moyenne de sept années) ou de véhicules légers. Il y a progressivement une perte de compatibilité liée à cette dérive du poids. Dans un choc frontal (ce sont les plus fréquents des chocs entre deux véhicules), les occupants du véhicule le plus léger subiront une variation de vitesse plus importante que ceux du véhicule le plus lourd. Ces faits ont été documentés depuis de nombreuses années, notamment dans l’étude « Influence of car weights on driver injury severity and fatalities in head-on collision de Jean-Yves Foret-Bruno et collaborateurs - ESV 1996 ». Cette étude fondée sur l'analyse de 41668 collisions fronto-frontales survenues en France et connues par le fichier informatisé des accidents corporels est particulièrement intéressante par l'individualisation des véhicules de plus de 1200 kg. La phrase suivante : "La mortalité pour le conducteur dans la voiture la plus légère (moins de 850 kg) en collision fronto-frontale contre une voiture de la classe de masse la plus élevée (supérieure à 1200 kg) est 7 fois plus élevée que celle du conducteur adverse." met bien en évidence la parfaite connaissance de ce type de risque qui n'a provoqué aucune réaction des décideurs. Une étude utilisant une méthodologie identique sera publiée lors de l’ESV 2003. Rappelons que l'habitabilité d'un véhicule n'est pas concernée, et que l'on a su faire des grandes voitures d'un poids proche d'une tonne. Il y a donc une incompatibilité entre l’accroissement du poids observé dans toutes les gammes de voitures des différentes marques et les objectifs de compatibilité entre les différents éléments du parc en circulation et les objectifs de protection de l’environnement. Cette dérive est maximale avec l’usage du 4x4 en ville, avec des caractéristiques de puissance qui ne correspondent en rien au véritable usage du 4x4 (agriculture de montagne). Au lieu d’utiliser les progrès qui ont été effectués sur les moteurs pour réduire la consommation, ils ont été gaspillés pour mettre en mouvement des véhicules de plus en plus lourds et rapides. Il faut avoir à l’esprit des règles simples, en agglomération à des vitesses basses, avec des arrêts fréquents et des relances après ces arrêts suivis de freinage au ralentissement ou au feu suivant, la consommation est proportionnelle au poids du véhicule et à sa puissance maximale. Les mesures de vitesses conventionnelles sur route ne doivent pas faire illusion, ce sont des mesures dans des conditions de circulation et de respect des règles qui ne correspondent pas aux conditions réelles d’usage des véhicules.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Recréer par voie législative une taxation de la puissance inutile prenant en compte le nombre de places offertes par le véhicule, son poids et sa puissance. Pour favoriser l’achat de véhicules raisonnables, c’est à dire conçus pour assurer la liberté de déplacement dans le respect des règles et en minimisant les conséquences sur l’environnement, il faut tenir compte de trois variables, la place offerte pour assurer cette fonction de déplacement, le poids du véhicule et sa puissance ( qui peut être remplacée par la vitesse maximale).
Avec ces principes, la taxation devrait commencer au delà d’un seuil de poids. Le maximum pour une 4/5 places pourrait se situer aux environs d’une tonne (pour donner un exemple rappelons qu’un break 405 conçu il y une quinzaine d’années pesait 1,05 tonne, c’est le poids d’une 206 actuelle). Au delà de ce poids, la taxation serait croissante. Le second élément de la classification serait la puissance du véhicule, là encore avec un seuil qui pourrait se situer aux environs de 70 CV ou de 140 km/h, au delà la taxation serait rapidement croissante et subirait une augmentation année après année. Les véhicules de grand volume, destinés à transporter plus de 4/5 personnes, bénéficieraient d’un abattement sur les variables (poids, puissance et vitesse maximale) prises en considération pour établir la taxation. Il faut avoir à l’esprit l’évolution observée au cours des trente dernières années et notamment le moment où cette dérive dangereuse est apparue. Elle a marqué la fin de la rationalité dans la construction des véhicules dits légers. Quand la première crise pétrolière a conduit Simca à produire un modèle (l’Ariane) combinant un volume important et une motorisation privilégiant l’économie, une piste intéressante avait été explorée, elle a pris fin avec le retour à l’approvisionnement facile en carburant. Différentes variantes ont été produites, la plus puissante disposait de 84 chevaux et atteignait 145 km/h pour un poids de 1175 kg (rappelons que le Cx de ce véhicule n’était pas très favorable). Le modèle de 62 chevaux atteignait 130 km/h et son poids était de 1100 kg. Avec les technologies actuelles, la Renault Kangoo avec la plus faible motorisation dispose de 60 chevaux, sa vitesse maximale est de 136 km/h et son poids est de 1010 kg.
Une formule de taxation doit être soigneusement étudiée pour éviter des effets de seuil trop marqués et avoir une efficacité. Elle peut être évolutive pour faciliter l’adaptation des usagers et des producteurs. Il peut être intéressant de fixer un seuil de puissance et un seuil de vitesse pour éviter des véhicules très puissants bridés en vitesse dont la consommation en ville serait inévitablement plus importante que celle de véhicules moins puissants. Un exemple adapté serait la formule suivante :
seuil de taxation :
200 kg par place soit 1000 kg pour une 5 places
140 km/h pour la vitesse maximale
70 chevaux pour la puissance
un véhicule ne dépassant aucun de ces seuils serait exempté de toute taxation. La taxe « de protection de l’environnement et de la vie humaine » serait progressive sur chaque élément pris en compte, par exemple :
1 € par kilogramme supplémentaire
1 € par km/h de vitesse au delà de 140 km/h
1 € par cheval au delà de 70 chevaux
Avec de tels seuils la Kangoo précitée aurait une taxation nulle, une Laguna V6 de 210 chevaux, pesant 1480 kg et atteignant 235 km/h serait taxée au niveau de 480 + 95 + 140 = 715 €. Cette taxation pourrait avoir comme progressivité une fonction de puissance évoluant année après année, par exemple 1 la première année, 1,02 la seconde, 1.04 la troisième, etc. ce qui donnerait la progression 715, 815, 929 € avec l’exemple précédent. Après dix ans la taxe serait à 2661 € le but étant de faire disparaître à terme ce type de véhicule. La taxation annuelle demeurerait celle de l’année de production.
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Immatriculer les cyclomoteurs et les scooters actuellement dispensés de cette formalité
Enoncé du problème
Les cyclomoteurs et les scooters actuellement dispensés d’immatriculation sont très souvent débridés et roulent entre 60 et 80 km/h au lieu des 45 km/h réglementaires. Ce débridage les rend dangereux et bruyants. Non seulement l’absence d’immatriculation limite les possibilités de contrôle de la vitesse et du bruit, mais en outre elle facilite le vol de ces deux roues. Dans certaines villes les vols à l’arraché se font souvent en utilisant des scooters non immatriculés.
Objectif de la proposition
Immatriculer tous les deux roues à moteur.
Avantages et gains attendus
Faciliter les contrôles de la vitesse et du bruit, réduire le vol. Actuellement les enjeux en vies humaines de la mortalité de jeunes cyclomotoristes sont d’environ deux cents tués chaque année.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il faut mettre à la disposition des préfectures les moyens permettant d’appliquer la mesure, il s’agit avant tout de moyens en personnels. La décision avait été prise par le précédent gouvernement de ne pas pénaliser les propriétaires de ces deux roues en faisant prendre en charge par le budget le coût de l’immatriculation. Il faut donc que les crédits nécessaires soient mis en place pour assurer cette mesure.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Il avait été parfaitement développé dans le compte rendu du comité interministériel de sécurité routière du 26 novembre 1997 avec les phrases suivantes : « Pour un cyclomotoriste, le risque d'être tué est cinq fois plus grand que pour un automobiliste : 216 jeunes de 14 à 19 ans se sont tués en cyclomoteur en 1996, soit 14 de plus qu'en 1995. Les cyclomoteurs sont, en France, les seuls véhicules à moteur dispensés d'immatriculation. L'immatriculation des cyclomoteurs doit permettre de lutter contre les conduites dangereuses ou néfastes pour l'environnement, en particulier
• le vol : plusieurs dizaines de milliers de cyclomoteurs sont volés chaque année et ceux qui sont retrouvés ne peuvent être rendus à leurs propriétaires faute d'immatriculation.
• le débridage, qui accroît la vitesse et le bruit. En 1995, plus de 35 000 infractions ont été constatées.
Les cyclomoteurs sont des véhicules de cylindrée inférieure à 50 centimètres cubes, dont la vitesse maximale ne doit pas excéder, par construction, 45 km/h. Les technologies ayant évolué, les moteurs actuels, s'ils ne sont pas bridés pour répondre à la réglementation, permettent des vitesses de plus de 60 km/h, voire de 100 km/h pour les plus performants après manipulation. Ces manipulations constituent désormais une pratique courante chez les jeunes utilisateurs (la moitié des 200 000 cyclomoteurs vendus chaque année sont utilisés par des jeunes de 14 à 18 ans). Elles ont de lourdes conséquences en termes de sécurité (478 tués en 1996 tous âges confondus). »
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
L’absence d’immatriculation des cyclomoteurs est devenu un symbole de l’échec du précédent gouvernement dans le domaine de l’insécurité routière. Décider une mesure simple et justifiée en 1997 et se révéler incapable de la rendre effective cinq ans après témoigne d’une absence de prise en considération du problème à son juste niveau de gravité. Si le gouvernement actuel veut dépasser le stade de la velléité et obtenir des résultats il doit avoir des qualités de gestionnaire. Aucun texte nouveau n’est nécessaire pour appliquer cette mesure, le Parlement ayant été jusqu’à l’introduire dans la loi alors qu’elle relevait du pouvoir réglementaire. Toutes les préfectures savent quel temps de fonctionnaire est nécessaire pour procéder à une immatriculation, le nombre de scooters et de cyclomoteurs en circulation est connu. Il faut simplement avoir de la cohérence dans l’action et adapter les moyens aux décisions. Si le 14 juillet 2003, un an après que le président de la République ait annoncé que la sécurité routière est une priorité de son mandat, l’immatriculation des nouveaux cyclomoteurs n’est pas effective, et celle des cyclomoteurs en circulation programmée avec un calendrier annoncé, nous saurons que le gouvernement actuel n’est pas plus efficace que le précédent.
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Organisation et évaluation du dépistage préventif d’une alcoolisation excessive
Enoncé du problème
L’application des lois de 1978 et de 1990 qui permettent de dépister une alcoolisation excessive, en l’absence d’accident ou d’infraction, se fait avec une pertinence très variable d’un département à l’autre. Ce fait est documenté par la comparaison des résultats des dépistages et des proportions observées d’accidents avec alcoolisation à un taux illégal. Un second point de débat concerne les données statistiques publiées annuellement et qui sont censées donner une description exhaustive de ces dépistages. Trois types de renseignements concordent pour mettre en doute ces chiffres.
Objectif de la proposition
Organiser et coordonner les pratiques pour assurer une meilleure efficacité à ce dépistage préventif et assurer l’égalité des citoyens face à la loi. Assurer une évaluation des pratiques, car les données disponibles prouvent que les données publiées ne correspondent pas à la réalité des tests pratiqués.
Avantages et gains attendus
Eviter que les unités de gendarmerie et de police perdent leur temps à faire des dépistages à des jours et des heures où l’imprégnation alcoolique des conducteurs est réduite, au profit de pratiques de contrôle plus adaptées à la réalité et donc plus dissuasives, même si elles sont moins nombreuses. Améliorer l’évaluation des résultats en assurant la qualité des données statistiques recueillies. Cette évaluation aurait également l’avantage de valoriser ceux qui tentent de faire au mieux leur travail et non de répondre à une demande d’un nombre de tests supérieur à celui de l’année précédente. Un objectif de qualité est préférable à un objectif de production.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il est difficile, dans une période où les tâches des policiers et des gendarmes sont en expansion plus qu’en régression, de mobiliser les personnels pour des actions qui sont adaptées au but recherché, quand elles se situent la nuit et pendant le week-end. Une évaluation des pratiques réelles aurait l’inconvénient de mettre en évidence une réduction du nombre de tests pratiqués, mais il est préférable d’avoir une représentation réelle de l’activité plutôt qu’un bilan artificiel et peu exploitable.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
L’étude des accidents survenant sous l’influence de l’alcool, publiée par l’ONISR dans le bilan de l’insécurité routière en 2001, confirme les données déjà disponibles. Les accidents produits sous l’influence de l’alcool se situent principalement en fin de semaine et la nuit. Dans la tranche d’âge 18-24 ans il y a quatre fois plus d’accidents avec présence d’alcool à un taux illicite la nuit que le jour, et deux fois plus en fin de semaine que pendant les autres jours. Il faut donc pratiquer quatre fois plus de tests la nuit que le jour et deux fois plus de tests en fin de semaine que du lundi au jeudi.
