commentaires du communiqué du ministère de l'intérieur du 10 février 2011

Le texte en noir est celui du communiqué produit par le ministère, mes commentaires sont en bleu ou en rouge.

Jeudi 10 février 2011, Brice HORTEFEUX, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, s'est rendu à la gare de péage de Saint-Arnoult-en-Yvelines, pour présenter le plan d'action de lutte contre l'insécurité routière.
 
2010, neuvième année consécutive de baisse de l'insécurité routière
 
Relevant la « baisse encourageante de l'insécurité routière » enregistrée en 2010, le ministre a précisé que « le nombre de morts sur les routes en 2010 avait baissé de -6,5% à 3 994 tués ».
 
Il a indiqué que « nous sommes passés, pour la première fois depuis plus d'un demi-siècle, sous la barre des 4 000 morts » et que le nombre de décès sur les routes a été « quasiment divisé par 2 en seulement 9 ans alors qu'il avait fallu 30 ans, de 1972 à 2002, pour le diviser par 2,4 ». Et Brice HORTEFEUX de souligner qu'au total,  depuis 2002, 23 000 vies ont été épargnées et 300 000 hospitalisations ont été évitées.

Ces faits sont indiscutables. Nous avons vécu une période de 8 ans qui a exprimé la possibilité d'adopter et de mettre en oeuvre des mesures de sécurité routière efficaces. Ces faits sont encourageants pour tous ceux qui participent à ces actions. Elles ont en outre le mérite de démontrer que les politiques peuvent prendre des décisions pertinentes dont les résultats sont indiscutables. Il faut rappeler que les décisions de décembre 2002 concernant le dispositif de contrôle et de sanctions ont eu un effet immédiat, ce qui élimine l'intervention des améliorations des véhicules et de l'infrastructure. C'est le comportement des usagers qui s'est modifié parce que l'application des règles avait retrouvé sa crédibilité.

Revenant sur la tendance à la hausse observée en janvier (+21% pour le nombre de morts sur les routes, +4,1% pour le nombre d'accidents et +1,7 pour le nombre de blessés), le ministre a appelé à "ne pas  surestimer, ni sous-estimer" ces résultats :
 ·    ne pas les surestimer, car janvier 2010 avait été un mois de  mortalité routière particulièrement bas en raison des mauvaises conditions météorologiques qui avaient fortement réduit le trafic ;
 ·    ne pas les sous-estimer car cette tendance à la hausse s'explique   aussi par le "relâchement du comportement de certains conducteurs qui mettent, par leur irresponsabilité, tous les usagers de la route en danger".
 
Les résultats de janvier 2011 ont agi « comme une piqûre de rappel », a indiqué le ministre, qui les voit comme une incitation à redoubler de vigilance et à renforcer la lutte contre l'insécurité routière.

Un bémol quand au "particulièrement bas" qualifiant janvier 2010, mois utilisé pour la comparaison avec janvier 2011. Il y avait 273 tués sur les routes en janvier de l'année 2010 qui s'est terminée avec un bilan de 3994 victimes. Avec une contribution moyenne de 7,4% de la mortalité de l'année, la part de janvier se serait élevé à 295. Ces 22 tués en plus ne sont qu'une part de la différence réelle observée qui a été de 58.

Un plan national de lutte contre l'insécurité routière pour mieux faire connaître et mieux faire respecter les règles Soulignant que "chaque entorse au code de la route se chiffre en vies humaines",
 
Brice HORTEFEUX a détaillé les mesures phares du plan de lutte contre  l'insécurité routière, autour de deux axes : la formation des conducteurs et les moyens à mettre en oeuvre pour lutter contre l'insécurité routière.
 
Renforcer la formation des conducteurs « à tous les âges de la vie » :
 - Apprentissage des règles du code de la route « dès l'école », en adaptant les messages à l'âge de chaque auditoire ; afin de sensibiliser les futurs conducteurs « à l'importance d'une conduite responsable et respectueuse des règles du code de la route ». Le ministre a souligné qu'« à compter de la rentrée 2011, un module sécurité routière sera dispensé dans chaque lycée ».
 - Renforcement de la formation des conducteurs de motocyclettes légères à 7h, depuis le 1er janvier 2011. Obligatoire pour tous les conducteurs novices, cette formation sera également suivie par les conducteurs possédant un permis B mais n'ayant jamais piloté de deux- roues motorisés.
 - Mise en place de formations complémentaires : le ministre a indiqué qu'une réflexion, en liaison avec les assureurs, est actuellement en cours ; afin de permettre aux conducteurs novices et aux personnes âgées de bénéficier de formations complémentaires pour s'informer des évolutions de la réglementation et de la signalisation routières.

