association de la notion de rackett fiscal à l'usage des radars automatiques

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Une méthode largement utilisée par Airy Routier dans son livre est la tentative de dévalorisation du dispositif de contrôle des vitesses par des radars automatiques par sa finalité qui ne serait pas la sécurité routière, mais le souci d’accroître les ressources financières de l’Etat. Il s’agit d’une désinformation prouvée par de multiples documents.

Les propos d’Airy Routier. Nous ne visons pas ici les propos concernant les abus de pouvoirs de l’Etat émanant d’autres personnes et qui sont citées dans le livre. Ces « sélections » de propos ne sont pas neutres, ils sont choisis pour renforcer les positions de l’auteur, mais ne peuvent lui être imputés. Il est cependant utile d’en donner des exemples pour montrer dans quel registre de contestations de l’action publique se situe l’affirmation d’un « racket fiscal de l’Etat » :
« Le ¨Pen a dénoncé bien sûr « le racket légal de l’Etat » en matière d’amendes routières ». Un peu plus tôt, visitant le mondial de l’automobile, Bruno Gollnisch, délégué général du Front National déclarait : « Comme le dit Monsieur Le Pen, l’Etat français est une putain devenue chaisière […]. Il persécute les automobilistes en les écrasant de taxes et leur pourrit la vie avec ses amendes. » (FSP p.239)
« Fédida parle d’une « logique totalitaire », dénoncée dés l’origine de la loi Sécurité et Liberté par des personnalités aussi différentes que Michel Foucault, Robert Badinter, Raymond Aron ou Alain Madelinet qui, trente ans plus tard, à pris corps dans ses « formes les plus exacerbées et les plus sournoises » ». (FSP p.166)
« Certains voient dans cette mise en place discrète, au nom de l’intérêt général, l’expression d’un certain génie administratif français, le même qui a permis de lancer avec succès le programme électronucléaire civil, Ariane, Airbus ou bien le Plan Calcul ou encore Concorde qui furent de sinistres échecs. Une sorte d’avatar du Gosplan, comme l’a écrit Jacques Lesourne, major de polytechnique, ancien directeur du Monde, dans l’un de ses livres : « Le mal français vient de ce que pendant les trente glorieuses, la France a été, sur le plan économique, une Union soviétique qui a réussi » » (FSP p.70)
Nous nous limiterons aux propos affirmant qu’une motivation économique est à l’origine du développement des radars automatiques, en utilisant notamment le chapitre 5 dont le titre est sans ambiguïté : « un racket fiscal bien organisé »
« pourtant le vrai scandale, le vrai racket, n’est pas celui de quelques policiers ripoux face à une poignée de chauffeurs de taxis. Il est beaucoup plus important, ne se compte par en centaines, mais en centaines de millions d’euros : c’est celui de l’Etat tout puissant et désargenté, qui a décidé de renflouer ses caisses avec les amendes, en particulier celles éditées par le système des radars, pratiquement transformés en agents percepteurs …automatiques. » (FSP p.84/95)
« Taxer les automobilistes : quoi de plus tentant pour un Etat en mal de recettes ? » (FSP p.99)
« Aujourd’hui tout s’accélère de façon démente avec l’installation des radars automatiques. Les 4,6 millions d’excès de vitesse qu’ils ont constatés en 2005 ont rapporté 380 millions d’Euros à l’Etat » (FSP p.100)
« Lorsqu’on se penche un tant soit peu sur l’importance des sommes en jeu ; sur le contenu, dans le détail, des nouvelles loi dites lois Gayssot et Perben ; ainsi que sur les moyens nouveaux mis en œuvre pour recouvrer les amendes, il apparaît clairement que l’argument de la sécurité routière n’est plus qu’un habillage visant à justifier et à masquer la levée d’un impôt nouveau, auprès des seuls automobilistes » (FSP p.102)
« C’est, pour le ministère des finances, une affaire en or. Une évidence pour tout le monde, sauf pour l’Observatoire national interministériel de sécurité routière, dont le raisonnement est particulièrement alambiqué. Selon cet organisme dévoreur de papier et producteur d’idées reçues, les rentrées fiscales liées aux radars automatiques sont compensées et au-delà, par une baisse « de l’ordre de 500 millions d’euros » de la TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers) engendré par la diminution des vitesses. (FSP p.100)

La réalité des démarches qui ont conduit à développer les radars automatiques en fonction d’objectifs de sécurité routière est très différente :
1.    Le rapport de 2002 d’un magistrat, Pierre Pélissier, présenté au Conseil National de Sécurité Routière du 11 juillet 2002 a fait le point sur les premiers essais de mise en œuvre de radars automatiques réalisés en 2001 et au premier semestre 2002 et sur les solutions possibles aux blocages juridiques. Cet objectif de sécurité routière est clairement défini dans le projet de loi de Finances pour 2003 (Dprojetloidefinances2003.pdf)
2.    La commission d’évaluation du système de contrôle et de sanctions présidée par Michel Ternier, mise en place en 2001 et qui a étudié le devenir des contraventions dans cinq ressorts judiciaires a également fait des propositions précises d’automatisation des dispositifs de contrôle pour les rendre plus nombreux et plus dissuasifs.
3.    Au moment de la décision d’implanter des radars automatiques fixes et signalés de façon spécifique, le but étant d’avoir un rôle éducatif destiné à obtenir le strict respect des règles avec des tolérances faibles sur les excès de vitesse (5km/h) le futur bilan de l’opération n’était pas prévisible avec précision. Personne n’avait l’expérience d’un dispositif actif 24 heures sur 24 avec une tolérance faible et une signalisation renforcée. L’inquiétude du ministère des finances (qui était représentée dans la commission Ternier) était de développer un outil dont les recettes seraient inférieures aux dépenses d’installation et d’entretien. Il suffit de regarder les premiers graphiques décrivant la modification du comportement des automobilistes au niveau d’un radar pour comprendre que ce risque était fondé. La proportion des automobilistes en infraction s’est effondrée à un niveau très faible (DevalCSA2005infractions.pdf - graphique de la page 31). C’est le constat mois après mois de l’évolution du dispositif de contrôle automatisé qui a permis de connaître le bilan des investissements, des dépenses de fonctionnement et du montant des amendes payées « Lorsque les 100 radars fixes et 500 radars mobiles seront déployés, on peut prévoir environ 9 millions de contraventions par an représentant environ 375 M€ de recettes » (page 59 du rapport).
4.    Année après année un double succès a été documenté :
a.    La nouvelle politique de sécurité routière, incluant le CSA, a obtenu une réduction des vitesses moyennes qui est maintenant proche de 11% et la mortalité a été divisée par deux. C’est un résultat exceptionnel et qui n’était pas prévisible. Jean Claude Gayssot avait fixé un objectif identique de 50% de réduction de la mortalité en 1997 et à la fin de la législature, la réduction était de 2,2%
b.    Un succès technique et économique. Le système fonctionne bien et son coût n’est pas imputé à l’ensemble des citoyens, à l’opposé, les revenus des infractions vont contribuer à des actions de sécurité routière.

Commentaires
Au-delà des excès de langage d’Airy Routier et de ses amalgames dépourvus de pertinence, ses conclusions sur les motivations financières de la mise en place du contrôle sanction automatisé ne reposent sur aucun élément objectif. A l’opposé, tous les documents disponibles, le travail des commissions qui l’ont proposé, la situation de ces commissions auprès du ministère de l’équipement et par-dessus tout les incertitudes initiales sur ce que serait le bilan financier de l’opération ôtent toute crédibilité à cette hypothèse.