Trois types de renseignements indépendants s’associent pour mettre en évidence la discordance entre les données statistiques publiées et les pratiques réelles de tests préventifs pratiqués dans le cadre des lois de 1978 et 1990 concernant les dépistages préventifs (la situation n’est pas la même pour la recherche d’une imprégnation alcoolique après un accident ou une infraction). Les achats d’éthylotests chimiques et d’embouts pour les éthylotests électroniques sont inférieurs au nombre de tests pratiqués. Un sondage sur les dépistages effectués au cours de l’année précédente sur une population représentative donne des résultats s’accordant avec le constat précédent. L’analyse des résultats détaillés mois par mois, et département par département, fait apparaître des résultats dépourvus de vraisemblance quant aux proportions de résultats positifs, même en se plaçant dans les plus mauvaises conditions pour faire des tests de dépistage. Il est impossible, compte tenu des autres indicateurs de la consommation d’alcool et de la pathologie alcoolique dans certains départements, de tomber à des niveaux si bas de tests positifs. Cette situation incite à associer systématiquement des évaluations aux publications de résultats. Cela permettra de valoriser les unités qui font au mieux leur travail et de demander aux responsables des unités qui ont des résultats peu vraisemblables de produire des données permettant de comprendre leur situation et leurs pratiques.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
La proposition consiste à encadrer les pratiques pour utiliser au mieux les moyens et s’adapter à la réalité, en acceptant une diminution du nombre de dépistages effectués. La méthode serait la suivante :
produire un plan de réalisation des dépistages, indiquant les tranches horaires et les jours de la semaine pendant lesquels ils ont été réalisés. Le travail demandé par ces contrôles est important, assurer la documentation des pratiques n’est pas un travail supplémentaire, c’est une condition de l’adaptation des pratiques à une efficacité maximale,
indiquer si une série de contrôles préventifs a été effectuée avec des éthylotests chimiques ou électroniques,
relever les immatriculations des véhicules contrôlés,
rééquilibrer les proportions de tests effectués dans les zones urbaines et les zones rurales, en 2001 le rapport a été de 1 à 11 entre le nombre de tests effectués par la sécurité publique (police) et la gendarmerie.
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Programmer l’abandon des éthylotests chimiques insuffisamment sensibles
Enoncé du problème
Les moyens matériels disponibles pour effectuer les dépistages de l’alcoolisation des usagers déterminent la précision et l’efficacité des dépistages. Le niveau d’équipement des policiers et des gendarmes est insuffisant pour assurer un dépistage fiable et équitable.
Objectif de la proposition
Planifier l’équipement des policiers et des gendarmes avec des matériels précis et sensibles, c'est-à-dire avec des éthylotests électroniques. Fixer la date au delà de laquelle le recours aux éthylotests chimiques sera supprimé.
Avantages et gains attendus
Rendre plus efficaces les contrôles, notamment les contrôles préventifs dans le cadre des lois de 1978 et de 1990, pour mieux maîtriser un des facteurs majeurs du risque routier. Quand un usager qui connaît la quantité d’alcool qu’il a absorbée au cours des heures qui précèdent le contrôle constate que son test est déclaré « négatif », il va fixer sa référence de consommation acceptable à un niveau anormalement élevé, alors que c’est uniquement la faible sensibilité du test chimique qui est en cause. La mesure proposée réduirait cette appréciation inexacte et sous évaluée du niveau d’alcoolémie en fonction de la quantité d’alcool consommée.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en oeuvre
Le seul problème allégué, qui ne correspond pas à une réalité, est d’ordre financier. Les éthylotests électroniques coûtent environ mille €, mais ils ont maintenant une espérance de vie de plusieurs années et le coût d’usage des éthylotests à usage unique est comparable sur de grandes séries de tests préventifs. L’homologation de ces appareils ayant été définie en 1985, le retard en équipement est uniquement lié au fait que l’investissement n’a pas été considéré comme prioritaire et planifié.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
L’usage des éthylotests électroniques est un problème réglé dans les pays industrialisés, il n’y a plus guère que la France à continuer d’utiliser aussi largement les « ballons ». La sensibilité de ces derniers dans une pratique de dépistages préventifs est faible, bien différente de ce qui est indiqué par les contrôles de tests en laboratoire. Une étude à partir des pratiques réelles, publiée dans le livre blanc sur les drogues et la sécurité routière de 1994 avait permis de comparer les résultats observés lors de contrôles préventifs avec les deux types d’appareils dans un nombre d’unités et de départements suffisamment différents pour éviter l’influence de facteurs locaux. La proportion de tests positifs était de 0,69 % avec les éthylotests chimiques (4854 sur 707287) et de 1,69 % avec les appareils électroniques (1033 sur 60773), soit un rapport de 1 à 2,45. Il y a donc un double inconvénient à les utiliser, l’usager va acquérir une notion erronée de son niveau réel d’imprégnation alcoolique en fonction des boissons alcooliques consommées, et les citoyens sont dans une situation d’inégalité face aux contrôles, ils ont des risques plus importants d’être sanctionnés si le dépistage est fait avec un appareil sensible (moins de faux négatifs). La différence entre la sensibilité observée en laboratoire et sur le terrain est facile à expliquer, les conditions sont beaucoup moins favorables sur le terrain pour apprécier un changement de couleur, les conditions d’éclairement sont mauvaises la nuit (période où les tests positifs sont les plus fréquents), la température extérieure peut être très basse, réduisant la vitesse de changement de la coloration et enfin les tests ne sont pas toujours conservés dans des conditions optimales. Ces éléments militent pour un abandon des tests chimiques qui exigent une interprétation, l’éthylotest électronique produisant lui un signal qui n’a pas à être interprété, soit il est positif, soit il est négatif.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Aucun texte nouveau n’est nécessaire, il faut faire le bilan des appareils existants dans les différentes structures (en fonction du niveau de décision pour obtenir les moyens budgétaires nécessaires : police, CRS, gendarmerie), évaluer leur coût de maintenance, évaluer le nombre d’appareils nécessaires et établir un plan d’équipement fixant une date limite pour leur généralisation. La fin 2004 pourrait être une limite raisonnable pour cette interruption de l’usage des éthylotests chimiques.
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Evaluation au niveau local de l’absence d’usage d’un système de retenue dans un véhicule pour fonder des actions spécifiques concernant ce risque majeur,
Enoncé du problème
Le port obligatoire d’un système de retenue a constitué un progrès majeur dans la sécurité secondaire des usagers de véhicules à quatre roues. Les études accidentologiques et les dénombrements de l’usage de ces systèmes prouve que la généralisation est loin d’être atteinte.
Objectif de la proposition
Associer une évaluation des taux de port des systèmes de retenue au niveau local et une action programmée de contrôle, pour atteindre des objectifs fixés par les partenaires locaux (responsables judiciaires et administratifs, policiers, gendarmes,). Augmenter d’un point le retrait de points du permis pour non port de la ceinture ou absence d’usage d’un dispositif de retenue pour les enfants.
Avantages et gains attendus
Les évaluations actuelles des gains en vies humaines par un respect généralisé de la réglementation indiquent des valeurs supérieurs à mille vies épargnées si tous les usagers étaient retenus dans les véhicules.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
L’acceptation de la ceinture est acquise. La fraction de réfractaires est minime et la négligence est plus souvent en cause que la volonté affirmée de ne pas s’attacher pour des questions de principe (il ne s’agit que de moi) ou de crainte (je ne veux pas brûler attaché dans ma voiture).
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
L’usage des moyens de retenue divise la mortalité par un facteur supérieur à deux. La France a été le premier pays européen à décider l’obligation du port de la ceinture de sécurité en 1973, mais elle n’est pas en tête pour le taux de port réel. Cette situation est d’autant plus dommageable que le port de la ceinture fait partie des mesures très efficaces et d’un faible coût. Les taux de port indiqués par l’ONISR en agglomération varient de 61% à 87%, ce qui est très insuffisant. Nous ne disposons pas de mesure du taux de port pour les places arrière ni pour les enfants.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
L’action doit être entreprise rapidement, se programmer au niveau local, et comporter :
un dénombrement de l’usage des moyens de retenue au niveau local. Cette pratique est indispensable pour programmer une action et évaluer les résultats. Ce dénombrement n’est pas difficile mais il doit respecter un minimum de règles méthodologiques et être fait dans des conditions reproductibles. Niveau local signifie niveau auquel s’exerce le contrôle (agglomération pour une zone police, département pour la gendarmerie),
une campagne dans les médias locaux indiquant le niveau du taux de port (avant, arrière et enfants) et annonçant le développement d’une politique de contrôle. Elle doit reprendre l’argumentaire en faveur de l’usage de la ceinture (prévention de l’éjection qui tue dix fois plus que lorsque le conducteur n’est pas éjecté, prévention de la mort dans un incendie de véhicule car l’occupant ceinturé et protégé par sa ceinture sort plus facilement de son véhicule que l’occupant non retenu victime d’un traumatisme crânien ou de fractures des membres).
plan de contrôle du port de la ceinture, développé dans le cadre des plans départementaux de contrôle et de sanction, fixant un objectif d’heures de contrôle dans la zone concernée,
évaluation des résultats, publication du nombre de procédures pour absence de port, adaptation de la politique de contrôle aux résultats pour élever le taux de port qui doit s’approcher de 100%.
Cette action doit suivre immédiatement la décision réglementaire d’accroître d’un point la retenue de points de permis en cas d’absence de port de la ceinture ou absence d’usage d’un système de retenue par les enfants.
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Définir une aptitude à la conduite après 65 ans
Enoncé du problème
Le vieillissement de la population, lié à l’accroissement de l’espérance de vie, accroît le nombre de conducteurs âgés et donc le nombre d’accidents impliquant ces conducteurs. Cette situation provoque de plus en plus fréquemment la mise en cause des altérations des capacités de conduite sous l’influence du vieillissement, et la demande de décisions visant à garantir l’aptitude à la conduite à partir d’un certain âge.
Le problème est difficile, car la pertinence des méthodes utilisées dans différents pays pour tenter de résoudre la difficulté n’est pas prouvée. Autrement dit nous n’avons pas la preuve que d’avoir écarté une certaine proportion de conducteurs de la conduite a provoqué une diminution significative de l’accidentalité des personnes concernées par la vérification de leur aptitude. Si les tests utilisés sont pertinents, ils doivent provoquer une réduction de l’accidentalité des personnes qui ont passé avec succès ces tests. En effet si ce sont les conducteurs les plus dangereux qui ont été interdits de conduite, ceux qui conservent leur permis doivent former un groupe globalement plus sûr que l’ensemble initial. Si l’on ne constate pas cette réduction, c’est que la méthode utilisée n’est pas pertinente (ou qu’elle n’est pas appliquée de façon effective).
Une telle difficulté n’est pas inhabituelle en sécurité routière. Identifier un risque qualitatif n’implique pas que l’on dispose d’une mesure efficace et acceptable pour le prévenir. Il est fréquent qu’une mesure soit proposée par ceux qui souhaitent son application (ou qui ont intérêt à ce qu’elle soit prise), sans que nous ayons la preuve de son efficacité. Un des meilleurs exemples a été apporté par le contrôle périodique des véhicules, et il est intéressant de le prendre en considération car il a des parentés évidentes avec le contrôle des personnes, nous développerons cette comparaison dans l’argumentaire. Les usagers « dynamiques » qui apprécient la vitesse et les voitures puissantes mettent fréquemment en cause l’inaptitude des conducteurs plus âgés qu’eux, dont les performances sont à l’évidence plus réduites. Désigner l’autre comme coupable est une attitude de facilité qui, dans ce cas particulier, confond performance et risque. L’accident est habituellement provoqué par une prise de risque se situant au delà des capacités d’un usager. Une personne ayant une bonne appréciation de son niveau de compétence peut situer sa prise de risque à un niveau inférieur. A l’opposé un conducteur objectivement « plus performant », mais qui surestime ses capacités, peut se placer dans un situation de prise de risque dépassant ses capacités réelles. Il convient donc d’être très prudent avant de faire le choix d’une solution.
