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Pourquoi la diminution des vitesses hors agglomération est la seule solution pour réduire à court terme l'effet de serre produit par la circulation
Les sorties de crises sont difficiles quand les exigences s’étendent, alors que les décideurs ne maitrisent qu’une faible partie des facteurs concernés. La situation peut en outre s’aggraver quand la précipitation et une connaissance insuffisante des problèmes réduisent la capacité d’argumenter et d’expliquer. Le facteur déclenchant est alors récupéré et noyé dans un tsunami de frustrations qui submerge des dispositifs aussi complexes et fragiles qu’une centrale nucléaire.
L’abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale sur les routes où l’on se tue le plus a exprimé la rupture avec l’indifférence et l’incompétence décisionnelle du gouvernement précédent qui avait laissé perdre 238 vies de janvier 2014 à novembre 2017. 245 ont été sauvées de novembre 2017 à novembre 2018, renouant avec le succès du programme initié par Jacques Chirac et coordonné par Rémy Heitz, qui avait divisé par deux la mortalité sur les routes de 2003 à 2008 et stabilisé la consommation de carburant alors que le trafic continuait de s’accroitre.
La décision du Premier ministre a été attaquée à la fois par le lobby de la vitesse et par des politiques qui ont instrumentalisé la mesure, décrite comme une décision des parisiens, méprisant les intérêts des habitants des « territoires » qui allaient perdre du temps sur les routes. Le contre sens était évident, ce sont sur les voies à l’approche des grandes agglomérations que les usagers perdent quotidiennement du temps et non dans les départements à faible densité de population où les voies sont libres et tuent le plus. L’accroissement réel des durées de parcours a été très faible.
Le Sénat s’est
déshonoré en créant une commission qui a exprimé une aptitude
exceptionnelle à la contorsion en s’opposant au 80 km/h, tout en
reconnaissant l’efficacité de la réduction de la vitesse en 2003.
Le sommet du ridicule a été atteint en proposant de maintenir à 90 les
voies les plus circulées et d’abaisser à 80 ou 70
« les routes accidentogènes"
L’application à la Haute-Saône a été décrite sans la moindre
analyse de la mortalité sur les routes de ce département. Le contre sens
était complet puisque c’est le trafic qui est le facteur accidentogène
le plus important, et non les caractéristiques techniques des voies
énumérées dans ce texte.
Le 80 km/h a
été une bonne décision. L’accroissement des taxes sur les carburants a
été une erreur initiant le conflit des gilets jaunes. L’usage de la
voiture est en grande partie contraint. Ce n’est pas le prix du litre de
carburant qui augmente en valeur, c’est le trafic. Un
litre d’essence valait 0,99 franc en 1960, équivalent en pouvoir d’achat
à 1,59 euro de 2017. Le trafic de 1960 était de 87 milliards de
kilomètres, il s’est élevé à 606 milliards en 2017 soit une
multiplication par 7. Utiliser le prix du carburant pour réduire la
consommation est une mesure qui assassine les usagers à faibles revenus
sans améliorer le climat. Les « droits d’accise » sont la forme moderne
de la gabelle. Leur finalité première est de contribuer à alimenter le
budget de l’Etat. Ils peuvent aussi dissuader une consommation qui
induit un risque, il faut alors assurer l’équité, ce n’est pas toujours
le cas. Tous les tabacs sont fortement taxés, mais pas tous les alcools.
Le vin est très peu taxé alors que le risque lié aux boissons
alcooliques ne dépend que de la quantité d’alcool avalé et non de la
quantité d’eau qui lui est associée. Quand des ménages ont de faibles
revenus et un usage contraint de leur voiture, ils ne peuvent pas
acheter un véhicule hybride ou électrique. Les aides de l’Etat aident
paradoxalement les usagers dont les revenus permettent ce type d’achat.
En outre, si la pollution des villes est réduite, l’effet de serre ne
l’est pas si l’on tient compte de l’ensemble des méthodes de production
de ces véhicules.
La seule méthode efficace à court terme pour réduire la dépense liée au trafic est la réduction de la vitesse. Elle a de multiples avantages :
- Si la vitesse maximale sur autoroutes était abaissée à 110 km/h, la réduction
des dépenses de carburants des usagers se situerait entre 1,5 et 2
milliards d’euros, au prix d’un accroissement du temps de parcours.
Rappelons que la consommation minimale de la majorité des voitures est
obtenue entre 50 et 60 km/h et que de nombreuses autoroutes de liaison
sont déjà limitées à 110.
- Cette
mesure amorcerait le respect de l’engagement pris par la France en 2015
de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 29% d’ici 2028. Elle
exprimerait un choix entre la protection de l’environnement et l’appétit
de vitesse, associé à l’absence égoïste de prendre en compte la qualité
de vie des générations à venir.
Le second obstacle à la réduction de la mortalité sur les routes est
produit par la mauvaise application des règles. Les avertisseurs de
radars et de contrôles sont des instruments qui tuent. Une loi puni le
signalement d’un contrôle dans les transports en commun. Bel exemple de
la différence de prise en compte de l’argent et de la vie des usagers.
Après les
progrès des 12 derniers mois, le
bilan de la mortalité en décembre permettra d’évaluer les effets des
modifications de comportement, ils peuvent être supérieurs à la
mortalité sur les ronds-points. Une vitesse accrue pour compenser un
blocage du trafic, une crainte de contrôle réduite, dégradent dégradent
les résultats.
Gérer la sortie
du séisme social produit par les gilets jaunes sera difficile car ils
interfèrent avec le cumul d’obstacles nationaux et mondiaux. La 5ème
république a centralisé le pouvoir et réduit le rôle du Parlement. Les
30 glorieuses ont créé des richesses qui ont amplifié les inégalités de
ressources. Des agglomérations ont grandi démesurément, d’autres se sont
rétrécies et appauvries. On a construit des voitures inutilement lourdes
et rapides donc trop consommatrices des carburants. Elles permettent
d’accéder à des supermarchés qui ont tué les magasins où l’on allait à
pied. La publicité séduit, manipule, et endette. Le coût des logements
refoule en périphérie les moins nantis. L’industrie s’affaiblit.
L’endettement de l’Etat s’accroît. Cette liste n’est pas exhaustive
Parallèlement,
des pays ont acquis nos savoir-faire et leurs salaires très bas
déséquilibrent les échanges. La gestion de l’argent a transformé un
outil (faire avec) en finalité (en avoir plus). Les banques américaines
ont cru pouvoir prêter à des insolvables et les actions pourries ont
provoqué la crise de 2008. Lehman Brothers se plante et les Etats
doivent renflouer les banques, y compris les nôtres qui ont voulu leur
part de ce gâteau empoisonné. La dette publique mondiale supplémentaire
a été évaluée à 25 000 milliards de dollars. Le dirigeant de Lehmann
Brothers travaille toujours dans la finance et ses revenus sont élevés.