Il est toujours bon et bien accepté de rappeler qu'il faut éduquer, former,informer, sensibiliser avant de parler du dispositif de contrôle et de sanctions. J'entens cela depuis une quarantaine d'années et il y a eu des progrès indiscutables dans ce domaine. Il ne faut pas oublier que les enseignants des enfants dans le domaine de la sécurité routière sont leurs parents. On apprend les comportements d'usage sur la banquette arrière et l'on peut remarquer les différences entre le droit et la pratique.

 Se doter de moyens matériels et d'une organisation adéquate pour mieux lutter contre les principales causes de mortalité routière
 
 1) Le ministre de l'intérieur a tout d'abord dressé un double constat  : d'une part, la conduite en état d'ébriété ou sous l'emprise de stupéfiants et la vitesse excessive sont les deux causes principales d'accidents et d'autre part, un conducteur de deux-roues motorisés court 24 fois plus de risques qu'un automobiliste d'être tué dans un accident. Sur cette base, il a affirmé sa volonté de « renforcer très sensiblement les moyens dont disposent les policiers et les gendarmes
 » :
 - Développement et modernisation du dispositif de radars automatisés, avec le déploiement de 1 000 radars supplémentaires d'ici  2012 :
 - mise en place de 100 radars tronçons permettant de contrôler la vitesse moyenne sur un trajet de plusieurs kilomètres et de 90 radars  discriminants permettant de différencier les poids-lourds des véhicules légers et de désigner la voie empruntée par le véhicule en infraction ;

Je recommande la mesure de vitesses moyennes depuis une décennie. Rappelons que le communiqué publié à l'issue du CISR de décembre 2002 contenait la phrase suivante :  "Par ailleurs, sera créée sur les autoroutes concédées, une infraction pour vitesse moyenne supérieure aux limites réglementaires, celle-ci étant calculée au moyen des tickets de péage". Quand on lit cette phrase 8 ans plus tard, on prend la mesure de la méfiance qu'il faut avoir dans le domaine des effets d'annonce.


 - installation des premiers radars de passage à niveau au cours du second semestre de l'année 2011 ;

Je considère cette mesure comme une gesticulation sans grand intérêt. Compte tenu du nombre de passage à niveau avec demies barrières, de la fréquence des passages en slalomant entre les deux barrières, du fait qu'un tué sur deux dans ces circonstances est un deux roues non immatriculé, je serai intéressé de connaître le rapport coût efficacité qui n'a pas manqué d'être calculé avant de choisir de mettre en place une telle mesure.


 - lancement d'un programme de développement de radars mobiles de  nouvelle génération, afin de contrôler la vitesse dans le flux de circulation.

Le développement de ces radars de "3ème génération" est indispensable. Les radars fixes sont repérés et signalés par une géolocation aux usagers qui ne souhaitent pas respecter les règles. Les radars automatiques déplaçables existent mais ils sont souvent repérés et signalés par des organismes qui devraient être interdits car ils réduisent les possibilités de contrôle, donc de prévention. j'ai indiqué par ailleurs que ce développement était une recommandation ancienne. Elle était formulée de la façon suivante dans les conclusions du rapport d'évaluation des radars automatiques rédigé par l'ONISR avec la collaboration d'un groupe d'experts : "il est important, à côté des radars fixes et des radars mobiles (dans un véhicule à l'arrêt ou au sol), de développer l'usage des radars automatiques embarqués dans des véhicules en déplacement qui porteront la dissuasion de l'excès de vitesse dans des zones où le contrôle fixe est impossible car trop dangereux pour ceux qui le mettent en oeuvre et pour les usagers. L'expérimentation et l'homologation de ce type de radars est une urgence." Ce passage est extrait d'un rapport d'évaluation des radars automatiques produit par le ministère de l'équipement. Il a été publié en mars 2006. Il y aura cinq ans dans quelques semaines. Il est impossible de passer de l'annonce à la réalisation sans sans méthode de travail associée à des compétences administratives et techniques . Elles ont existé en 2002, il doit être possible de les mettre en place en 2011.

  - Mise à la disposition des forces de sécurité d'« équipements nouveaux et à la pointe de la technologie » : Brice HORTEFEUX a notamment indiqué :
 - le déploiement sur le terrain de 1 800 éthylomètres embarqués
 supplémentaires, d'ici 2012 ;

J'ai présidé une commission d'homologation des éthylomètres après le vote de la loi de 1978. Par la suite les éthylomètres embarqués ont été un progrès considérable, car ils évitaient aux policiers et aux gendarmes d'avoir à regagner leur commissariat ou leur brigade quand ils ont constaté un dépistage par éthylotest positif. Sans vouloir être systématiquement critique, il faut cependant ajouter qu'avant d'utiliser un éthylomètre pour obtenir une preuve légale, il faut disposer de dépistages de qualité. Nous sommes passé des éthylotests chimiques (les ballons) aux éthylotests électroniques plus précis. En 2002 le CISR avait inscrit dans son compte rendu la décision d'abandonner les éthylotests chimiques. En 2005 un rapport des experts du CNSR sur l'alcool contenait les phrases suivantes résumant les mesures à prendre : "La première sera l’application la plus rapide possible de la décision du CISR du 18 décembre 2002 prévoyant le remplacement des éthylotests chimiques par des éthylotests électroniques avant la fin 2005 et l’achat d’éthylomètres embarqués. Le compte rendu du CISR était le suivant : « Pour les contrôles d’alcoolémie, les conducteurs devront se soumettre aux éthylotests électroniques. Beaucoup plus fiables et plus performants, ils remplaceront définitivement les alcootests et les éthylotests chimiques." 8 ans après la décision et 6 ans après la date fixée pour sa mise en oeuvre, cette mesure n'est toujours pas appliquée. Il y a encore des contrôles avec des ballons.