Objectif de la proposition
Se donner le temps et les moyens de tester un ensemble d’indicateurs de risque chez des conducteurs de plus de 65 ans, avant de définir les conditions qui devront être réunies pour déclarer inaptes certains d’entre eux.
Avantages et gains attendus
Réduire le risque lié à la dégradation des capacités de conduite liées à l’âge, non compensées par une réduction de la prise de risque. Il est actuellement difficile de mesurer actuellement le gain en vies humaines qui pourrait être produit par une décision de vérification de l’aptitude à la conduite des personnes âgées.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
L’inconvénient majeur serait de prendre des mesures dont l’efficacité n’aurait pas été prouvée au préalable, privant de la liberté de se déplacer de façon autonome un grand nombre d’usagers de la route. Conserver sa mobilité pour faire des courses, aller rencontrer des amis, avoir des liens sociaux, associatifs ou autres, est une condition importante du maintien des personnes âgées à leur domicile. Il serait injuste et coûteux pour la collectivité de les priver de cette autonomie pour des raisons paraissant fondées en théorie mais qui n’auraient pas fait la preuve de leur pertinence à l’épreuve de la pratique.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Les travaux des assureurs nous indiquent que les personnes âgées ont dans l’ensemble moins d’accidents que les autres conducteurs au cours d’une année. Le risque routier des personnes n’est donc pas un problème prioritaire, ce qui ne signifie pas qu’il est inutile de s’en occuper, mais cela permet de se donner le temps de trouver une solution appropriée en évitant les abus de pouvoir. Le parcours effectué annuellement se réduisant avec l’âge, le risque au kilomètre parcouru s’accroît, mais l’exposition au risque se réduisant dans des proportions plus importantes, le risque final (le nombre d’accidents par an, dénommé sinistralité par les assureurs, accidentalité par les accidentologistes) peut être plus faible que celui des autres conducteurs. Il faut remarquer que l’accroissement du risque au kilomètre parcouru quand le kilométrage annuel se réduit s’observe à tous les âges, il faut bien différencier les deux facteurs de protection que sont l’expérience (nombre d’années de conduite) et la pratique (nombre de kilomètres parcourus en un an assurant le maintien des conditionnements d’habileté, d’attention, d’aptitude à chercher dans l’environnement les bons renseignements et à les exploiter correctement). Les conducteurs vieillissants voient varier deux facteurs en sens inverse, ils ont une longue expérience et réduisent leur pratique. Outre ces bilans globaux, les études accidentologiques nous apprennent deux autres notions importantes dans l’appréciation du risque lié au vieillissement :
la vulnérabilité s’accroît avec l’âge. Cela signifie que pour un choc équivalent, le risque de blessure grave ou de décès s’accroît. Une fracture va survenir à la place d’une simple contusion, un décès là où une personne plus jeune survivrait. Il convient donc de ne pas confondre l’accidentalité et la mortalité. Ces indicateurs ont des significations très différentes, seule la prise en compte de la première a un intérêt pour la prévention primaire du risque routier des personnes âgées.
les typologies d’accidents évoluent avec l’âge. Les personnes âgées conduisent de moins en moins la nuit (période de risque accru au kilomètre parcouru), sont rarement sous l’influence de l’alcool (les consommateurs abusifs ont disparu ou ont modifié leur comportement !), respectent mieux les règles sur la vitesse et ont dans l’ensemble peu de pertes de contrôle. Leurs accidents les plus typiques sont des erreurs d’appréciation de leur possibilité de passage au niveau d’intersections, par exemple marquer un stop puis redémarrer alors qu’un autre véhicule circule à une vitesse élevée sur la voie prioritaire. Prendre des sens interdits, ou une autoroute à contre sens, font partie de ces erreurs qui témoignent d’une difficulté à intégrer plusieurs éléments dans un comportement.
Des travaux très nombreux ont été consacrés aux moyens de prévenir le risque de la conduite dans le dernier tiers de la vie, et certains états ont pris des décisions qui relèvent de deux catégories.
un examen médical sans critères précis au-delà d’un certain âge. C’est une solution de facilité qui n’a jusqu'à maintenant jamais fait la preuve de son efficacité, les réductions de l’accidentalité ne sont pas significativement différentes de la réduction de l’exposition au risque obtenu. Avec de telles méthodes il est possible d’écarter de la conduite de 5% à 20% des conducteurs et de réduire dans les mêmes proportions l’accidentalité de la tranche d’âge concernée. Cette « efficacité » là est une preuve d’absence de pertinence de la décision précise. En poussant cette logique à son terme l’interdiction de la conduite des usagers dépassant un certain âge supprimerait totalement leur responsabilité dans les accidents.
un examen d’aptitude associé à l’examen médical semble un progrès par rapport à la solution précédente, mais là encore la preuve de l’efficacité recherchée (faire diminuer l’accidentalité dans le groupe d’âge concerné dans une proportion plus importante que celle des retraits de permis) n’a pas été obtenue. Il faut admettre que les techniques mises en œuvre peuvent ne pas avoir été définies avec suffisamment de pertinence, ou appliquées avec suffisamment de rigueur, pour faire la preuve de leur intérêt.
Nous sommes donc confrontés à une situation très proche de celle qui a provoqué la mise en œuvre généralisée de l’expertise technique périodique des véhicules. Personne ne peut contester qu’il est préférable d’avoir un véhicule en bon état, bien entretenu, pour éviter des accidents liés à la vétusté. Il est tout aussi évident que certains accidents sont provoqués par des défaillances mécaniques. La réunion de ces deux notions indiscutables a provoqué une obligation d’examen technique périodique. Les bilans de ces pratiques (confère l’étude de l’observatoire national interministériel de sécurité routière) ne sont pas probants et ce résultat n’est pas surprenant. Les accidents liés à un problème matériel sont rares et pour des raisons simplement statistiques, plus un facteur de risque intervient rarement, plus il est difficile de prouver l’efficacité des mesures prises pour réduire son influence par des études portant sur l’ensemble des accidents. Il aurait fallu faciliter l’évaluation dès la mise en œuvre de la mesure, mais cela n’a pas été fait. En outre les études accidentologiques mettent en évidence le rôle de facteurs de risque liés au véhicule qui ne sont pas accessibles au contrôle technique bisannuel. Les pneumatiques usés ou sous gonflés sont au premier rang de ces facteurs de risque, et l’on peut avoir des pneumatiques en bon état lors d’un contrôle technique qui éclateront six mois plus tard sur une autoroute parce que l’on n’a pas surveillé leur pression tout en surchargeant un véhicule.
Dans le cadre de l’aptitude des personnes âgées, l’espoir vient actuellement d’une meilleure connaissance des signes précliniques des démences de type Alzheimer qui permet d’envisager des examens nettement plus sensibles et spécifiques que l’examen médical « traditionnel » portant sur la vue, l’audition, les réflexes ou d’autres caractéristiques dont le lien avec le surrisque d’accident n’est pas prouvé. Les simulateurs de conduite peuvent explorer des critères complémentaires, mais il faut être attentif au risque de perturbations artificielles produites par un milieu qui n’est pas familier à la personne testée. En outre il s’agit d’instruments rares et chers qui demandent des développements autorisant leur vulgarisation.
Un élément est particulièrement important à prendre en considération, la survenue de petits accidents matériels chez une personne âgée qui est un indicateur de développement d’une inaptitude à la conduite. Les assureurs connaissent bien ce signe et se préoccupent de cette répétition des sinistres. Il est possible d’envisager de le coupler à des examens de dépistage d’une démence pré-clinique ou à des signes d’inaptitude à intégrer des stimulations sensorielles (simulateur) pour fonder une déclaration d’inaptitude. C’est l’objet de la présente proposition.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
La mesure consisterait à documenter à partir de 65 ans un indice de surrisque d’accident et à suivre au cours des années suivantes le risque réel observé. Si l’indice était suffisamment prédictif, il serait utilisé pour fonder des retraits de permis. L’indice serait géré par les services qui ont la responsabilité du permis à points, dans le cadre d’une rénovation des moyens matériels (et logiciels) de ces services et d’une opération d’actualisation des données du fichier des permis de conduire destinée à améliorer sa qualité.
L’examen d’aptitude serait défini par un groupe réunissant des accidentologistes, des gérontologues et des chercheurs travaillant sur le problème du risque d’accidents des personnes âgées. Il viserait à dépister les signes de démence à un stade préclinique, et la qualité des aptitudes cognitives mises en œuvre dans la conduite, ainsi que des renseignements plus traditionnellement recherchés sur l’état sensoriel et moteur. Il définirait les conditions d’utilisation de ces méthodes et l’expression des résultats sous la forme de trois notes spécifiques de chacun d’eux et d’une note globale. Ces données seraient introduites dans le fichier du permis à points. La première tranche d’usagers concernés seraient les conducteurs de plus de 80 ans, puis ceux de tranches d’âge inférieures de cinq ans en cinq ans au fur et à mesure du développement du dispositif.
Les assureurs auraient accès à ces données (voir par ailleurs la proposition leur donnant accès au fichier des cartes grises et au fichier du permis à points) et assureraient, en collaboration avec un groupe de pilotage créé par l’Agence Française de Sécurité Routière, l’exploitation des résultats année après année.
Avec la même éthique que dans la conduite prospective de l’expertise d’un nouveau médicament, les décisions d’utilisation réelle de la méthode (retrait du permis) interviendraient quand les analyses de données auront apporté la preuve à un niveau de crédibilité statistique acceptable de la pertinence des critères utilisés (pouvoir prédictif de la survenue d’un accident en fonction de l’indice clinique et de l’indice des accidents matériels et corporels observés dans la période récente).
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Interdire à certains usagers l’usage de véhicules inutilement puissants
Enoncé du problème
Les sociétés d’assurances ont établi que le risque d’être impliqué dans un accident dépend du véhicule utilisé et des caractéristiques de l’usager qui l’utilise. Les indicateurs de risque pour ce dernier sont l’inexpérience et les antécédents d’accidents. Les comportements infractionnistes peuvent également être considérés comme des facteurs de risque mais les assureurs n’ont pas actuellement accès à cette information et ne peuvent l’utiliser pour l’établissement des primes. Il convient donc d’améliorer l’évaluation du risque individuel en fonction du véhicule utilisé et des facteurs précités, puis d’en tirer les conséquences en ce qui concerne l’accès à des véhicules particulièrement dangereux quand ils sont utilisés par des « conducteurs à risques ».
Objectif de la proposition
La proposition consiste à supprimer l’accès des usagers aux véhicules inutilement rapides et puissants, en reliant le type de véhicule que l’on est autorisé à conduire à un surrisque évalué, d’une part en se fondant sur le surrisque lié à une faible expérience de la conduite, d’autre part en utilisant les antécédents d’accidents ou de retraits de points du permis de conduire.
Le risque routier est maximal quand un conducteur inexpérimenté ou au comportement avéré dangereux ou infractionniste dispose d’un véhicule inutilement rapide et puissant. La mesure proposée est très différente de celle qui avait envisagé de donner des droits particuliers à des « super-conducteurs » qui auraient seuls accès aux véhicules puissants. Il s’agit à l’inverse de limiter le danger lié aux conducteurs qui présentent un surrisque documenté. Cette situation sera transitoire, l’évolution des technologies permettra de généraliser dans quelques années l’asservissement de la vitesse maximale pouvant être atteinte par un véhicule, en fonction de la vitesse autorisée localement (système de contrôle intelligent de la vitesse). En attendant, faute de volonté des pouvoirs publics et des partenaires européens de vouloir appliquer une limitation à la construction de la puissance et de la vitesse des voitures dites légères, nous sommes en présence d’un surrisque majeur quand l’inexpérience et le comportement à risque sont associés à des puissances inutiles. Le but de la proposition est d’agir efficacement pendant une période qui peut durer de quatre à dix ans, avant que le bon sens et la lenteur européenne dans le domaine de la sécurité sanitaire assurent une sécurité structurelle, indépendante de l’aptitude de l’usager à transgresser des règles incohérentes avec les performances actuelles des véhicules.
Avantages et gains attendus
Réduire la mortalité provoquée par l’association de l’inexpérience et de performances incompatibles avec cette dernière, ainsi que la poursuite d’une carrière de conducteur dangereux à un usager qui a fait preuve à plusieurs reprises de son incapacité à respecter les règles du code de la route, ou a été impliqué dans un accident avec une part de responsabilité (malus). L’adoption d’une telle mesure peut épargner de plusieurs centaines à un millier de vies par an, suivant le seuil de puissance retenu et les conditions d’autorisation de conduite d’un véhicule pour les conducteurs inexpérimentés ou déjà empiriquement constatés comme « à risques »
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
L’inconvénient le plus important est de faire apparaître une difficulté dans une famille aux moyens limités possédant un seul véhicule. Un jeune conducteur venant de passer son permis ne pourrait pas avoir accès au véhicule familial si ce dernier dépasse la puissance maximale compatible avec l’inexpérience de ce conducteur. Il faudrait alors que tous les membres de la famille acceptent par solidarité de se priver d’un véhicule aux caractéristiques potentiellement dangereuses (ce qui ne peut qu’être favorable à leur propre sécurité).
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Les études des assureurs ont longtemps été publiées de façon extensive, comme une contribution à la connaissance de la sécurité routière. Depuis une dizaine d’années, les résultats publiés sont moins complets et certaines études ne sont pas publiées car elles représentent le produit d’un savoir faire statistique dont les applications commerciales sont indiscutables. Elles permettent en effet d’affiner la tarification, et l’on comprend que les compagnies qui mettent en commun des moyens importants pour affiner leurs connaissances soient soucieuses de faire bénéficier préférentiellement de ces connaissances les commanditaires de ces études. Il est probablement possible de trouver un juste équilibre entre les intérêts commerciaux des assureurs et l’intérêt de santé publique, par une négociation entre les partenaires. Il faut enfin tenir compte du fait que des données peuvent être utiles aux responsables de la sécurité routière et ne pas avoir d’intérêt direct pour les assureurs. Un exemple dans ce domaine est l’absence d’évaluation précise par ces derniers du dommage corporel produit chez des tiers extérieurs au véhicule en fonction de sa masse, de sa puissance et de sa vitesse maximale. Il est en effet patent que l’évolution des véhicules se fait vers des produits de plus en plus lourds et rapides, très agressifs envers les véhicules plus légers heurtés. Il faut que cette dangerosité dans le domaine du dommage corporel produit chez les tiers soit documentée par les assureurs. Un double effort est donc à faire pour permettre le meilleur usage de ces données concernant le risque lié à l’usager et au véhicule.
La mise à disposition des assureurs des données du permis à points serait alors un élément important dans cette détermination du risque lié aux antécédents d’un usager.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Le délai de mise en œuvre d’une telle mesure peut être de deux années. Pendant cette période, les assureurs et les pouvoirs publics s’accorderaient sur le niveau de risque statistique lié aux deux éléments du système concernés, le véhicule et l’usager.
Pour le véhicule il s’agirait notamment des dommages corporels et matériels produits chez des tiers extérieurs en fonction des caractéristiques des véhicules assurés (masse, puissance, vitesse maximale), de l’accidentalité (indice de fréquence des sinistres).
Pour l’usager il s’agirait d’une part du surrisque lié à l’insuffisance d’expérience, le choix pouvant se faire entre 3 et 4 ans d’ancienneté de permis pour accéder à un véhicule présentant des risques structurels accrus, pour les conducteurs qui ont un permis dépassant ce délai, le critère serait fixé à l’aide de deux « marqueurs de dangerosité » (le nombre de points de permis retirés et le niveau de bonus-malus).
En fonction de ces données, le permis délivré autoriserait la conduite d’un véhicule se situant dans les groupes les plus bas des assureurs ou celle de tous les véhicules. Par exemple un conducteur ayant son permis depuis moins de trois ou quatre années ou un conducteur ayant perdu plus de la moitié des points de son permis et ayant été responsable d’un accident corporel au cours des années précédentes ne pourrait conduire un véhicule dépassant un certain seuil de vitesse ou de puissance (ou qui devrait avoir une valeur minimale de rapport poids/puissance).
Il est évidemment impossible de multiplier les classes de véhicules autorisés en fonction de ces critères. Deux classes semblent la seule solution possible. La difficulté est liée au fait que la dérive progressive des puissances ne permet plus de disposer d’un choix important de véhicules dont la vitesse maximale est inférieure à 130 km/h. Il existe cependant un nombre suffisant de véhicules dont la puissance maximale est inférieure à 90 ou 100 chevaux, c’est à ce niveau que devrait se situer le seuil entre les deux classes. Il peut être exprimé en kilogrammes par cheval, par exemple 15 kilogrammes par cheval au minimum, pour ne pas pénaliser les familles qui ont besoin d’un véhicule relativement spacieux.
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Créer une infraction spécifique pour sanctionner l’usage du téléphone au volant
Enoncé du problème
Le développement de l’usage du téléphone en conduisant pose un problème de sécurité routière qui est maintenant bien documenté. Il concerne aussi bien le téléphone dit « mains libres » que le téléphone portable que l’on tient à la main. Il est indispensable de sanctionner cet usage par une infraction spécifique permettant un retrait de points du permis.
Objectif de la proposition
Créer une infraction spécifique pour sanctionner l’usage de tous les types de téléphones dans un véhicule qui n’est pas arrêté à un emplacement où le stationnement est autorisé.
Avantages et gains attendus
Eviter de laisser s’installer une habitude incompatible avec la sécurité routière. Compte tenu du développement du téléphone portable, son usage abusif et dangereux sur les routes peut représenter plusieurs dizaines, voire une centaine de décès évitables. Les Québecois estiment à 3% la proportion d’accidents liée à l’usage du portable et les taux d’équipement au Québec sont comparables à ceux observés dans notre pays.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Le premier inconvénient est de priver les usagers de la route d’une commodité dont le développement rapide a prouvé lintérêt, mais il est possible de combiner l’apport du téléphone portable et la sécurité routière en utilisant les facilités d’enregistrement des appels dans une messagerie vocale et en rappelant son interlocuteur.
Le second inconvénient est la perte de recettes pour les opérateurs de téléphonie mobile. Cet argument, associé à l’évaluation du coût de la privation d’usage pour les utilisateurs de portables a été largement utilisé aux USA pour s’opposer à des sanctions spécifiques. Les évaluations qui avaient été faites avaient largement surestimées la fraction d’appels passés d’un véhicule, en outre il est abusif d’imaginer que tous ces appels ne peuvent être différés sans conséquences économiques. Les utilisateurs peuvent adapter l’usage aux contraintes de la sécurité routière. Il est cependant évident qu’ils ne peuvent à la fois conduire et téléphoner et que la valorisation du temps perdu dans les transports routiers par une activité professionnelle exercée au téléphone ne peut être une pratique acceptable.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
La conduite automobile est une tâche complexe qui impose une attention exclusive. Distraire le conducteur par un appel téléphonique est dangereux et ce risque est maintenant documenté par les études accidentologiques. C’est la période contemporaine du début de l’appel qui est la plus dangereuse, l’usager étant brutalement perturbé dans son attention et sa capacité de s’adapter aux conditions du moment. Cette particularité explique pourquoi le téléphone mains libres n’est pas plus favorable à la sécurité routière que la forme habituelle du portable qui mobilise une main. Le problème n’est pas la privation de l’usage d’une main pour atteindre des commandes, mais un problème d’attention et de capacité de réaction appropriée. L’argument de perturbations semblables lors de l’usage d’un autoradio ou d’une simple conversation avec un passager n’est pas pertinente car dans le cas de l’écoute d’un autoradio, la procédure n’est pas interactive, le conducteur n’est pas sommé d’avoir à donner une réponse et la seule période délicate est celle concernant les manœuvres de recherche d’une station, même si elle est facilitée par les touches préprogrammées. Elle est cependant entièrement commandée et exercée par le conducteur qui choisit le moment pour le faire. Pour la conversation avec les passagers, elle est également d’une nature très différente puisque le passager est dans le véhicule, il est donc capable de tenir compte de l’environnement décisionnel et de s’adapter à la situation. Il saura se taire aux moments où il faut laisser au conducteur toutes ses capacités d’agir. C’est lors d’interventions concernant des enfants à bord que l’on constate des accidents liés au fait que le conducteur (souvent la conductrice) doit exercer alors une tâche de surveillance qui peut se révéler incompatible avec la conduite.
Le niveau de surrisque est important, dans l’étude de Laberge-Nadeau faite au Québec, les utilisateurs fréquents du portable ont un risque multiplié par un facteur allant de deux à cinq suivant les méthodes d’études utilisées.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
En attendant d’éventuels systèmes automatiques interdisant l’usage d’un portable dans un véhicule dont le moteur tourne, la seule solution est de sanctionner l’usage d’un téléphone portable en conduisant par la création d’une infraction spécifique avec retrait de points du permis. Ce retrait devrait être de deux points. Cette mesure est plus cohérente avec la nature du risque qui n’est pas liée au fait que l’on va avoir les mains occupées par cette pratique mais à la perturbation de l’attention nécessaire à une tâche complexe.
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Assurer l’identification des risques liés à l’infrastructure par une expertise de l’ensemble du réseau
Enoncé du problème
Parmi les quatre éléments qui contribuent à la sécurité routière, le véhicule, l’usager, le système de contrôle/sanctions et l’infrastructure, ce dernier élément semble une affaire de spécialistes n’appelant pas d’action générale spécifique. En réalité aucune institution ne peut se passer d’une évaluation de son activité et il est indispensable d’avoir en permanence une observation critique de l’infrastructure permettant d’identifier des facteurs de risques et de les corriger sans attendre l’accident. Cette mesure avait été proposée en 1989 par la commission qui avait rédigé le livre blanc de la sécurité routière sous la forme suivante : « mise en place aussi rapide que possible d’un contrôle technique obligatoire, périodique et indépendant des maîtres d’ouvrage, des réseaux de voierie de l’Etat et des collectivités locales ». Elle n’a jamais été mise en œuvre, sauf pour les infrastructures nouvelles qui sont justement celles qui n’imposent pas une telle expertise, les ingénieurs qui les conçoivent connaissant maintenant les règles de production d’une infrastructure sûre.
Le refus de l’expertise technique est d’abord le refus d’avoir à assumer un risque identifié. Cette situation n’est pas propre à l’aménagement routier, le développement de ce que l’on a appelé la judiciarisation des risques, qui n’est que la nécessaire possibilité pour une victime de faire rechercher la faute éventuelle pouvant être à l’origine du dommage qu’elle a subi, se manifeste dans tous les domaines de la société. La réduction des risques qui est observée dans la plupart des domaines où l’homme peut exercer une fonction en relation avec la sauvegarde, et donc éventuellement avec la destruction de la vie, sont concernés, notamment l’insécurité liée à l’infrastructure routière. La distinction récente dans le code pénal caractérisant les délits non intentionnels d’une causalité directe et d’une causalité indirecte n’a pas modifié cet état de fait. Le point important dans le cas de la causalité indirecte est que le responsable savait que la sécurité de personnes était engagée par son action ou son inaction et qu’il n’a pas agi pour réduire voire supprimer le risque.
Objectif de la proposition
Rendre obligatoire l’expertise de l’ensemble du réseau routier par une structure spécialisée indépendante des maîtres d’œuvre et des maîtres d’ouvrage, utilisant des méthodes et des critères définis par l’Agence française de sécurité routière.
Avantages et gains attendus
Corriger des anomalies évidentes qui sont souvent faciles à modifier, mais qui sont actuellement laissées en l’état, même quand des accidents graves ont prouvé leur caractère nuisible. Quand une princesse anglaise s’est tuée sous le tunnel de l’Alma avec deux autres personnes, il était facile de mettre en évidence le rôle de la vitesse d’un véhicule conçu pour faire des excès de vitesse et de l’alcoolisation du chauffeur, peu de commentaires ont porté sur le danger inacceptable provoqué par la présence d’une série de piliers en béton à quelques centimètres de la chaussée. Trois tunnels se succèdent sur cette partie des quais de Seine, l’un est correctement traité avec un séparateur médian continu en béton, un second n’a aucun séparateur ce qui peut provoquer des chocs frontaux en cas de perte de contrôle, celui du pont de l’Alma présente une succession de piliers en béton sur un trottoir légèrement surélevé alors qu’il est nécessaire de placer entre chaque pilier un muret séparateur en béton, ce qui aurait un coût minime et ne présenterait aucun inconvénient.