 Il  - la mise à disposition de la police et de la gendarmerie, dès 2011, de 326 dispositifs de lecture automatisée des plaques d'immatriculation (LAPI) ;

Le système LAPI a été développé pour identifier des véhicules volés. Il faut étendre son utilisation au repérage des véhicules dont on sait qu'ils ne sont pas dans la légalité pour d'autres raisons. Quand un radar automatique constate un excès de vitesse et que l'envoi de la contravention est suivi d'un retour avec la mention "n'habite pas à l'adresse indiquée" il faut placer cette immatriculation dans la base embarquée à bord d'un véhicule équipé d'un système LAPI et pouvoir intercepter ce véhicule. Ce qui est conçu pour lutter contre le vol doit pouvoir être utilisé pour assurer le respect des limitations de vitesse.

 - et la généralisation progressive du procès-verbal électronique à l'ensemble du territoire, à compter de cette année, pour arriver à 24 000 terminaux d'ici 2012.

Il s'agit d'un outil indispensable qui réduira le temps de secrétariat des gendarmes et des policiers.

 2) Le ministre a ensuite présenté les mesures visant à améliorer
 l'organisation et le ciblage des actions :
 - élaboration dans chaque département d'un diagnostic approfondi des causes des accidents de la route et d'une cartographie des axes  routiers les plus dangereux ; afin « d'adapter la politique de sécurité routière aux réalités locales » et « de mieux cibler les actions mises en oeuvre sur le terrain, sous l'autorité des préfets ».
 - Brice HORTEFEUX a précisé qu'il avait demandé aux préfets « de dynamiser l'action des commissions départementales consultatives d'usagers ou d'en créer là où elles n'existaient pas encore ».

L'urgence est d'évaluer la qualité et les résultats des plans départementaux de contrôle et de sanctions. Certains départements n'ont jamais produit ce plan. Il s'agit là d'un nouvel exemple de décision sans évaluation de la mise en oeuvre.

 - Enfin, le ministre a annoncé une adaptation des modes d'action des forces de sécurité « afin de renforcer l'efficacité de leurs  contrôles » :
 - un accroissement de l'emploi des véhicules banalisés et des motocyclistes en tenue civile ;
 - une multiplication des opérations de grande ampleur faisant appel, en plus des forces de sécurité, aux douanes, aux contrôleurs des transports ou aux inspecteurs du travail ;
 - l'association des polices municipales aux opérations organisées par la police et la gendarmerie.
 
 Un plan complété sur le terrain par la mise en oeuvre de la LOPPSI, dès sa promulgation Revenant sur l'adoption de la LOPPSI cette semaine  au Parlement, Brice HORTEFEUX a précisé que « 13 dispositions  relatives à la sécurité routière viennent renforcer, de manière très opérationnelle et immédiate, l'arsenal juridique » dont disposent les forces de sécurité sur le terrain.
 
 Citant quelques exemples de ces nouveaux outils, le ministre a notamment mentionné :
 - la possibilité pour les préfets d'immobiliser ou de mettre en fourrière les véhicules des conducteurs ayant eu un comportement particulièrement dangereux;
 - l'extension des possibilités de rétention et de suspension du permis de conduire et l'allongement à un an de la suspension administrative de permis ;
 - la systématisation des actions de dépistage des produits stupéfiants, qui pourront désormais être conduites par des policiers municipaux ;
 - l'automatisation de la confiscation du véhicule pour les infractions les plus graves, et la création d'une nouvelle peine complémentaire permettant de contraindre un individu condamné pour conduite en état d'ébriété à ne conduire que des véhicules équipés d'un dispositif d'éthylotest anti-démarrage ;
 - la qualification du trafic de points en un délit passible d'un an de  prison et de 30 000 euros d'amende.

C'est la face sécuritaire de la LOPPSI2, le Parlement l'a défigurée par son amendement affaiblissant le permis à points dans une démarche témoignant d'une irresponsabilité complète.

 Brice HORTEFEUX : « Au niveau opérationnel avec le plan d'action pour la sécurité routière et au niveau juridique avec la mise en oeuvre des nouveaux outils de la LOPPSI, nous sommes totalement mobilisés pour faire de 2011 la dixième année consécutive de baisse de l'insécurité routière ».