Quand un texte réglementaire a défini les normes qui devaient être respectées pour implanter un ralentisseur en dos d’âne, cet aménagement efficace pour imposer la réduction de la vitesse dans certaines conditions a pu enfin optimiser ces possibilités et cesser d’être soit un piège pour les usagers non avertis, soit à l’opposé un symbole inefficace pour les habitués. La pente de 10 centimètres sur un mètre était devenue une notion constante empiriquement perceptible par l’usager. Malgré ce progrès un certain nombre de ralentisseurs non conformes existent, d’autres sont même implantés en contradiction avec la normalisation. Il est nécessaire d’avoir une expertise qui indique les corrections à faire, sans attendre qu’un utilisateur piégé par un dispositif non conforme demande réparation des dommages subis. Contrairement à ce que l’on peut craindre, l’évaluation n’est pas un risque pour les aménageurs, c’est à l’opposé une protection. Il devient impossible de leur reprocher un manquement à une règle ou un savoir faire qui n’a pas été signalé lors de l’expertise.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Une telle pratique n’est pas l’expression d’une méfiance vis-à-vis de ceux qui assurent actuellement le développement et la maintenance des infrastructures, l’évaluation est d’abord un stimulant qui permet de reconnaître et de valoriser les réalisations de qualité et contribue à faire émerger les meilleures solutions possibles pour résoudre des problèmes parfois difficiles. Il faut donc abandonner la notion destructrice « d’espace réservé » à l’intérieur duquel seul le décideur aménageur fait des choix et les met en œuvre.
La crainte des responsables d’infrastructures est d’être soumis à des inspections qui concluraient à la modification nécessaire de très nombreux éléments de l’infrastructure qu’ils ont en charge. En l’absence de moyens financiers pour réaliser ces modifications, ils se trouveraient exposés à un choix impossible entre la responsabilité encourue en l’absence de réalisation des modifications (faute caractérisée liée à la connaissance d’un risque sur lequel on n’agit pas) et l’impossibilité de les financer. Ce problème a été évoqué chaque fois que la mesure a été proposée et il est d’une importance si évidente qu’une fiche de proposition lui sera consacrée intitulée : Organiser le financement des modifications à apporter aux infrastructures pour accroître la sécurité
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Toutes les activités humaines dans des domaines techniques comportant une grande variété de situations et utilisant un savoir faire peuvent améliorer la qualité de leur production par l’évaluation. Les disciplines médicales ont été parmi les premières à développer ce retour permanent d’expérience et il est maintenant devenu indispensable, même si des réticences se manifestent encore à accepter une activité qui a une dimension de contrôle. L’évaluation des politiques publiques est une nécessité reconnue, et la qualité des infrastructures routières est un thème se prêtant particulièrement bien à une vérification sur le terrain. La lisibilité d’une voie est un élément important de la sécurité routière, un usager parcourant une route qu’il ne connaît pas doit percevoir l’homogénéité et la continuité des concepts qui ont présidé au choix des différents aménagements. Il ne doit pas être surpris par des ruptures dans la typologie de cette voie, par des rayons de courbes très différents, des signalisations inappropriées, ni être mis en danger par un réverbère mal placé. En pratique, la diversité des aménageurs n’est pas favorable à cette facilitation de la tâche de l’usager et à sa protection. Outre le défaut d’homogénéité dans le traitement d’un parcours, les malfaçons ponctuelles, comme celle du tunnel de l’Alma, sont particulièrement fréquentes, notamment en ce qui concerne l’implantation des obstacles fixes verticaux. L’importance de ce problème dans la mortalité routière est telle qu’il sera l’objet d’une proposition particulière.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Un texte législatif complété par une réglementation est nécessaire. Il peut reprendre les obligations créées dans les textes antérieurs en les étendant à l’ensemble du réseau ouvert à la circulation. Les règles de bonne pratique de ces expertises doivent être fixées par l’Agence française de sécurité routière, s’appuyant sur les compétences des organismes publics (CERTU, SETRA, CETE) et sur les productions de la recherche accidentologique. Un délai d’une année serait acceptable pour réaliser cette mesure.
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Organiser le financement des modifications à apporter aux infrastructures pour accroître la sécurité
Enoncé du problème
L’expertise technique de l’ensemble des infrastructures routières est une nécessité. Il est impossible de nier son utilité en prétendant que les différents services qui ont en charge la maintenance des infrastructures connaissent leurs caractéristiques et planifient leur amélioration en fonction de l’urgence et de l’importance du risque d’une part et de leurs moyens financiers d’autre part. La proposition d’expertise périodique de l’infrastructure avait était faite dans le livre blanc sur la sécurité routière de 1989 (voir fiche de proposition spécifique sur ce thème). Elle n’a pas été adoptée par le Gouvernement de l’époque et elle a été rejetée quand des parlementaires ont tenté de l’introduire dans la législation. L’argument majeur opposé à son adoption a été le risque pour un responsable, notamment pour un maire disposant de faibles moyens, d’être pris entre une expertise concluant à la nécessité de faire des travaux sur une voierie comportant des caractéristiques dangereuses susceptibles d’être aménagées et son incapacité à les financer. Le problème du financement nécessaire pour modifier une infrastructure après une expertise est donc l’obstacle à supprimer.
Objectif de la proposition
Définir un cadre pour le financement de mesures de sécurité routière portant sur la voierie et dont la nécessité apparaîtrait à la suite d’une expertise de l’infrastructure qui serait rendue obligatoire par la législation.
Avantages et gains attendus
Si le problème financier était résolu et faisait appel à un mécanisme équilibrant les dépenses entre les différents niveaux possibles (commune, département, région, Etat), l’expertise technique apparaîtrait comme un élément indispensable de la réduction de l’insécurité routière. Dans l’état actuel des choses, les responsables de la voierie ne veulent pas qu’un facteur d’insécurité soit identifié sans qu’ils aient les moyens financiers de le supprimer. Le risque de poursuite dans le cadre des délits non intentionnels devient une obsession des décideurs locaux, même si le risque réel demeure faible, et il faut en tenir compte en organisant des solutions pour le financement des modifications de voierie qui s’imposent. Le but de la proposition est de lever ce motif d’opposition au contrôle technique.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Mettre en place un dispositif d’expertise des risques liés à l’infrastructure pourrait provoquer une attitude protectrice des experts responsables de ce travail, destinée à éviter de déplacer la responsabilité de la commune ou du conseil général vers l’expert. Il faut donc prévoir une limitation de l’inflation des mesures correctives à prendre, en classant ces mesures en fonction du niveau d’urgence, et en prévoyant une planification de leur réalisation s’accordant aux possibilités des différents financeurs. Les principes des transferts possibles de ces financements doivent être définis par la réglementation pour éviter les conflits.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
L’argumentaire concernant l’importance de l’expertise a été précédemment développé. Il s’agit ici d’envisager le financement des modifications à apporter à l’infrastructure. L’erreur est d’imaginer que les voiries dangereuses imposent toutes des modifications importantes et donc coûteuses. La majorité d’entre elles relèvent de modifications dont le coût est faible, c’est le cas en particulier des multiples erreurs dans la signalisation ou dans la présence d’obstacles verticaux mal placés ou sans protection alors qu’ils peuvent être déplacés ou supprimés, ou de séparateurs médians mal conçus.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
La première mesure à prendre pour organiser le dispositif sera une loi rendant obligatoire l’expertise périodique des infrastructures routières par un organisme indépendant des maîtres d’ouvrage, ce qui ne signifie pas obligatoirement qu’il s’agira d’un organisme privé. Les conditions de réalisation de ces expertises seraient définies par l’Agence française de sécurité routière, permettant de les classer en fonction de leur niveau d’urgence et de leur coût. La loi indiquerait la mise en place par décret d’un mécanisme permettant aux responsables de l’infrastructure de bénéficier d’un mode de financement particulier quand ils doivent effectuer des aménagements coûteux et urgents. Le seuil permettant de bénéficier de ces moyens supplémentaires devrait être défini en fonction des investissements annuels de la commune. Il pourrait par exemple se situer entre 5 et 10% de ces investissements. Un seuil de même nature interviendrait au niveau du département et éventuellement au niveau de la région. Le financement complémentaire serait assuré par le budget de l’Etat, la solidarité nationale devant intervenir dans ce type de situation. Il est également possible d’envisager un financement complémentaire assuré par la structure administrative se situant immédiatement au dessus de celle qui doit financer des aménagements urgents dépassant ses capacités, donc le département si c’est une commune qui est concernée, et de ne faire intervenir l’Etat que dans le cas où un département verrait à son tour le total de ses contributions dépasser ses capacités de financement (le seuil étant déterminé par rapport à son budget d’investissements, comme dans le cas de la commune).
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Réduction des risques liés aux obstacles verticaux
Enoncé du problème
La prise en compte des obstacles fixes verticaux est insuffisante dans la prévention du risque routier. Souvent limité au débat absurde entre les partisans des arbres et ceux qui souhaitent les supprimer du bord des routes, ce problème majeur n’est pas traité avec les connaissances disponibles, alors qu’elles permettent d’une part d’identifier le risque, et d’autre part de mettre en œuvre les solutions efficaces permettant de le limiter.
Objectif de la proposition
Produire des règles obligatoires pour le traitement des obstacles fixes verticaux, les unes prospectives, les autres rétrospectives. Ces règles seraient appliquées dans le cadre de l’expertise obligatoire des infrastructures routières proposée par ailleurs.
Avantages et gains attendus
Nous connaissons l’ampleur du rôle des obstacles fixes dans la mortalité, elle est proche de 2000 tués. Cela ne signifie pas que toutes ces morts sont évitables, certaines pertes de contrôle auraient provoqué des accidents mortels en l’absence d’obstacle fixe pour arrêter le véhicule en perdition. Il s’agit cependant d’un des « gisements » de sécurité routière les plus importants dans le domaine de l’infrastructure.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Deux difficultés sont bien identifiées.
La première est le coût de certains aménagements. Il est possible d’équiper toutes les buses disposées sous les voies au niveau d’une intersection d’un dispositif anti-encastrement qui ferait remonter le véhicule au lieu de le bloquer sur une distance très courte, le traitement des extrémités de parapets est également possible. Pour de nombreux poteaux situés hors agglomération les mesures sont également connues, elles se rapprochent de celles applicables aux arbres, la distance entre la chaussée et le poteau a un rôle déterminant dans le niveau de risque, et d’autre part il est anormal de constater que l’on implante encore des poteaux dans l’axe d’une voie au niveau d’une courbe.
La seconde difficulté est spécifique des arbres qui constituent la source principale des décès par choc contre un obstacle fixe rigide. Il y a vingt ans que des données sont disponibles dans ce domaine et les enseignements n’ont toujours pas été tirés de ces connaissances. Des plantations récentes sont faites entre le fossé et la chaussée, à des distances dangereusement faibles. Cette situation est anormale dans un pays comme le nôtre qui a une faible densité de population, des jachères, et où l’on peut dans la majorité des cas obtenir un ou deux mètres supplémentaires pour conserver l’attrait esthétique des arbres tout en réduisant leur dangerosité.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Les données de l’accidentologie prouvent sans ambiguïté la gravité d’un arrêt sur une courte distance du fait d’un choc contre un obstacle fixe rigide. Les variations de vitesse sont accrues, donc les déformations de l’habitacle, avec fréquemment des intrusions qui réduisent l’efficacité des systèmes de retenue. Ce sont évidemment les arbres et les poteaux qui sont le plus souvent en cause (respectivement 61% et 16% dans les accidents hors agglomération), mais il faut être également attentifs au traitement des extrémités de parapets ou des buses qui interrompent brutalement une trajectoire dans un fossé, alors qu’il est possible d’envisager des systèmes de prévention par l’infrastructure dans ces deux cas particuliers représentant environ deux cents tués par an.
En ce qui concerne les arbres, le problème principal concerne les plantations existantes. Plusieurs solutions sont utilisables quand la qualité d’une plantation justifie son maintien. La protection par des glissières est envisageable quand il y a une distance suffisante entre la chaussée et l’arbre, on ne peut placer une glissière contre un tronc de platane. Les réductions de vitesse sont envisageables quand la protection est impossible, elles peuvent être particulièrement intéressantes aux entrées dans des agglomérations du sud de la France qui sont souvent précédées de plantations anciennes que les municipalités souhaitent conserver. Il est alors souhaitable d’avoir avant la plantation une limitation de vitesse par l’infrastructure (rond point ou chicane). Il est enfin possible dans les cas les plus difficiles de créer une autre chaussée pour les véhicules et de conserver la chaussée initiale pour une circulation de cycles et de piétons, là encore cette mesure peut être mise en œuvre sur des plantations précédant une entrée d’agglomération si les conditions d’urbanisation le permettent
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Etablir un guide de bonnes pratiques concernant l’implantation des arbres aux bords des routes, la mise en place de poteaux rigides et la protection de certains ouvrages de maçonnerie ou des têtes de buses. Il préciserait les conditions de la mise en œuvre des mesures recommandées dans le cadre de l’expertise généralisée et continue des infrastructures routières. Ce guide devrait d’abord préciser ce que l’on ne doit plus faire. Planter des arbres à faible distance d’une chaussée en 2002 est une entreprise irresponsable qui doit engager la responsabilité de celui qui l’a décidée. L’expertise de l’infrastructure devrait se prononcer sur toutes les plantations, précisant les solutions possibles pour les plantations existantes, en tenant compte de la volonté exprimée localement de conserver la plantation d’origine en assurant sa protection ou la réduction des vitesses, ou de procéder à une nouvelle plantation répondant aux exigences de sécurité.
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Réalisation d’un guide de bonnes pratiques des aménagements sécuritaires
Enoncé du problème
L’évolution des bonnes pratiques dans le domaine de l’aménagement des infrastructures destinées à améliorer la sécurité demeure une affaire de spécialistes. Les décideurs locaux, notamment au niveau communal, n’ont pas une vision claire de l’ensemble des solutions disponibles pour répondre aux problèmes qui leurs sont posés. Le recours aux cabinets d’études spécialisés demeure limité et souvent le « conseilleur » n’a pas la compétence requise pour proposer les meilleures solutions.
Objectif de la proposition
Développer la vulgarisation des dispositifs de sécurité routière relevant de l’infrastructure, pour faciliter l’action des services techniques des municipalités et contribuer au développement d’un « corps de données reconnues » dans ce domaine difficile et parfois discuté du fait de l’insuffisance des études sur l’optimisation des solutions.
Avantages et gains attendus
Rationaliser la mise en œuvre de la sécurité par l’infrastructure en évitant notamment les fausses bonnes solutions qui comportent un rapport avantages/inconvénients peu avantageux voire franchement défavorable du fait des risques induits. Certaines séparations de chaussées sont réalisées par des séparateurs agressifs qui se révèlent dangereux lors de pertes de contrôle. Le problème de la protection des cyclistes est également insuffisamment assuré dans de nombreuses réalisations de séparation des circulations, les bandes cyclables n’étant pas réalisées alors même qu’elles étaient possibles. La cohérence d’un aménagement, la prise en compte des différents types d’usagers, relèvent d’une technologie rigoureuse qui doit être mise à la disposition des acteurs.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Certains aménagements ne font pas l’unanimité, par exemple le dessin des chicanes est un objet permanent de débats entre spécialistes, l’équilibre étant parfois difficile à trouver entre le risque induit par l’aménagement et le bénéfice attendu. Il faut également que les données mises à disposition ne constituent pas un argument pour « économiser » le recours à des spécialistes pour dessiner et proposer un aménagement spécifique. Chaque situation a ses particularités et le savoir faire consiste à les intégrer toutes. Le catalogue et l’argumentaire qui accompagnerait chaque solution seraient destinés à faciliter des orientations et à faire un choix entre différentes solutions possibles. La phase d’application locale vient ensuite et il convient de bien faire apparaître la complémentarité entre ces deux approches.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Le livre blanc de sécurité routière de 1989 avait demandé que des initiatives soient prises pour réunir un ensemble de normes et de connaissances permettant de faciliter les décisions dans le champ de l’aménagement des infrastructures. La production du document « Sécurité des routes et des rues » en 1992 par un comité de rédaction, composé de membres du SETRA et du CETUR, (ancienne dénomination du CERTU) avait répondu à cette demande. Ce document a pris une place importante dans la présentation d’une problématique difficile. Il doit être mis à jour, certaines solutions nouvelles étant apparues, des travaux ayant précisé les indications de solutions déjà connues et décrites. Le problème des chicanes n’était pas envisagé dans cette première édition, le débat sur les implantations de ronds-points en entrée d’agglomération, comme solution permettant de marquer la transition entre la zone hors agglomération et la zone agglomérée, est réduit à une phrase qui la déconseille. Nous avons également connu des expériences très intéressantes dans le cadre de l’opération « ville plus sûre, quartiers sans accidents ». De nombreux aménagements urbains avaient été conçus et mis en œuvre, décrits notamment dans le fascicule publié en 1994 par le CERTU sous ce titre. De multiples colloques, réunions de structures spécialisées au niveau régional, produisent de la connaissance dans ces domaines, ils doivent être synthétisés et présentés pour démultiplier le savoir faire et éviter des réalisations qui peuvent aller de l’approximatif au calamiteux.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Il faut réunir des responsables de différents organismes d’Etat qui ont en charge ces problèmes, tant au niveau de la recherche que de la mise en œuvre, et leur demander de constituer un comité de pilotage définissant les objectifs à atteindre, en pratique la réalisation d’une nouvelle édition de l’ouvrage « Sécurité des routes et des rues ». L’association permanente de la recherche et des praticiens est une nécessité pour ce genre de travail, car il est indispensable d’apporter les preuves disponibles de l’efficacité de ce que l’on propose, et la première édition de l’ouvrage avait très bien assuré ce lien. Aucun texte réglementaire n’est nécessaire. Le coût sera principalement le temps de travail des différents partenaires qui s’associeront pour produire cet ouvrage. Il serait utile cependant de prévoir un financement spécifique pour le secrétariat et l’organisation des réunions communes. Les partenaires naturels d’une telle entreprise sont le SETRA, le CERTU, l’INRETS, mais aussi les CETE dans lesquels ceux qui ont mis en œuvre sur le terrain des aménagements spécifiques ont une expérience irremplaçable des difficultés qu’ils ont rencontrées et de l’efficacité des solutions retenues.
Le développement de cette mise à disposition d’informations peut prendre une forme différente de celle du livre. Les possibilités actuelles de réalisation de sites internet très extensifs, multipliant les illustrations, les plans, les schémas et surtout facilitant une recherche par type de problème, sont particulièrement favorables à ce genre de réalisation. Cette solution permettrait une synthèse des avantages des deux types d’ouvrages précités, les uns contenaient de nombreuses illustrations, alors que « Sécurité des routes et des rues » avait fait le choix de textes sans illustrations.
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Organiser et évaluer la « fin des indulgences »
Enoncé du problème
Périodiquement, un responsable de la sécurité routière conscient de l’importance d’un traitement équitable des contraventions et des délits routiers annonce que les PV ne « sauteront plus ». Mesure qui provoque immédiatement un scepticisme nourri d’expériences passées décevantes. Si l’on peut annoncer une nouvelle fois cette mesure, c’est donc que l’égalité devant la loi n’existe toujours pas. A l’issue du conseil des ministres du 16 octobre 2002, le porte parole du gouvernement à indiqué : « le Gouvernement a affiché sa volonté de mettre fin à toutes les formes d'indulgence en faveur des infractions routières, comme vient de le rappeler aux préfets le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. » Une telle annonce doit comporter une méthode d’application.
Objectif de la proposition
Organiser et évaluer la décision gouvernementale qui nous a été annoncée. Elle ne peut rester au stade de la déclaration d’intention, il convient d’agir avec précision et détermination pour éviter que dans quelques mois des exemples multiples d’interventions « réussies » fassent perdre toute crédibilité au gouvernement dans ce domaine, ce qui serait dommageable pour l’ensemble du programme gouvernemental.
Avantages et gains attendus
Réaliser une véritable révolution dans ce domaine, en rapprochant l’état de droit et la réalité. L’enjeu est considérable, il est connu que nos concitoyens sont particulièrement sensibles à la notion d’égalité. Les contraintes du code de la route ne sont acceptables que si elles s’appliquent à tous. Ce n’est pas le cas actuellement. L’enjeu est donc l’acceptation par les acteurs du système de contrôle et de sanction et plus largement par ceux qui ont une possibilité d’influence, d’accepter le principe de l’application stricte du code de la route à tous les usagers. La mesure a également une grande importance pour les policiers et les gendarmes qui n’acceptent pas que leur travail soit dévalorisé par les interventions visant à supprimer des poursuites. L’exigence d’équité assure le respect de leur tâche et cette notion est particulièrement importante pour les unités spécialisées.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Cette mesure fait perdre aux forces de l’ordre implantée localement une monnaie d’échange qui leur est précieuse pour conserver de bonnes relations avec un groupe important de personnes qui appartiennent soit au groupe des notables (élus, médecins, etc.), soit au groupe des proches et des relations, soit au groupe des « correspondants » (renseignements généraux notamment) qui sont des donneurs d’informations. Faute de pouvoir rémunérer tous les services rendus, la contravention routière est devenue une monnaie d’échange. Elle cesse d’avoir ce rôle lors du retour à l’équité par la suppression des interventions productrices d’indulgence, c’est à dire d’un passe-droit inacceptable qui supprime l’efficacité dissuasive donc préventive du code de la route.
Il est évident que la contrainte va également s’exercer au niveau des responsables nationaux. Les exemples de « suivis » de ministres par des motocyclistes notant les excès de vitesse et les infractions aux autres règles de circulation vont se multiplier pour mettre en évidence la distance entre la « France d’en haut » et celle « d’en bas ».
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Après les études de l’INRETS et de Claudine Perez-Diaz (Jeux avec des règles pénales – le cas des contraventions routières – Editions L’harmattan 1998). Les résultats des études réalisées par la commission Ternier sur l’évaluation du système de contrôle et de sanctions vont réactualiser ces données et rendre la situation difficilement gérable si la mise en œuvre de la décision gouvernementale n’est pas effective.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Il s’agit d’une décision « sans coûts ni délais », elle n’en est pas moins délicate à mettre en œuvre de façon crédible (et elle est encore plus dangereuse si elle est annoncée sans être effective). Il serait possible d’envisager la mise en œuvre suivante :
dans le communiqué rendu public lors du CISR de décembre, publier une lettre d’instruction du Premier ministre précisant les conditions d’application de l’instruction annoncée à l’issue du Conseil des Ministres du 16 octobre.
ces conditions seraient les suivantes :
identification des procès verbaux par une méthode rendant possible le contrôle des infractions relevées (carnet à souche ou autre méthode),
interdiction de toute tentative d’intervention d’un fonctionnaire public visant à faire interrompre une procédure consécutive à une infraction routière, quels que soient les motifs de cette intervention. Tout fonctionnaire intervenant dans ce sens sera l’objet d’une procédure disciplinaire,
interdiction de prendre en compte une telle démarche, tout document écrit concernant une telle intervention sera transmis à la commission départementale de contrôle,
interdiction de classement sans suite d’une procédure consécutive à une infraction routière sans une trace écrite motivant la décision et identifiant l’auteur de la décision. Chaque structure ayant la possibilité de procéder à ce classement assurera le dénombrement annuel de la proportion de classements sans suite et le transmettra à la commission départementale de contrôle,
les personnes concernées par une procédure ne peuvent exprimer leurs requêtes visant à obtenir un classement sans suite de la procédure (erreur matérielle manifeste lors du constat, ou cas de force majeure devenus exceptionnels depuis le développement des SAMU et des SMUR), qu’auprès des services du parquet territorialement compétent,
mise en place dans chaque département d’une commission permanente de quatre membres (un représentant du parquet, un du préfet, un de la gendarmerie et un de la police) assurant l’évaluation du respect de l’instruction. Elle procède à des vérifications par tirage au sort (des unités et des jours des contrôles) pour s’assurer que les infractions constatées sont conduites à leur terme, sauf décision motivée prise par les seules personnes habilitées à le faire),
évaluation annuelle de l’action de cette commission sous une forme qui s’inspirera du rapport de la commission d’évaluation du système de contrôle et de sanction (commission Ternier),
suppression des services de l’Assemblée Nationale et du Sénat qui traitent ces interventions.
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Etendre la notion de responsabilité du propriétaire d’un véhicule
Enoncé du problème
La surveillance du respect du code de la route, notamment de la vitesse, par des systèmes automatisés pose le problème de l’identification des personnes qui conduisent un véhicule constaté en infraction quand il ne s’agit pas du propriétaire. S’il suffit à ce dernier d’indiquer qu’il n’était pas le conducteur, sans avoir à préciser à qui il avait confié sa voiture, une fraction des usagers utiliseront cette faille dans l’organisation du système pour échapper aux sanctions.
Objectif de la proposition
Etendre la notion de responsabilité du propriétaire pour compléter les dispositions de la loi du 18 juin 1999 qui avait instauré une responsabilité pécuniaire quand le conducteur ne pouvait être identifié.
Avantages et gains attendus
Assurer l’équité du système de contrôle et de sanctions en évitant qu’une fraction des usagers n’utilise les difficultés d’identification d’un conducteur, alors que le propriétaire sait à qui il a confié sa voiture, ou devrait le savoir. Cette disposition est indispensable si l’on veut agir sur la dérive des vitesses des deux roues de forte puissance qui ne peuvent être photographiés que par l’arrière. La faible crédibilité du contrôle de la vitesse des deux roues est un facteur de risque majeur pour les utilisateurs de motos puissantes qui ne sont pas dissuadés d’utiliser les possibilités de leur instrument.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Chaque fois que cette mesure a été envisagée, l’argument qui lui a été opposé est celui de la « délation ». Il ne serait pas acceptable que dans un pays démocratique le propriétaire d’un véhicule soit tenu de dire à qui il l’a confié ce véhicule, lorsque ce dernier a été identifié en situation d’infraction, par exemple en excès de vitesse ou lors du franchissement d’un stop ou d’un feu rouge. Quand le débat devant le Parlement s’est tenu au printemps 1999, pour étendre cette notion de responsabilité du propriétaire, qui n’était auparavant acceptée que pour les infractions aux règles du stationnement, cette notion péjorative de délation, de dénonciation a été avancée par les adversaires de la modification de la législation.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
La jurisprudence antérieure à la loi de 1999 aboutissait à abandonner les poursuites quand le propriétaire d’un véhicule observé en infraction prétendait ne pas savoir qui le conduisait au moment où l’infraction avait été commise, et que les documents en possession des gendarmes ou des policiers ne permettaient pas de l’identifier comme le conducteur. Cette jurisprudence était la conséquence de la rédaction de l’article L.121.1 du code de la route qui indique que seul « le conducteur d’un véhicule est responsable pénalement des infractions commises par lui dans la conduite du véhicule ». L’article L.121.2 institue la responsabilité financière du propriétaire pour les infractions aux règles du stationnement. Après l’adoption de la loi du 18 juin 1999 un article L.121.3 du code de la route prévoit que « par dérogation aux dispositions de l’article L.121.1, le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l’amende encourue pour les contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées et sur les signalisations imposant l’arrêt des véhicules, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol ou de tout autre événement de force majeure ou qu’il n’apporte tous éléments permettant d’établir qu’il n’est pas l’auteur véritable de l’infraction ». Cette responsabilité est uniquement pécuniaire, les décisions ne sont pas inscrites au casier judiciaire et il n’y a pas de retrait de points du permis. La nécessité d’identifier les auteurs d’infractions conduit nécessairement à pouvoir exiger du propriétaire, soit de reconnaître qu’il était le conducteur du véhicule au moment des faits constatés, soit d’indiquer à qui il avait confié ce véhicule, pour que le conducteur puisse assumer la responsabilité des actes commis lors de cet usage. Actuellement les dispositions retenues dans la circulaire du 16 juin 2000 pour tenter d’établir qui était le conducteur sont lourdes. Il faut que le parquet du tribunal de police du lieu de résidence engage des poursuites par voie de citation directe ou d’ordonnance pénale et une enquête devra être entreprise pour vérifier les dénégations du propriétaire et tenter d’établir l’identité du conducteur. Cette procédure est difficile, longue et coûteuse et il n’y a que deux moyens pour dissuader d’adopter ce comportement de protection de l’auteur du délit, sanctionner très sévèrement les faux témoignages qui sont la règle dans ce genre de circonstances, ou modifier le code de la route pour que l’identification du conducteur d’un véhicule soit de la responsabilité du propriétaire, c’est cette dernière mesure qui est proposée.
La défense abusive des contrevenants utilise constamment le prétexte de la défense des libertés, par un abus d’usage du mot liberté pris au singulier, comme s’il s’agissait d’un concept unique se suffisant à lui même, alors qu’il se décline sous de multiples formes conduisant la société à hiérarchiser des libertés. L’enjeu du débat sur la responsabilité du propriétaire d’un véhicule est bien le choix entre deux libertés, celle de vivre pour des usagers de la route qui ont le droit de bénéficier des avantages d’un code définissant les règles de la circulation, et la liberté de confier un véhicule à un conducteur qui ne respecte pas ces règles, sans avoir à l’identifier quand l’infraction a été constatée. Il y a divers procédés utilisables pour que le propriétaire n’ait pas à « dénoncer » le conducteur, si l’on veut éviter ce terme souvent utilisé pour qualifier ce qui n’est qu’un faux témoignage (le propriétaire dit ne pas savoir qui conduisait le véhicule au moment des faits alors qu’il le sait parfaitement), le plus simple est la tenue d’un carnet de bord qui doit être renseigné quand le véhicule est utilisé par un autre usager que le propriétaire. Il faut remarquer que dans le cas de location des véhicules, le loueur utilise constamment la possibilité de fournir les renseignements sur l’identité du locataire
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Modification du code de la route dans sa partie législative. L’article L.121.3 serait modifié comme suit : «Quand un véhicule est utilisé par d’autres conducteurs que son propriétaire, ou quand le certificat d’immatriculation mentionne les noms de plusieurs personnes, un carnet de bord, établi suivant des modalités précisées par arrêté, doit permettre d’identifier le conducteur quand une infraction a été constatée lors d’un contrôle effectué sans interception du véhicule. Le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule sera considéré comme étant le conducteur de ce véhicule si ce document ne permet pas d’identifier un autre auteur de l’infraction, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol ou de tout autre événement de force majeure. »
Cette modification du code de la route peut être soumise au Parlement au cours du premier semestre 2003. Le coût de cette mesure est nul. Elle permet à l’opposé de simplifier un système complexe, coûteux et peu efficace qui facilite le non respect des règles.
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Considérer l’amélioration, du fichier des cartes grises et des permis de conduire comme une priorité absolue, commandant l’efficacité de la réforme du système de contrôle et de sanctions.
Enoncé du problème
Le système de contrôle et de sanctions ne peut fonctionner avec équité si une fraction importante des usagers est inaccessible du fait de l’absence de mise à jour des fichiers produits lors de l’établissement des documents concernant le conducteur ou le véhicule. Les erreurs sont parfois le résultat d’une fraude délibérée, notamment par la non mutation des cartes grises en cas de changement de domicile, ou par l’indication d’une fausse adresse. L’étude des procédures d’accidents graves indique qu’une carte grise sans adresse actualisée du propriétaire est souvent associée à la conduite sans permis ou sans assurance. Il s’agit donc d’un véritable « marqueur de risque routier » qu’il convient de maîtriser. L’enjeu n’est pas seulement financier (améliorer le recouvrement des infractions), c’est également un enjeu de sécurité routière puisqu’il s’agit de supprimer une impunité qui favorise le non respect des règles.
Objectif de la proposition
Se donner les moyens d’avoir des fichiers de cartes grises et de permis de conduire actualisés. Utiliser l’opportunité de cette mise à niveau pour introduire des méthodes facilitant le travail des policiers et des gendarmes, notamment l’usage de codes barre sur ces deux documents en attendant les cartes à puces qui constituent la meilleure solution d’avenir (comme pour les cartes bancaires et la carte vitale des assurés sociaux)
Avantages et gains attendus
Les échecs de recouvrement d’amendes ou de retraits de points du permis de conduire sont provoqués principalement par des données erronées ou périmées dans les fichiers concernant les deux documents, alors que la qualité de ces données est déterminante dans l’efficience du système de contrôle et de sanctions, le permis de conduire et la carte grise. Améliorer la qualité des fichiers qui répertorient les données associées à ces deux documents permettra de supprimer l’impunité d’usagers négligents ou qui ont su organiser leur « invisibilité », et donc de contribuer à l’équité du système de contrôle et de sanctions. Le gain pour le trésor public peut être estimé à près de 10% du montant des amendes. Ce résultat s’associera à un gain d’efficacité dans la dissuasion, notamment lors des contrôles automatisés qui sont appelés à se développer.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en oeuvre
Il n’y a aucun inconvénient à avoir des fichiers exacts, seulement des avantages. Les difficultés seront liées aux habituelles confusions de valeurs entre la liberté individuelle et la tenue de fichiers nominatifs légaux, conformes aux exigences de la CNIL, dont l’actualisation et la vérification périodique permettrait d’éviter les fraudes.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Trois fichiers principaux contiennent les données utilisées pour produire les documents indispensables aux utilisateurs de véhicules :
le fichier des permis de conduire,
le fichier des cartes grises qui contient l’adresse permettant de joindre le propriétaire, notamment en cas d’infraction reconnue par des moyens photographiques,
le fichier de l’assureur qui contient l’adresse permettant d’envoyer chaque année l’attestation d’assurances.
Il est indispensable que les responsables de la maintenance de ces fichiers puissent assurer leur exactitude et donc les vérifier. Le fichier des permis de conduire doit être actualisé en supprimant les références à des personnes décédées. De très nombreux faux permis étant en circulation, il serait utile de donner une validité limitée au document établissant la possession du permis de conduire, par exemple une durée identique à celle des cartes d’identité (10 ans). Une telle réforme devrait accompagner la rénovation technique du fichier des permis de conduire. Il est indispensable que la multiplication des consultations en temps réel du fichier par les policiers et les gendarmes, rendue possible par le développement de l’informatique embarquée et des transmissions, soit assurée avec des temps de réponse très courts. Le problème est identique pour le fichier des cartes grises. Les modifications récentes des justifications de domicile lors de la délivrance des cartes grises facilitent la fraude et il est indispensable de revenir à l’exigence de la preuve documentée de la domiciliation, une attestation sur l’honneur a pour seul résultat de favoriser la fraude alors qu’il est très facile de faire établir une carte grise avec deux documents prouvant la domiciliation si elle est différente de celle de la carte d’identité. En l’absence d’un contrôle strict de la qualité de ce fichier, l’équité de la sanction en cas d’infraction va se dégrader et plus le système de contrôle automatisé va se développer et devenir efficient, plus les tentatives d’échapper aux sanctions se développeront.
La modernisation de ces fichiers doit s’accompagner de modifications pratiques et techniques destinées à faciliter le travail des policiers et des gendarmes qui font des contrôles avec interception et établissent des procédures écrites longues et fastidieuses. L’usage des codes barres est une méthode éprouvée pour faciliter le rattachement d’un document papier à une base de données. Avec un ordinateur et un lecteur de codes barres, quelques secondes permettent d’assurer la saisie des données concernant le conducteur et son véhicule en évitant des erreurs de copie et en permettant de vérifier en temps réel si le document est à jour. Ce système peut avoir une efficacité suffisante pour le justifier dans la période de quelques années qui nous sépare des cartes grises européennes dotées d’une puce électronique.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Quand des fichiers complémentaires concernant un problème unique (la validité des documents obligatoires pour posséder et conduire des véhicules) sont comparés entre eux pour établir la cohérence et la validité des données, il convient d’optimiser la procédure en commençant pas le document qui a la probabilité la plus élevée d’être à jour. Il s’agit de l’attestation d’assurances qui est un document établi annuellement. La carte grise a une durée de vie moyenne de plusieurs années et le permis de conduire de plusieurs décennies. Il faut donc partir des données des assureurs qui doivent avoir accès au fichier des cartes grises pour vérifier que l’adresse de leur assuré est identique à celle indiqué sur le fichier des cartes grises. En cas de discordance, ils seraient tenus de vérifier les raisons de cette diférence et obtenir éventuellement la régularisation de la carte grise avant de délivrer l’attestation d’assurances. L’assurance des véhicules est une obligation légale, il n’est pas anormal d’exiger des compagnies d’assurances le contrôle de la concordance des renseignements disponibles sur les documents légaux et sur leurs documents propres. Actuellement les assureurs
Pour le permis de conduire plusieurs possibilités sont envisageables et il convient d’analyser leurs particularités pour faire le choix le plus simple, le plus efficace et le moins onéreux. Etablir un nouveau permis avec un carte à puce serait la solution la plus ambitieuse, il est possible pendant la période transitoire d’apposer une étiquette code barre autocollante sur le permis actuel, avec en contrepartie l’actualisation de l’adresse du titulaire. L’échange du permis actuel avec le futur permis pourrait être étalé sur une période de deux à trois ans. La nouvelle formule aurait l’avantage de permettre l’usage d’un document moins fragile et plus sécurisé que l’ancien.
Le coût pour le budget de l’Etat d’une telle opération dépend évidemment des accords entre les partenaires (préfectures, assureurs) et des choix techniques effectués, une fois les textes définissant ces actualisation de fichiers établis et les exigences légales satisfaites.
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Adopter le projet de décret relatif à l’immobilisation des véhicules qui ne sont pas régulièrement immatriculés.
Enoncé du problème
Les peines privatives de liberté ne sont pas adaptées à la délinquance routière qui est une délinquance de masse. Les sanctions financières ont une efficacité, mais elle dépend des revenus des personnes concernées, si ceux-ci sont très élevés, la dissuasion par l’amende est faible. Dans ce contexte ce sont les sanctions qui concernent le droit de conduire (retrait de permis) et la disponibilité des véhicules (immobilisation) qui sont les plus dissuasives. Un projet de décret concernant l’immobilisation des véhicules dont l’immatriculation n’est pas en accord avec les règles en vigueur, notamment les véhicules achetés à l’étranger par des résidents français, mais surtout en cas de changement de propriétaire, a été préparé, il est actuellement « immobilisé ». Ce texte peut paraître d’un intérêt limité, il est en réalité très important que le fichier des cartes grises soit à jour et exact pour assurer l’application équitable des règles.
Objectif de la proposition
Adopter le projet de décret facilitant l’immobilisation du véhicule d’usagers en infraction par rapport aux règles sur l’immatriculation, qui est totalement rédigé mais n’a pas achevé son parcours jusqu’au Journal Officiel.
Avantages et gains attendus
Eviter que des usagers n’abusent de l’immatriculation provisoire à l’étranger de leur véhicule, ou n’assurent pas la régularisation de la carte grise de véhicules achetés d’occasion, dans le but d’échapper aux risques d’être sanctionnés pour des infractions au code de la route commises en France.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Aucune, le nombre de cas ne sera pas tel que l’administration ait un problème de stockage aggravant la situation des fourrières, il s’agit de dissuader les usagers d’avoir recours à cette pratique par un texte créant une sanction efficace adaptée à ce type d’infraction.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Les études sur l’aboutissement des sanctions mettent en évidence, parmi les causes d’échec, l’absence de régularisation de la mutation en cas d’achat d’un véhicule d’occasion, ou l’immatriculation provisoire d’un véhicule acheté dans un pays étranger, avec une impossibilité d’assurer le recouvrement de l’amende, les adresses ne correspondant pas avec celles permettent pas de joindre l’usager en infraction. Le développement des contrôles automatiques sans interception va aggraver les conséquences de cette absence de respect de la réglementation.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Signature et publication du décret qui est préparé.
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Donner aux municipalités des facilités pour utiliser les contrôles automatisés de la vitesse.
Enoncé du problème
Maîtriser la vitesse en agglomération est un objectif majeur dans le cadre d’une politique de sécurité routière. De nombreuses municipalités souhaitent pouvoir contrôler la vitesse par des systèmes automatisés, de préférence à des investissements importants dans le domaine de la sécurité par l’infrastructure, qui ne peuvent se concevoir que sur le long terme et sont parfois difficiles à réaliser pour des raisons techniques dans certains quartiers. Ces municipalités ont une mauvaise connaissance des moyens actuels et surtout elles ne bénéficient pas d’un environnement organisé pour faciliter leur passage à l’acte.
Objectif de la proposition
Faciliter l’usage des systèmes automatisés de contrôle de la vitesse au niveau des municipalités,
Avantages et gains attendus
Rendre effectif la limitation à 50 km/h de la vitesse en ville.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
Il faut garantir la totalité du traitement de la chaîne allant du constat avec une caméra couplée à un radar à la rédaction et à l’expédition du document que va recevoir le contrevenant. Il faut ensuite que le système de recouvrement des sommes dues soit capable de traiter le flot d’activité engendré, et que le développement de ces systèmes automatisés ne l’encombre pas au delà de ses capacités de gestion. Le développement du système de contrôle automatisé sera étroitement lié aux simplifications de notre procédure générale de traitement des infractions au code de la route.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Nous sommes au début du développement de ces techniques. Quelques réalisations ont permis de comprendre la nécessité de développer ces méthodes et de les organiser rationnellement d’une extrémité à l’autre de la chaîne. Il faut maintenant développer leur mise en œuvre en facilitant le travail des collectivités locales qui souhaitent les utiliser.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Avoir au niveau national une capacité de conseil et d’aide à la décision dans le domaine des contrôles automatisés (utilisation du site internet du ministère de l’équipement allant des indications sur les matériels et leur prix, l’optimisation des conditions d’usage, jusqu’aux textes réglementant la mise en œuvre de ces dispositifs). Développer une cellule spécialisée au niveau départemental qui permettrait aux municipalités de disposer d’aides techniques et financières pour utiliser ce type de contrôle.
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Evaluer le coût matériel et humain d’une chaîne automatisée de contrôle automatisé de la vitesse et d’autres infractions pour pouvoir optimiser sa mise en œuvre en envisageant toutes les solutions possibles.
Enoncé du problème
Le développement de nouvelles méthodes de surveillance du réseau routier, capables de dissuader les usagers d’avoir des comportements infractionnistes apparaît comme une nécessité dans les pays industrialisés pour de multiples raisons. Les plus importantes sont :
le développement du trafic qui impose d’accroître les moyens en personnels si l’on souhaite conserver le même niveau de dissuasion avec les méthodes actuelles, alors que nous sommes dans une période où les ressources de l’Etat sont limitées,
la densité du trafic, qui rend difficile les contrôles de vitesse avec interception cette dernière pouvant se révéler dangereuse si les sites de contrôle ne sont pas soigneusement choisis, ce qui fait dire aux usagers que les contrôles se font dans des zones qui ne sont pas les plus dangereuses,
le développement de l’image numérique permettant des contrôles beaucoup plus faciles qu’avec des appareils traditionnels, car il n’est pas nécessaire d’avoir accès aux appareils pour récupérer des films et les recharger,
la surveillance permanente assurée par ces caméras permet d’atteindre un niveau de dissuasion qui réduit la proportion d’usagers en infraction avec une ampleur inaccessible aux techniques de contrôle traditionnelles. Un système de contrôle idéal est celui qui dissuade complètement de ne pas respecter les règles, l’objectif n’est pas d’accumuler les PV, mais de modifier les comportements !
Cependant les dispositions adoptées dans plusieurs pays, et les essais réalisés en France, mettent en évidence le risque majeur de développement de ces systèmes dans des conditions improvisées. Elles conduisent inévitablement à l’échec, l’ensemble de la chaîne de traitement de l’information n’ayant pas été dimensionné correctement, avec des techniques appropriées.
Objectif de la proposition
Explorer toutes les possibilités d’optimisation d’une chaîne de contrôle automatisée utilisant des caméras numériques couplées à des ordinateurs qui gèrent l’information et établissent les procédures.
Avantages et gains attendus
Eviter de placer des espoirs excessifs dans une technique qui semble résoudre toutes les difficultés inhérentes à une délinquance de masse, par un manque de rigueur dans la définition et la mise en œuvre pratique des contrôles automatisés. Le gain attendu est tout simplement la crédibilité du dispositif.
Inconvénients et difficultés envisageables pour sa mise en œuvre
La difficulté est d’inventer un ensemble de pratiques de gestion totalement nouveau et sortant des routines actuelles de traitement des infractions constatées. Greffer des techniques exploitant les ressources de l’automatisation pour atteindre l’exhaustivité sur des procédures existantes privilégiant l’action humaine et les contrôles rares et aléatoires, peut apparaître comme une première étape, précédant le développement d’une filière intégrée de traitement de l’information, allant du constat au paiement de l’amende. Ce choix de facilité ne peut conduire qu’à l’échec car les techniques automatisées sont incompatibles avec une gestion manuelle de certaines étapes de la procédure. Cette dernière ne peut que provoquer l’engorgement du système, en outre si les caméras ne sont pas actives en permanence, le niveau de dissuasion est plus faible.
Argumentaire (état de la question, données disponibles)
Même avec une très large information des usagers (sur les lieux où sont effectués les contrôles et par les médias locaux), la mise en œuvre de contrôles automatisés produit dans une phase initiale un accroissement très important du nombre d’infractions à traiter. Si le système de gestion de ces infractions n’a pas été dimensionné en conséquence, il faut interrompre les contrôles ou faire fonctionner les caméras de façon discontinue, ce qui va à l’encontre de l’objectif qui est de dissuader tout excès, la sanction étant automatique et inévitable. La difficulté est donc d’être capable de gérer rapidement toutes les infractions constatées. Il est évident que les unités de police ou de gendarmerie, qui verraient leurs activités actuelles accrues par la mise en place de caméras numériques couplées à des radars, seraient dans l’incapacité de gérer la bureautique se plaçant en aval par les méthodes traditionnelles. Il convient d’automatiser la totalité de la chaîne et l’obtention de cette cohérence entre tous les éléments de la gestion des infractions est une difficulté reconnue par tous ceux qui ont mis en œuvre de tels systèmes.
Une chaîne intégrée de contrôle de la vitesse est capable :
de repérer toutes les infractions par un contrôle permanent,
d’analyser les plaques d’immatriculation, la conversion de l’image analogique en données alpha-numériques assurant l’accès au fichier des cartes grises,
de rédiger la procédure correspondant à l’infraction constatée, et d’expédier vers le propriétaire du véhicule le document qui va lui indiquer la marche à suivre,
lors de la réception de la réponse, attestant par exemple le paiement de l’amende forfaitaire, fermeture de la procédure et transfert des informations à conserver vers les organismes ad-hoc ( par exemple un retrait de points du permis),
en cas de contestation et de refus de paiement de l’amende forfaitaire, transmission des données sous un format normalisé permettant d’entamer la procédure correspondante.
Conditions de mise en oeuvre (coûts, délais, organisation, partenaires, textes nécessaires...)
Il convient de ne pas avoir de position a priori dans un tel domaine et de privilégier le caractère opérationnel. La gestion d’un tel système impose des investissements, si l’Etat n’est pas prêt à les faire, il peut développer une sous-traitance du traitement de ces données, voire de l’investissement en matériel et de sa mise en place, comme il peut sous traiter la mise en fourrière d’un véhicule. Les garanties du respect des textes réglementaires peuvent être assurées par un encadrement étroit des prestataires par des représentants des organismes administratifs d’une part et des organismes judiciaires d’autre part.
Il est également nécessaire de ne pas avoir d’idées préconçues sur la taille des structures capables d’assurer une telle gestion, qu’elles soient publiques ou privées. Après une période où l’informatique de gestion faisait nécessairement appel à des sites centraux pourvus de calculateurs puissants (pour l’époque), une évolution s’est faite vers une informatique très décentralisée, parfois à l’excès, multipliant les difficultés de mise à jour des logiciels et les investissements en hommes, en logiciels et en matériel. Une nouvelle phase se dessine vers un retour à des systèmes centraux, facilité par le développement des télétransmissions de données cryptées.
Il convient donc de faire le bilan de l’existant dans les pays où les méthodes de contrôle automatisées ont été développées, de comparer les coûts suivant les processus mis en œuvre et le caractère opérationnel des choix effectués. Ces données seront comparées aux premiers retours d’informations concernant les sites pilotes français.